Le nom des gens (07.01.2011)

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C'est un film sympathique, assez drôle, actuel mais pas sans distance, que j'ai vu dans une salle comble plus d'un mois après sa sortie. Ce qui empêche Le nom des gens d'accéder au statut d'excellente comédie est sa mise en scène, peu personnelle (alors que le sujet traité l'est absolument mais cela a été suffisamment rabaché dans la presse pour ne pas avoir à y revenir ici). Celle-ci se fonde trop exclusivement sur une série d'idées souvent séduisantes mais qui pourraient sortir tout aussi bien du cerveau d'un Jean-Pierre Jeunet. Les récits entrecroisés des origines de Bahia et Arthur, les petites fantaisies spatio-temporelles et l'attendrissement devant certains objets du quotidien ou certaines anecdotes renvoient régulièrement vers l'univers de l'auteur d'Amélie Poulain. Mais reconnaissons bien que la plupart de ces "trucs" fonctionnent ponctuellement. J'aime assez, par exemple, l'illustration de cette incapacité qu'a Arthur de visualiser son père jeune ou cette manie que l'on a chez les Martin de n'acquérir que du matériel qui finit inexorablement par être démodé quelques mois plus tard.

D'autres réserves viennent à l'esprit mais celles-ci peuvent plus aisément se voir "retournées". La succession de saynètes, l'impression de catalogue et les invraisemblances (la dernière partie autour de l'islamiste), les auteurs les assument certainement au nom de la fable contemporaine. De même, l'aspect décousu du récit découle de l'alternance du point de vue, les bourrasques provoquées par Bahia ayant leur répercussions jusque là. Parmi les scènes d'émotion, ma préférence va aux plus simples, à la merveilleuse façon qu'a Sara Forestier de répondre à la question de Jacques Gamblin s'étonnant de son choix de coucher avec lui alors qu'il n'est pas de droite : "Toi c'est pas pareil. Toi j'taime."

Plus que le côté "coquin" du film (pour agréable qu'il soit, il ne se transforme jamais en autre chose, à cause du maintien du déséquilibre entre la nana délurée et le mec pudique, le désir ne semble circuler que dans un sens) c'est l'approche politique qui intéresse. Elle est plus subtile que ne le laissent entendre les journalistes lorsqu'ils mettent en exergue telle phrase sur les étrangers prononcée par l'héroïne. Ces propos sont en effet soit parfaitement intégrés aux discussions, soit, justement, gentiment pointés comme purs slogans, discours construit au fil d'une éducation et d'un militantisme particuliers. A ces sorties plus ou moins pertinentes de Bahia, les auteurs, essentiellement par l'entremise du personnage masculin, ajoutent des contre-exemples ou des nuances, de façon à éviter le manichéisme et le trop politiquement correct. Faisant cela, ils ne cherchent toutefois pas à contenter tout le monde (contrairement à Ozon et sa Potiche) ni à brouiller les pistes sur la position politique qu'ils tiennent. C'est tout à leur honneur.

 

nomdesgens00.jpgLE NOM DES GENS

de Michel Leclerc

(France / 100 mn / 2010)

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