Just a kiss (07.05.2008)

(Ken Loach / Grande-Bretagne / 2004)

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224707508.jpgKen Loach au pays de la comédie romantique ? A première vue, c'est un peu comme si Angelopoulos tournait un western-spaghetti ou Haneke une comédie musicale. De fait, si le britannique nous propose bien avec Just a kiss (Ae fond kiss...) un "boy meets girl", il ne peut s'empêcher de prendre comme protagonistes un DJ pakistanais musulman brun et une enseignante irlando-écossaise catholique blonde. Avec un tel point de départ, il semblerait bien que tous les obstacles religieux et communautaires imaginables ne vont pas tarder à encombrer le chemin de la passion amoureuse.

Comédie est d'ailleurs un bien grand mot. Si Loach avait jadis parsemé ses Riff-raff et autres Raining stones de savoureuses situations humoristiques, les quelques saynètes censées faire sourire au début de Just a kiss ne font pas spécialement regretter que le cinéaste reprenne vite son sérieux. En revanche, pour ce qui est de la romance, on est plus confiant, Loach ayant déjà parsemé quelques uns de ses films d'histoires de couples attachantes. Toujours aussi inspiré dans ses casting et sa direction d'acteurs, jusque dans les plus petits rôles, il nous fait découvrir cette fois-ci Atta Yaqub (Casim) et Eva Birthistle (Roisin), dont le visage rosit merveilleusement dans la séquence la plus torride que le Monsieur ait filmé à ce jour.

Le couple formé est crédible. Mais comme d'habitude, Loach a un message à faire passer. Et quand il traite d'un sujet, il se veut exhaustif : on pose le problème et on en développe tous les prolongements. Cela à parfois ses avantages, mais dans Just a kiss, la problématique du racisme et du choc des traditions étouffe sérieusement la trame sentimentale. On se demande par exemple quelle utilité, autre qu'un énième cours d'histoire sous prétexte de la mise à jour d'un secret de famille, peut bien avoir l'évocation soudaine, en plein milieu d'une discussion du couple, de la dramatique partition de l'Inde en 47.

Déchirements familiaux, tensions entre les deux amants, problèmes professionnels, les ennuis sont souvent lourdement annoncés par avance (il est étrange que Roisin, en tant qu'enseignante dans un lycée catholique, ne soit pas mieux informée de la nécessité à fournir des preuves à sa hiérarchie, certificat à l'appui, de sa bonne conduite). Heureusement, mise à part la mascarade organisée par la famille de Casim, mise en scène de façon plutôt grossière, Loach arrive toujours à tirer le meilleur parti de ces séquences trop lisiblement amenées, par sa captation faussement documentaire des échanges, la confiance qu'il met en ses comédiens ou sa façon de désamorcer certaines situations (le directeur de l'école qui débloque temporairement la situation de Roisin par rapport à sa hiérarchie catholique). C'est donc quand Casim semble soudain se mettre en retrait face au discours amoureux entier et exclusif de Roisin (alors que l'on s'attendait à ce que ce soit plutôt leur discussion précédente autour de leurs religions respectives qui soulève des réticences), c'est quand Roisin reste inflexible devant le chantage au respect des traditions et à l'équilibre d'une famille que lui fait la soeur de Casim, bref, c'est dans ses instantanés, plus que dans son discours laïc, juste mais insistant, que Just a kiss m'a intéressé.

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