Ha Ha Ha (22.04.2011)

Hong,Corée,2010s

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Avec Ha Ha Ha, Hong Sang-soo continue de façonner son œuvre de cinéaste de l'intime et, plus précisément encore, des récits de l'intime. Il prend cette fois-ci comme point de départ la rencontre de deux amis, leur conversation se transformant en deux récits distincts mais convergents et dont le déroulement en alternance va donner le film lui-même. Les deux hommes racontent chacun l'histoire qu'ils ont vécu en un lieu commun, un petit port coréen, à la même époque, et auprès des mêmes personnes, mais sans que l'un ne soit jamais conscient de la présence de l'autre sur les lieux.

Comme à son habitude, Hong Sang-soo fait preuve d'une grande subtilité narrative. L'argument ne donne pas lieu à une débauche d'effets de mise en scène accentuant les croisements et les échos se faisant au fil de ce double récit. Un trouble léger s'installe bien avec les reprises de certains cadrages, de certaines postures, de certaines situations, mais le procédé n'est jamais appuyé et se remarque à chaque fois comme par accident. De même, le sentiment de resserrement et d'augmentation progressive des points de rencontre entre les deux récits est intelligemment provoqué, entre autres, par la diminution de la durée des intermèdes au présent (le repas bien arrosé des deux amis), jusqu'à disparaître souvent, sur la fin, ne faisant lien d'une histoire à l'autre que par le maintien d'un très bref dialogue en off.

Le film a le charme de ses interprètes. Un charme étrange, reposant tantôt sur la pudeur, tantôt sur la crudité et le débordement (balancement que l'on peut dire lié à l'état d'ivresse, régulièrement décrit ici). Un charme un peu désuet aussi, dans les attitudes, dans quelques dialogues, dans des choix techniques comme l'accompagnement musical ou le recours au zoom (ces zooms semblent parfois mal assurés, or, il est évident que cet effet, destiné sans doute à accentuer le réalisme, est volontaire, la place qui leur est assignée dans la séquence étant toujours extrèmement précise). Un charme, enfin, légèrement intermittent, qui agit au gré de l'intérêt que l'on porte aux différentes scènes, certaines étant très belles, d'autres plus banales et longuettes.

Nous avons donc là un film fort agréable et particulièrement intelligent, mais... Je n'avais pas croisé la route de Hong Sang-soo depuis la sortie de La femme est l'avenir de l'homme et je m'aperçois que sept années et cinq titres plus tard, rien n'a changé. J'aurai pu écrire, à deux ou trois détails près, la même chose en 2004, époque à laquelle je jugeais déjà ce que je venais de voir à l'aune du film précédent, que lui-même etc... Ainsi, l'élève Hong Sang-soo est un bon élément qui a toujours la moyenne, qui, apparemment, ne rend jamais de copie vraiment renversante mais qui ne fait jamais de faute non plus. La correction de ses devoirs est très facile et la note qu'on lui donne ne varie qu'en fonction de notre état d'esprit du moment, ou peu s'en faut. La femme est l'avenir de l'homme m'avait plus séduit que Turning gate ou La vierge mise à nu par ses prétendants, alors que les qualités et les défauts respectifs étaient comparables. Ha Ha Ha est long de près de deux heures, ce qui me semble être au moins une demie de trop et, notamment pour cette raison, il rejoint plutôt, pour moi, les deux derniers titres cités plutôt que le premier, même si l'écart est, je le reconnais, difficilement mesurable.

 

Hong,Corée,2010sHA HA HA (Hahaha)

de Hong Sang-soo

(Corée du Sud / 115 mn / 2010)

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