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Fameux film de genre que je découvre avec 34 ans de retard. L'argument mis en avant, celui de la boisson mystérieuse et dévastatrice dès la première gorgée, source de la majorité des moments gores, est comme oublié en cours de route pour revenir sur la fin, signe de faiblesse pour un scénario bien moins souple et travaillé que la mise en scène de Jim "steadicam" Muro. Celui-ci en fait d'ailleurs un peu trop avec sa caméra, cherchant manifestement à prouver, avec ce premier (unique) film, plutôt qu'à assurer une cohérence. L'approche documentaire sur le monde des clochards new-yorkais est régulièrement parasitée par des effets liés au genre horrifique (typiquement, l'agression de la jeune femme par la bande de clodos filmée comme une attaque de morts-vivants : nuit, brume, rictus, postures étranges, bras qui se tendent de nulle part pour saisir la victime...) et par la quasi-transformation du décor déjà si anxiogène de la Grosse Pomme d'alors en ruine post-apocalyptique (le "royaume" du chef de bande). Cet univers terrible et violent, Muro arrive à le faire exister à l'écran en passant avec aisance d'un personnage et d'un lieu à d'autres, malgré les énormités et les trous de l'intrigue, malgré les exagérations de ton et de style. Comme l'utilisation de mélanges de couleurs lors des séquences les plus dégoûtantes, les multiples entorses au réalisme font que le film est plus bizarre que traumatisant, ce qui n'est pas plus mal.