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L'intérêt du film tient avant tout à son sujet, l'objection de conscience, qu'Autant-Lara portait depuis dix ans, et au fait qu'il ne parle que de ça, sans aucun écart. Pour ce qui est du style, tantôt on apprécie une certaine rigueur, une austérité qui pourrait paraître documentaire, tantôt on ressent tout le poids de la caméra. Les dialogues (Aurenche et Bost) sont loin de s'enchaîner parfaitement, notamment parce que les prestations secondaires sont parfois catastrophiques, au point de foutre en l'air certaines scènes potentiellement fortes. C'est qu'autour de Laurent Terzieff, Horst Frank et Suzanne Flon, tous les autres sont des acteurs yougoslaves qu'il a fallu ensuite doubler en français. Le film est en effet de cette nationalité-là, Autant-Lara n'ayant jamais trouvé le moyen de le tourner en France, où il finit par sortir brièvement plusieurs mois après sa présentation à Venise. Sujet intéressant donc, mais traité bizarrement, semblant recouvert de morale chrétienne avant un revirement tardif d'autant plus invraisemblable (à son procès, Terzieff déclare soudainement ne plus se sentir chrétien), peut-être une pirouette du cinéaste pour se garder alors des défenseurs à gauche. Difficile, finalement, de comprendre ce personnage d'objecteur, trop contradictoire ou naïf, et le film dans son ensemble. La mise en parallèle avec une histoire de prêtre-soldat allemand ayant abattu un résistant français sur ordre de son supérieur apporte plus de gêne qu'autre chose (la séquence en flashback, prière partagée entre victime et bourreau, puis crise violente de ce dernier au moment de l'exécution, est d'un ridicule achevé). Cette construction en miroir aboutit à un double procès militaire détaillé en une dernière demi-heure assommante. Ultime handicap : le placement pénible, à trois reprises, de "L'Amour et la Guerre" par Aznavour.