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Certes, cette très célèbre comédie de mœurs (que je n'avais jamais vue jusque là) se partage, avec une poignée d'autres films, le mérite d'avoir enclenché le renouvellement du cinéma américain à l'approche des années 70. De même, on peut relier plusieurs de ses composants à une multitude d'œuvres postérieures, jusqu'à aujourd'hui celles d'un Paul Thomas Anderson. En revanche, il me semble évident que tout ce qui est semé ici a donné ailleurs de bien plus beaux fruits. Nichols a tenté d'importer des procédés de mise en scène alors très rattachés à la modernité européenne. Cela peut s'avérer délicat, surtout dans le cadre d'une comédie, et il en résulte malheureusement une série d'effets visuels qui nous détachent encore plus d'une histoire reposant déjà très peu sur une quelconque vérité. Mrs Robinson et Benjamin ne sont que des personnages de papier, aux réactions souvent incompréhensibles sinon par le besoin de faire avancer le scénario, et munis d'un capital sympathie à peu près nul. Il n'y a ici que de la technique et de la mécanique. Quant à la satire de la bourgeoisie, elle ne porte pas bien loin : comme la réalisation de Nichols et le comportement initial du personnage masculin, on oscille constamment entre audace et précaution. Ainsi, la dernière partie du film est un peu plus intéressante car plus enlevée mais, finalement, c'est aussi la plus conventionnelle sur le plan moral (sans parler du fait que le personnage d'Elaine continue à être caractérisé exclusivement à travers les désirs de Ben).