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La Jeune Fille (Luis Buñuel, 1960)

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Le lieu de l'intrigue, la production et les acteurs sont états-uniens mais tout a été tourné au Mexique, sans qu'on le remarque un seul instant. Il n'y a pas que ces conditions particulières qui rapprochent étonnement des "Aventures de Robinson Crusoé", il y a aussi l'île quasiment déserte et l'opposition entre un homme blanc et un homme noir. Buñuel a voulu faire un film anti-raciste mais aussi un film anti-manichéen. Il "complique" donc la tâche au spectateur en ne lui permettant que très tardivement de croire réellement à l'innocence du fugitif accusé de viol par une femme blanche et, d'un autre côté, en provoquant quelques sursauts d'humanisme chez le chasseur sudiste. L'histoire finit bien. Sauf que l'adieu entre les deux hommes est filmé de loin, sans dialogue, et que son racisme, le blanc ne le met de côté que lorsqu'il y trouve un intérêt : faire travailler l'autre, le laisser dormir dans la cabane de la jeune fille pour que celle-ci vienne dans la sienne et, au final, accepter de ne pas dénoncer l'afro-américain en échange d'une promesse par le prêtre, mis au courant de tout, de ne pas l'inquiéter lui-même pour abus de mineure. Car si le déroulement est limpide, sans détour, efficacement basé sur les actions et les réactions (poursuite, corps-à-corps sont excellemment filmés), le fond moral est rendu complexe par l'intervention du religieux et surtout, dès le début, par ce personnage principal de jeune fille de treize-quatorze ans. Innocente sauvageonne, elle est donc violée par l'associé de son défunt grand-père et maintenue sous son emprise. C'est aussi par surprise qu'elle est baptisée, dans la rivière, par le prêtre. Seul l'homme de couleur, débarqué de nulle part, la respecte, même lorsqu'il la retrouve en train de se doucher puis qu'ils discutent alors qu'elle a seulement une petite serviette autour de sa taille. A lire quelques critiques, le film était vu totalement différemment à l'époque (on parlait volontiers de "nymphette" et de "découverte de l'amour"...) et l'âge de la fille n'était pris en compte que de façon secondaire, raccordé à des réflexions bien plus larges sur le racisme et la morale religieuse. Aujourd'hui, en grande partie pour cela, il apparaît comme l'un des moins confortables de Buñuel, alors que la mise en scène est des plus simples et des plus fluides, pour un résultat à la fois direct et ambigu. C'est aussi remarquablement interprété par chacun(e).

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