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Ici, les monstres sont dépourvus de sens visuel et attaquent uniquement au bruit, ce qui oblige les humains à rester parfaitement silencieux. Pour réussir son coup à partir d'un concept aussi contraignant, il faut soit bénéficier d'un scénario hyper-astucieux soit déployer une mise en scène expérimentale ou au moins basée sur de solides partis pris. Il n'y a rien de cela dans le film. Passée une introduction laissant espérer un minimum de risques narratifs et esthétiques, fond et forme ne s'écartent jamais de la tradition jusqu'au dénouement. Sont alors accumulés les palliatifs : apartés dans des recoins sécurisés, musique envahissante, gestes signifiants (combien de fois l'index dressé devant la bouche ?), entorses à la vraisemblance (quel parent a eu un bébé aussi calme ?), bidouillages incessants et pas toujours rigoureux des niveaux sonores... Par ailleurs, la communauté en péril est réduite à la cellule familiale, de surcroît endeuillée dès les premières minutes, ce qui va encombrer la totalité du récit principal d'une culpabilité pleurnicharde. De l'instant communion mains jointes autour de la table en travelling circulaire jusqu'au sacrifice paternel laissant juste le temps d'exprimer en langue des signes le "je t'aime" trop longtemps retenu, rien ne nous est épargné pour promouvoir les valeurs de la bonne famille américaine. A côté, Spielberg c'est Pasolini.