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Wendy et Lucy

(Kelly Reichardt / Etats-Unis / 2008)

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wendyandlucy.jpgC'est l'histoire d'une fille fauchée, en route pour l'Alaska, seulement accompagnée de sa chienne Lucy, et qui se retrouve coincée dans une petite ville de l'Oregon par la panne de sa voiture et la perte de l'animal.

Pour Wendy et Lucy (Wendy and Lucy), Kelly Reichardt fait le pari du minimalisme des moyens, de la mise en scène et de l'argument. Si ténu soit-il, le fil narratif ne se délite pas. L'intérêt est constamment maintenu car la cinéaste co-scénariste prend soin, bien que ne filmant que des situations a priori anodines, de faire naître des micro-récits du quotidien (les différentes rencontres que fait Wendy, son bref séjour en cellule...) et de charger certaines séquences d'un potentiel fictionnel sans prolongement effectif (ces passages sont le plus souvent inquiétants, porteurs de menaces d'autant plus oppressantes que l'héroïne est, à ces moments-là, clairement vulnérable). Le spectre de l'ennui est déjà repoussé sur ce flan.

Kelly Reichardt se détourne de la non-fiction extrémiste (l'absence de récit) aussi bien que du néo-réalisme formaliste (la beauté du vide). Un équilibre est trouvé entre les quelques plans larges situant Wendy dans les rues de la ville et une majorité de plans rapprochés sur les personnages. Ne surtout pas voir dans ce dernier choix de mise en scène un manque d'inventivité ou d'ampleur. Cette proximité vise évidemment à l'empathie mais elle n'est pas forcée par une caméra à l'épaule qui se plaquerait sous le nez des comédiens. Ces cadrages à hauteur de poitrine libèrent surtout une évidence : celle de la présence de chacun. Ces gens sont vraiment là, ils lestent le plan de tout leur poids. De plus, ce rapprochement qui ne vise que l'essentiel permet à Reichardt de ne pas surplomber son sujet, de ne pas livrer son message social clé en main. De ce point de vue, la séquence dans le commissariat de police est remarquable par son refus d'écraser Wendy sous le poids de l'institution qu'il faudrait critiquer. Il n'y a aucun plan d'ensemble. Nous ne voyons que des bribes de décors, quelques détails, quelques gestes de policiers (qui, malgré cette parcellisation, gardent leur identité puisqu'il ne s'agit pas non plus de les déshumaniser). C'est ainsi, sans en avoir l'air, que Wendy et Lucy décrit un monde en déshérence nécessitant une lutte de tous les jours.

Dessinant de formidables portraits, captant la ville sans artifices et faisant parfaitement ressentir le basculement des repères entre le jour et la nuit (alternance si importante pour Wendy dans son mode de vie marginal) Kelly Reichardt offre également un rôle magnifique, mystérieux et émouvant à Michelle Williams. A deux ou trois reprises, lorsqu'elle rapproche son visage d'une vitre de voiture, elle ressemble à Barbara Loden dans Wanda.

Commentaires

  • Ouaip, c'est un bien beau film que ce Wendy et Lucy. J'admire chez Kelly Reichardt (depuis "Old Joy") la cohérence absolue entre le sujet traité, la manière de le raconter et la distance prise avec les personnages (tu en parles très bien d'ailleurs).
    Cette femme sait ce qu'elle veut: faire un véritable cinéma contemporain. Chapeau.

  • Merci.
    Oui, c'est un cinéma très cohérent. A la bonne distance et à la bonne hauteur.
    Cela me donne envie de découvrir ce "Old Joy" (pour voir aussi, plus longuement, ce bon vieux Will Oldham en acteur).

  • Bonjour Edi, j'ai moi aussi beaucoup aimé ce film. La réalisatrice montre bien le quotidien de ces petites villes américaines qui suintent l'ennui, la pauvreté, et les gens ont un quotidien banal et sans beaucoup d'intérêt. On sent les gens seuls. Il y a un peu de solidarité mais si peu. La vie est dure aux Etats-Unis, cela m'a rappelé quelques souvenirs. Michele Williams filmée au plus près est remarquable. Bonne journée.

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