Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

malick

  • La Balade sauvage (Terrence Malick, 1973) & Mean Streets (Martin Scorsese, 1973)

    ****

    Un heureux hasard m’a permis de revoir à la fois le Malick et le Scorsese. Et de me rendre compte à quel point ils peuvent être croisés.
    Les deux ont été présentés pour la première fois en octobre 1973 à New York, à quelques jours d’intervalle. On peut soutenir que leur auteur a fait "mieux" tout de suite après, disons encore plus "beau" ou plus "maîtrisé", avec Les Moissons du ciel et Taxi Driver (par dessus la commande, fort bien exécutée d’ailleurs, de Alice n’est plus ici pour Scorsese). Mais Badlands et Mean Streets ont la force des cristallisations. Tout est déjà là, dans un état pur, ce qui en fait des grands films tout en les rendant peut-être plus attachants que les suivants.
    Sur une base criminelle bien établie ils développent tout de suite un univers personnel. Lumière du jour, superbes plans généraux, instants muets seulement rattachés à la narration par la musicalité de la mise en scène pour l’un, lumières artificielles de la nuit, plans séquences tortueux, agitation et logorrhées dans un rythme chaotique pour l’autre. Malick fait naître un sentiment de plus en plus étrange face à l’inconséquence terrible et désarmante de ses fugitifs. Scorsese saisit d’entrée par l’énergie folle et tourbillonnante qui propulse son Charlie, tiraillé et qui s’épuise à "sauver" Johnny Boy.
    On a deux utilisations bien différentes de la musique et de la voix off. On a également deux doubles avènements : Martin Sheen et Sissy Spacek, Harvey Keitel et Robert De Niro. Les autres, ils disparaissent au passage des premiers, se retrouvent constamment autour des seconds. D’un côté une fuite irréfléchie, de l’autre un cercle infernal.
    Le personnage de Sheen se prend pour James Dean, celui de Keitel ne jure que par John Wayne. Et cerises sur les gâteaux méta-cinématographiques : Malick et Scorsese qui apparaissent en personne, mais pour mettre en danger leurs personnages, perturbant une prise d’otage ou commettant le massacre final. Drôles de signatures.

  • The tree of life

    Malick,Etats-Unis,2010s

    ****

    Quel jugement puis-je porter, moi, perdu, retrouvé, puis perdu à nouveau ?

    Es-Tu là ?

    Guide-moi dans Ton Œuvre.

    Aide-moi à penser et à trouver les mots.

    L'expérience fut vécue, mais en retrait, souvent, trop souvent.

    Mais oui, quelle musicalité, quel montage, sensoriel. Ces images ne raccordent pas et restent pourtant inextricablement liées.

    Ta caméra flotte.

    Des bribes de vie, uniquement. Des bribes qui s'assemblent encore et encore.

    Une Mère aimante, un Père rigide, des Frères. Une famille. La Famille. Et Dieu qui est dans tout.

    Le temps passe, les temps s'entremêlent. 1950-2010. Et cela dure, cela dure... Rien de classique dans Ta manière de raconter. Tu tiens, Tu tiens, fier, magnifique et démonstratif.

    Des voix off chuchotées. Des phrases, pesées, espacées.

    Cinéma-poème, cinéma-confesse, cinéma-prêche.

    En contre-plongée, l'Homme grandit et le ciel affirme sa présence. L'Humain, la Nature et le Grand Ordonnateur dans le même plan.

    Parfois, au milieu du cinéma de poésie, brièvement, un cinéma de prose. Pourquoi ? Pourquoi ces petits îlots narratifs au milieu du torrent ?

    Quelle ligne traces-Tu, quel est Ton dessein ? Le chaos d'abord, puis la naissance de notre monde, la théorie de l'évolution. Et le retour à l'humain pour l'histoire d'une vie, jusqu'à l'au-delà.

    Big-Bang alors.

    2001, Atlantis, Ushuaïa Nature ? L'Odyssée de l'espèce : tunnel narratif au cœur de Ton Œuvre qui l'est si peu, de toute façon.

    De la matière gazeuse à la cellule. De la bactérie au dinosaure.

    Grandeur de la Nature : le tyrannosaure épargne le parasaurolophus sur le bord de la rivière, à l'exact endroit, sans doute, où Tes soldats, franchissant la Ligne rouge, s'entretueront.

    L'enfant (re)paraît. Il grandit.

    Le tunnel m'a laissé les oreilles bourdonnantes et les yeux piquants. C'est encore laborieux. Il me faut du temps. Celui de l'enfance. Je commence à me reprendre à l'arrivée de l'adolescence. D'autant mieux que Tu me parles enfin sans détour. L'émotion était là, mais elle n'avait jamais vraiment éclos. Alors que maintenant, les gestes, les regards et les paroles s'inscrivent enfin dans du réel. Du récit, mais au bout de combien de temps ? Je ne sais plus. Cette histoire est belle pourtant, ce mélodrame est fort. Il y a tant de choses à lire dans le regard de ce garçon. Trente ? Quarante ? Soixante minutes ?... de cinéma, non pas à la Hauteur, mais à la bonne hauteur...

    D'autres, très grands, et Toi aussi, en d'autres temps, ont préféré n'atteindre à l'universel qu'après avoir patiemment détaillé le particulier. Sûr de Ta force, Tu as décidé d'en commencer tout de suite avec l'Immensité, et, suivant un étrange mouvement, de la délaisser un instant pour mieux y revenir, bien sûr, pour clore Ton discours.

    Car retour vers les sommets asphyxiants il y a bien, in fine.

    Passage. Porte. Au-delà. Larmes. Musique.

    Ton cinéma est déjà, naturellement, métaphysique et magnifie depuis toujours la moindre parcelle du réel. Lui laisser prendre à bras le corps le Grand sujet, c'est le rendre excédentaire et emphatique.

    Je le vois bien : plus Tes films s'élèvent, plus Ton cinéma ploie.

    Je ne T'entends pas.

    Tu ne m'as guère aidé.

    Existes-Tu vraiment ?

     

    A lire, parmi tant d'autres, trois textes plus sérieux et plus assurés : sur 365 jours ouvrables, sur Fenêtres sur cour, sur La troisième chambre.

     

    Malick,Etats-Unis,2010sTHE TREE OF LIFE

    de Terrence Malick

    (Etats-Unis / 138 mn / 2011)