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On craint d'abord la redite et les gags convenus dans cette chronique de village où Harold Lloyd campe un jeune homme réduit aux tâches ménagères par son père sheriff et ses deux costauds grands frères, trois légendes de la région. Mais le calme relatif permet l'approfondissement du thème connu du garçon manquant de confiance, notamment en passant par la naissance de la relation amoureuse, beaucoup plus basée sur la sincérité que dans d'autres Lloyd et par là assez émouvante. Cet amour est traduit dans deux très belles séquences qui se répondent, quand le héros ne peut se résigner à quitter sa belle des yeux, d'abord verticalement, en grimpant le long d'un arbre par palliers successifs (la caméra accompagnant ce mouvement ascendant pour rattraper à chaque fois dans le cadre l'héroïne descendant dans la vallée) puis, plus tard, horizontalement, en courant après la calèche qui l'emmène (et, subtile variation, ici pour échapper à ses deux frères furieux). Cette inspiration se retrouve dans le clou du film, un affrontement sur un bateau entre le gentil garçon et le méchant voleur. La mise en scène, à propos de laquelle il est difficile d'imaginer que Lloyd n'en soit pas responsable pour une grande part, en explore, au fil du combat burlesque, tous les recoins, avec un sens de l'espace digne de Keaton.