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Jeremiah Johnson

(Sydney Pollack / Etats-Unis / 1972)

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378162d92ef78e99a1c02f87d28bfdc8.jpgJe le dis d'emblée, Sydney Pollack est pour moi un cinéaste estimable, réalisateur de bons films, mais jamais transcendants. Ce Jeremiah Johnson, après lequel je courrais depuis longtemps, à priori meilleur film de son auteur, ne me fait, malheureusement, pas revoir mon jugement, aussi agréable ce (faux) western soit-il à regarder. Jeremiah Johnson, venant de nulle part, décide de mener la vie rude, dangereuse et solitaire, de trappeur. Son périple montagnard sera l'occasion de rencontres insolites avec d'autres chasseurs et plusieurs tribus indiennes. Un foyer se constitue après son mariage forcé avec une squaw et l'adoption d'un garçon dont la famille de colons, à l'exception de sa mère rendue folle, a été massacrée. L'aspiration idyllique à l'harmonie ainsi réalisée est cependant bientôt brisée. Johnson, entraîné dans un cycle de violences, refait son chemin à l'inverse, croisant une seconde fois les mêmes personnes et disparaissant, auréolé d'une dimension quasi-mythique.

L'oeuvre se place à la croisée de deux voies prises par le grand cinéma américain des années 70 : un cinéma de l'errance et du désenchantement (illustré par Altman, Monte Hellman ou Bob Rafelson) d'une part, et un cinéma de l'interrogation des mythes fondateurs et de leur rapport à la violence (celui du Boorman de Délivrance, d'Eastwood ou de Sam Peckinpah) d'autre part. Les caractéristiques saillantes des grands films de l'époque (qui fait encore rêver par rapport aux ambitions et à la liberté de ces cinéastes) sont là : déplacement ou retournement des codes, narration qui s'éloigne de la construction classique, qui module le temps à sa guise, dimension politique et approche nouvelle des rapports aux minorités. Qu'est-ce qui empêche alors Jeremiah Johnson de tutoyer les mêmes sommets ? Le style assurément.

Pollack use et abuse des gros plans sur le visage de Robert Redford. L'idée est alléchante d'encombrer Johnson d'une indienne parlant dans une langue incompréhensible et d'un garçon mutique, mais elle pâtit des multiples échanges de regards lourdement soulignés. De même, le pressentiment tragique apparaissant en traversant le cimetière indien ou la transformation de Johnson en figure mythique passent par des idées visuelles malvenues. Pollack ne s'en tient pas à une ligne, à un ton, il tire parfois vers le picaresque, parfois vers la joliesse (les séquences centrales n'échappent à l'ennui que par les traits d'humour, essentiellement basé sur le barrage des langages), parfois vers la violence brutale (les affrontements sont à la fois traîtés sans musique et à la fois bourrés d'effets spectaculaires). La dernière partie, langoureuse, nous enveloppe sans nous élever.

Si l'indécision de la mise en scène de Pollack me gène, le propos reste évidemment assez passionnant dans le regard porté sur les indiens, ni caricaturés, ni angélisés et surtout dans le constat de cet impossible retour à la nature, symbolisé par le plan final, ce signe amical adressé à l'Autre, au loin, geste qui voudrait se transformer en main tendue mais qui reste figé.

Commentaires

  • Un de mes westerns préférés, ode à la nature vierge et aux grands espaces montagnards, dans la solitude des trappeurs !

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