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pollack

  • On achève bien les chevaux (Sydney Pollack, 1969)

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    Je crois que jusqu'au bout je resterai peu touché par le cinéma de Sydney Pollack. Nouvelle tentative (la septième pour tout vous dire) avec "On achève bien les chevaux" que je n'aurais peut-être pas dû enchaîner aussitôt avec la découverte du livre de McCoy tant la noirceur et la sècheresse de ce dernier m'y semble beaucoup trop atténuées et les modifications apportées par les adaptateurs discutables (par exemple, à l'absolu dégoût de la vie proféré par Gloria est substitué une sorte de dépit amoureux : c'est l'un des éléments rendant le dénouement tragique beaucoup moins "compréhensible" par rapport au roman, implacable et dans lequel, il est vrai, cette fin est annoncée d'entrée - Pollack ne le fait pas et se trouve obligé de filmer des flash-forwards parcellaires et peu convaincants sur son héros en train d'être jugé). Il y a toujours un moment chez Pollack où mon intérêt faiblit, où il me semble que ça patine. Trop sentimental peut-être, et trop d'effets de mise en scène pour souligner les moments forts, comme ici les gros plans grimaçants, le montage excité et le ralenti lors de la scène de la course. Le film manque à mon sens de tension interne et de naturel, et les rapports entre le fond (la foule) et le premier-plan (les personnages principaux) restent conventionnels. On pense beaucoup à Altman, qui aurait fait éclater tout ça, sans doute inspiré par la terrible ironie et la notion de fabrique du spectacle. Il était d'ailleurs, cette année-là, en train de trouver son style sur le plateau de "M*A*S*H". Et il avait tourné en 1961 un épisode du show TV "Roaring 20's" titré "Dance Marathon" où une intrigue policière se déroule dans ce même contexte et où l'on retrouve quantité de notations communes au livre et au film de Pollack (le décor, les règles, les pauses, les sous-intrigues, la dégradation physique...). Ce dernier, malgré des moyens incomparables, une plus grande liberté et huit ans de recul, n'apporte finalement par grand chose de plus.

  • Jeremiah Johnson

    (Sydney Pollack / Etats-Unis / 1972)

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    378162d92ef78e99a1c02f87d28bfdc8.jpgJe le dis d'emblée, Sydney Pollack est pour moi un cinéaste estimable, réalisateur de bons films, mais jamais transcendants. Ce Jeremiah Johnson, après lequel je courrais depuis longtemps, à priori meilleur film de son auteur, ne me fait, malheureusement, pas revoir mon jugement, aussi agréable ce (faux) western soit-il à regarder. Jeremiah Johnson, venant de nulle part, décide de mener la vie rude, dangereuse et solitaire, de trappeur. Son périple montagnard sera l'occasion de rencontres insolites avec d'autres chasseurs et plusieurs tribus indiennes. Un foyer se constitue après son mariage forcé avec une squaw et l'adoption d'un garçon dont la famille de colons, à l'exception de sa mère rendue folle, a été massacrée. L'aspiration idyllique à l'harmonie ainsi réalisée est cependant bientôt brisée. Johnson, entraîné dans un cycle de violences, refait son chemin à l'inverse, croisant une seconde fois les mêmes personnes et disparaissant, auréolé d'une dimension quasi-mythique.

    L'oeuvre se place à la croisée de deux voies prises par le grand cinéma américain des années 70 : un cinéma de l'errance et du désenchantement (illustré par Altman, Monte Hellman ou Bob Rafelson) d'une part, et un cinéma de l'interrogation des mythes fondateurs et de leur rapport à la violence (celui du Boorman de Délivrance, d'Eastwood ou de Sam Peckinpah) d'autre part. Les caractéristiques saillantes des grands films de l'époque (qui fait encore rêver par rapport aux ambitions et à la liberté de ces cinéastes) sont là : déplacement ou retournement des codes, narration qui s'éloigne de la construction classique, qui module le temps à sa guise, dimension politique et approche nouvelle des rapports aux minorités. Qu'est-ce qui empêche alors Jeremiah Johnson de tutoyer les mêmes sommets ? Le style assurément.

    Pollack use et abuse des gros plans sur le visage de Robert Redford. L'idée est alléchante d'encombrer Johnson d'une indienne parlant dans une langue incompréhensible et d'un garçon mutique, mais elle pâtit des multiples échanges de regards lourdement soulignés. De même, le pressentiment tragique apparaissant en traversant le cimetière indien ou la transformation de Johnson en figure mythique passent par des idées visuelles malvenues. Pollack ne s'en tient pas à une ligne, à un ton, il tire parfois vers le picaresque, parfois vers la joliesse (les séquences centrales n'échappent à l'ennui que par les traits d'humour, essentiellement basé sur le barrage des langages), parfois vers la violence brutale (les affrontements sont à la fois traîtés sans musique et à la fois bourrés d'effets spectaculaires). La dernière partie, langoureuse, nous enveloppe sans nous élever.

    Si l'indécision de la mise en scène de Pollack me gène, le propos reste évidemment assez passionnant dans le regard porté sur les indiens, ni caricaturés, ni angélisés et surtout dans le constat de cet impossible retour à la nature, symbolisé par le plan final, ce signe amical adressé à l'Autre, au loin, geste qui voudrait se transformer en main tendue mais qui reste figé.