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Invictus

(Clint Eastwood / Etats-Unis / 2009)

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invictus.jpgLors de "leur" coupe du monde de rugby, qui arrivait, en 1995, trois ans après la fin du boycott international consécutif à la politique d'apartheid, l'Afrique du Sud a commencé par un coup d'éclat en battant l'Australie (27-18), ce qui leur assura un quart de finale facile (les deux autres matchs de poule n'étant qu'une formalité, contre la Roumanie [21-8] et le Canada [20-0]). Au stade suivant, les Samoa ne pesèrent effectivement pas bien lourd et s'inclinèrent 42 à 14. L'adversaire en demi-finale était d'un autre calibre puisqu'il s'agissait des Français. Les Springboks (surnom des locaux) gagnèrent 19-15 et eurent donc l'occasion de défier les All-Blacks, grands favoris du tournoi, en finale. Devant leurs supporters et leur président Nelson Mandela, ils réussissèrent l'exploit de l'emporter 15 à 12 (aucun essai ne fut marqué de part et d'autre).

Si l'Afrique du Sud créa la surprise, elle n'arrivait toutefois pas de nulle part, étant, depuis longtemps, une grande nation de rugby. Elle est considérée comme la troisième meilleure équipe de l'hémisphère sud, derrière la Nouvelle-Zélande et l'Australie. Cependant, il me semble qu'elle a l'image d'une équipe de qualité mais rarement géniale (les véritables connaisseurs me contrediront peut-être car je suis en effet plus compétent en ballon rond qu'ovale) .

Et bien le film d'Eastwood a les mêmes caractéristiques, collant par-là parfaitement à son sujet. Le jeu est sans surprise mais c'est solide, ça avance, ça défend remarquablement bien et ça joue au pied (le cinéaste a l'honnêteté de faire dire à l'entraîneur des Springboks : "Nous n'aurons peut-être pas le plus beau jeu mais nous serons les mieux préparés physiquement"). En comparaison des autres équipes, on est loin du style imprévisible des Français (pour le meilleur et pour le pire : un jour Les herbes folles, l'autre Les regrets) et du train d'enfer néo-zélandais lancé vers la modernité (Peter Jackson ?).

On ne s'embarrasse donc pas de fioritures. Pour la dramaturgie, la menace All-Black se réduit à la figure de Jonah Lomu. Mais après tout, pour la plupart des gens, le quinze de France d'aujourd'hui se limite à Sébastien Chabal. Même chez les pros, si l'on change momentanément de sport pour parler football, on se demande d'abord, lorsque l'on va jouer en Champions League contre Barcelone, comment stopper Messi et, si l'on joue à Boulogne ou à Nice, on se dit que pour avoir une chance de battre les Girondins, il faut avant tout museler Gourcuff. Eastwood, comme beaucoup, croit en l'homme providentiel, au guide de la nation. Sa vision de la démocratie intègre la notion de leader indiscuté (avec les risques que cela implique).

L'homme politique au destin hors du commun, comme tout grand sportif, n'oublie pas cependant les fondamentaux. Dans Invictus, les meilleures scènes sont les plus simples et les plus posées, celles, par exemple, des conversations entre Mandela et le capitaine des Springboks (Morgan Freeman et Matt Damon sont bons, crédibles). Eastwood sait tisser des relations entre les personnages. C'est un cinéaste des plans longs, pas un cinéaste de l'insert. Les plans de coupe qu'il place ici où là sont redondants et inutiles, qu'ils visent à accompagner le mouvement d'ensemble vers la réconciliation ou qu'ils servent de fausses pistes (les feintes de corps sont donc un peu téléphonées, dirons-nous).

Comme dans toutes les cérémonies d'avant-match, la musique du film est assez abominable et, au bout d'un récit plutôt agréable, dix minutes de rugby au ralenti (alors que le jeu n'était, jusque là, pas trop mal filmé malgré une football-américanisation excessive dans le rendu des chocs) et dix minutes de liesse populaire inter-raciale nous font piquer du nez. En revanche, la description d'un usage politique du sport intéresse, la représentation de l'exercice du pouvoir est convaincante et le contrepoint sur l'équipe de garde du corps poussée vers la mixité est habile. L'aspect conventionnel d'Invictuspousse à en juger chaque élément constitutif en fonction de sa subtilité ou de sa grossièreté, à les mettre en balance. Au football, on parle de différence de buts. Elle est ici égale à zéro (autant de buts marqués que d'encaissés). Le Eastwood de 2010 est une équipe de milieu de tableau. Invictus, c'est le PSG.

J'ai lu quelque part ce commentaire lapidaire, écrit par un internaute déçu : "Les séquences de match n'ont rien à voir avec le rugby". Quant à vous, mes chers lecteurs, je vous entend déjà dire : "Cette note n'a rien à voir avec une critique de film". Et bien peu m'importe... Je reste, comme Clint Eastwood, Bernard Laporte ou Raymond Domenech, droit dans mes bottes.

Commentaires

  • Bonjour,

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  • hé hé! C'est vraiment bien vu. Ed, tes critiques les plus créatives sont aussi les plus vraies, et ça c'est la classe.

  • Hello, comme tu le sais, pour moi, le sport c'est le mal donc je me suis fichue des plans de rugby comme de mon premier maillot ! J'avoue n'avoir été fascinée que par le portrait d'un sacré animal politique auquel Freeman a rendu toute sa grandeur, si certains l'avaient oublié.

  • News de star : euh... Merci d'avoir salué le "dynamisme" de mon blog, mais je ne crois pas être intéressé.

    TG : Merci. C'est qu'il faut bien, parfois, essayer de trouver un angle particulier pour parler d'un film déjà abondamment commenté par ailleurs. C'est probablement ce que tu as dû faire aussi de ton côté. Je n'ai toujours pas eu le temps de lire ta note "croisée" (Tetro/Invictus) mais je ne vais pas manquer de le faire prochainement (et je crois que je vais être d'accord avec toi :)).

    Fred : Alors quoi, Fred, même pas de quoi te donner de la matière pour le questionnaire sur l'érotisme ? Tu n'aimes pas l'ambiance des vestiaires ?

  • Ed, d'abord, laisse moi te dire que je t'aime !
    Ensuite, je te signale, à toutes fins z'utiles, que le questionnaire est commencé depuis longtemps mais que je n'en suis pas encore arrivée à la question de la douche... Ouaip, la délicieuse Cameron a eu bien de la chance dans Any given sunday... et je connais bien évidemment par cœur "les garçons dans les vestiaires" de la non moins charmante Clarika... alors... patience ! (mais bon, euh, Matt Damon ne m'inspire guère de tendres sentiments... j'aurais bien été dansé avec Morgan moi !)
    ;)

  • Oh mais je te laisse me le dire... :)

  • En tout bien tout honneur
    je me permets de rajouter ceci pour ta dame
    :)

  • "Cette note n'a rien à voir avec une critique de film".

  • une critique très sportive, j'aime bien le genre... ;)

  • J'attendais une première note sur ce film. Je n'ai pas vraiment de divergences avec cette note - si ce n'est que j'éviterais de comparer Invictus au PSG.

    Deux points peut-être : la photo est moche, je ne sais pas jusqu'à quel point c'est voulu, mais on dirait du super-8.

    Eastwood sait manier l'émotion, j'ai eu plus d'une fois les yeux qui m'ont picotés. Son sujet, anyway, était excellent et même filmé sans grande envergure, cela reste un bon film. Je ne compte plus les analyses sociologiques du sport qui ne disent pas autre chose que ce qu'Eastwood montre dans le sien : le sport c'est aussi de la politique.

  • Fred : Cela va sans dire...

    Pascale : :-)

    Phil : Merci. Pas sûr de continuer sur cette voie (le prochain film dont je vais rendre compte s'y prête mal... c'est un Straub).

    Julien : Je n'ai pas trouvé la photo moche. On remarque juste que le film est beaucoup plus "solaire" que les précédents (sans ombres et donc... sans "méchants").

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