(Anthony Minghella / Etats-Unis / 1996)
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Quelques connaissances portant une certaine affection à ce méga-succès, tel un Out of Africa des 90's, je me suis laissé tenter par la diffusion télé du Patient anglais (The english patient).
A un moment, dans les premières minutes, la belle infirmière Juliette Binoche, affairée à l'arrière d'un camion en queue de convoi militaire, voit se porter à sa hauteur une jeep, dans laquelle une amie à elle lui propose en vain de l'accompagner jusqu'à la ville voisine. La jeune femme n'est filmée que furtivement, sa réplique ("J'adore cette fille, elle ferait n'importe quoi pour moi !") est porteuse d'un je-ne-sais-quoi d'ironie du sort, une petite accélération inopinée manque de la renverser en arrière, puis un plan d'ensemble nous montre bien la file de camions à gauche et le petit véhicule qui remonte sur la droite... Avec une telle mise en scène, une seule chose peut advenir pour clore la séquence : l'explosion de la jeep au bout du chemin. Ce verrouillage de la forme est sans doute l'une des définitions possibles de l'académisme.
Mais cet académisme peut avoir un petit avantage quand il s'affirme ainsi dès le départ. Ainsi prévenus, nous pouvons alors suivre ce long récit romanesque sans en attendre monts et merveilles, mais en y guettant les petits écarts, les variations infimes. Minghella joue d'abord des allers-retours entre deux époques (les prémisses de la guerre où se noue la passion entre le comte hongrois et la belle anglaise et la fin du conflit, lorsque l'homme, à l'article de la mort, se confie à une infirmière) de manière classique mais soignée, nous gratifiant de raccords assez beaux (le désert se transformant en drap ou l'ombre d'une main se profilant sur un visage brûlé). Le début intrigue suffisamment pour tenir en éveil quelques temps et suivre avec intérêt cette passion africaine. Ralph Fiennes et une extraordinaire Kristin Scott Thomas, libèrent l'intensité nécessaire aux grands mélodrames. On ne peut malheureusement pas en dire autant de Juliette Binoche, confinée dans un rôle sans relief. Cette image parfaitement lisse de l'actrice a bien sûr séduit Hollywood jusqu'à lui offrir un Oscar. Ce qu'elle donne ailleurs, depuis vingt ans, est d'une autre trempe. Quoi qu'il en soit, cette partie italienne est particulièrement faible, accumulant scènes anodines et dramatisation de mauvais goût (le suspense balourd autour du déminage au lendemain de la nuit d'amour) et elle s'articule de plus en plus mal au fil du temps avec l'autre. Ce qui n'était que fluides réminiscences devient la mise à jour laborieuse d'un secret, par l'intermédiaire du personnage de Willem Dafoe. Une fois les orages de la révélation passés, il ne nous reste plus qu'à subir la tarte à la crème de la compassion jusqu'à l'accompagnement vers une mort douce, dans un finale que n'arrivent plus à rehausser les éclairs romanesques du passé.
Commentaires
Bonjour Ed, pour moi, le Patient anglais m'a permis de voir un des plus beaux couples à l'écran : Ralph Fiennes et Kristin Scott Thomas. Ils sont sublimes. J'en suis encore toute émue. C'est la partie la plus intéressante du film. Tout ce qui se passe en Italie est (à mon avis) raté et je suis entièrement d'accord pour dire que le personnage de Juliette Binoche (que je n'aime pas) n'apporte rien au film. Son histoire avec l'Indien est très terne. Il y a des longueurs dans le film dès que mon couple favori n'est plus présent à l'écran. Et c'est dommage, ça m'a gâché mon plaisir.
Bonjour Dasola. Quand tu ajoutes "que je n'aime pas", tu parles du personnage ou de Juliette Binoche ? (Attention à ta réponse. C'est pour moi l'une des plus grandes acrtices françaises).
En tout cas, nous sommes d'accord sur les qualités respectives de chaque partie. Si Minghella avait choisi de pousser à fond son mélodrame en se consacrant simplement à l'histoire du couple Fiennes/Scott Thomas, peut-être aurait-il réussi un grand film.
Bonjour Ed, tu vas me détester mais tant pis, je n'aime pas Juliette Binoche (l'actrice), la femme je ne connais pas. Elle m'énerve, elle me crispe. Je ne trouve pas qu'elle soit une grande actrice. Je l'ai découverte dans Rendez-vous de Téchiné en 1985 (eh oui, cela ne me rajeunit pas et mon antipathie à son égard a commencé là). Désolé Ed, je n'y peux rien. Bonne journée quand même.
Aaargh...
Je n'aurais jamais aucune réserve sur Juliette Binoche. Elle peut tourner dans des films médiocres, faire toutes les pubs de parfum qu'elle veut, je m'en fous. Elle reste à jamais la Anna de "Mauvais sang", le film français qui m'est le plus cher. En 86, jamais rencontre avec une comedienne (et un film) ne m'avait autant bouleversé et l'adolescence étant loin, il est probable que cela ne se reproduise pas.
Mais pas de soucis, Dasola, si on peut s'écharper entre nous sur certains films ou réalisateurs, le rapport de chacun avec les acteurs est tellement subjectif qu'il serait vain de se disputer.
Je suis bien d'accord avec vous : la partie entre Fiennes et Scott-Thomas est de loin la meilleure du film. Je trouve qu'il y a certains moments de grâce comme cette scène du bain où il désigne le creux anguleux à la naissance du torse de son amante. Un film d'une facture classique certes, mais finement réalisé.
Votre analyse est vraiment pertinente. J'ai regardé aussi le film ce soir-là mais je n'aurais pas su le commenter.
C'est un film qui se laisse voir mais ne m'inspire pas. Pourtant il est vrai que Ralph Fiennes et Kristin Scott-Thomas manifestent une intensité peu commune et qu'ils apportent une dimension particulière au genre du mélodrame.
Merci bien, Dominique. Je vois que tout le monde ici s'accorde sur les qualités et défauts du film et que le couple romanesque fait l'unanimité.