Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Les chevaliers de la table ronde

(Richard Thorpe / Etats-Unis - Grande-Bretagne / 1953)

■■□□

chevaliers.jpgLa télévision permet de temps à autre de juger sur pièces quelques titres émergents de filmographies de cinéastes hollywoodiens consciencieux mais sans style particulier, tel Richard Thorpe.

J'ouvre tout d'abord une parenthèse. Les chevaliers de la table ronde (Knights of the round table) a été diffusé ce lundi soir par Arte, quelques jours après Deux hommes dans la ville et Quand Harry rencontre Sally, autant de films qui, il y a dix ans, avaient plutôt leur place sur France 2 ou France 3, chaînes qui diffusaient récemment The patriot, Le fugitif et La relève, autant de films qui, il y a dix ans, avaient plutôt leur place sur TF1, chaîne qui diffuse maintenant des séries. Dans 10 ans, on décale encore d'un cran ?

Fin de la parenthèse et retour à Richard Thorpe, réalisateur d'une bonne centaine de longs-métrages de 1924 à 1967. Certaines oeuvres se détachent timidement de l'ensemble : Le prisonnier de Zenda (1952) est un très agréable film de cape et d'épée, Jailhouse Rock / Le rock du bagne (1957) est un Elvis movie assez intéressant et Ivanohe(1952, lisez une note intéressante ici), dont j'ai un lointain mais excellent souvenir, domine le tout grâce, entre autres choses à son casting quatre étoiles (Elizabeth Taylor, Joan Fontaine et George Sanders autour de Robert Taylor). Quelques autres titres mériteraient certainement d'être mentionnés mais la majorité est apparemment sans grand intérêt. Dans 50 ans de cinéma américain, Coursodon et Tavernier consacrent une note sévère au réalisateur de Quentin Durward (1955), film "qui s'ouvre sur un plan de Chenonceaux, sous-titré Chambord, alors que l'histoire se passe sous Louis XI".

Les chevaliers de la table rondeest une oeuvre à l'image de toute la carrière du bonhomme, pour le moins inégale. La mise en scène est parfaitement fonctionnelle, ce qui donne une certaine sobriété aux combats en armures mais peut aussi laisser sombrer une bataille dans la mollesse générale (voir le traquenard tendu à l'armée de Lancelot au nord du royaume, filmé très paresseusement). Le choix d'inscrire l'action en décors réels le plus souvent possible nous vaut d'assister à un premier duel dans la forêt et à un affrontement final sur des hauteurs rocailleuses assez bien troussés. Nous nous apercevons vite, cependant, que, si réalistes soient-ils, quelque chose manque dans ces sous-bois où se croisent chevaliers et gentes dames : le peuple. S'il est fait allusion à ses souffrances, il est complètement évacué d'une histoire où il n'est question que d'individualisme et d'homme providentiel.

Cette vision de la légende arthuréenne est dépourvue de toute dimension magique. Nous nous en accommodons pendant quelques minutes avant de finir par la regretter devant cette condensation des péripéties qui rend arbitraire et parfois à la limite du risible certaines articulations du scénario. De même, la complexité des caractères se transforme en caprices peu compréhensibles (les revirements de Lancelot au moment de faire allégeance à Arthur) et les enjeux de pouvoir au château de Camelot, partie centrale du film, ralentissent considérablement le rythme. Parmi tous ces personnages taillés d'une seule pièce, celui de Perceval (Gabriel Woolf) en deviendrait presque le plus intéressant, transporté qu'il est par une série d'apparitions divines. Ava Gardner n'a malheureusement pas grand chose à faire, Mel Ferrer est un Arthur totalement engoncé dans ses habits royaux, Robert Taylor assure en Lancelot et Stanley Baker est un méchant et convaincant Modred.

Le film n'échappe à la routine (pas vraiment désagréable) qu'en de rares moments : un pari sur une danse de saltimbanque occasionnant la jalousie de Guenièvre et surtout une belle séquence centrée sur un magnifique fondu-enchaîné liant deux amoureux séparés, chacun étant perdu dans ses pensées au sommet d'une tour et serrant dans ses mains une étoffe ou un collier. Ces instants font regretter qu'ailleurs nous ne sentions jamais l'emprise des ténèbres ou le poids des armures. Ce n'était sans doute pas dans le cahier des charges, qui se limitait au spectacle coloré et à l'apologie des valeurs de la chevalerie.

Commentaires

  • Bien beau texte (notamment sur les rares moments de grâce du film à la fin de la note) qui donne envie, malgré un constat clairement en demi-teinte. J'avais de toute façon prévu de le visionner sans tarder, ce qui sera à l'ordre du jour. Je vous suis tout à fait sur l'idée d'une routine pas désagréable, concernant ce type de film : je ressens parfois une sensation analogue, qui fait qu'on se rend compte du manque d'originalité général, mais qui en même temps nous donne la sécurité d'un sentier déjà parcouru avec lequel on veut bien voyager encore une fois. D'accord aussi sur Le prisonnier de Zenda, regardé il y a quelques semaines lors d'une diffusion sur TCM (Arghh! je n'ai plus cette chaîne que j'adore), qui était bien sympathique dans son style. Merci pour le renvoi, vous m'en voyez honoré. A bientôt !

  • Tristement pertinente, cette parenthèse télévisuelle !
    Quant au film, je me hâte de le revoir et de vous lire alors.

  • complètement d'accord sur votre deuxième paragraphe. On peut ajouter Robin des bois ou Autant en emporte le vent dans les films qui passaient sur France 3 il y a dix/quinze ans.

    quant au film en question, même petit, il m'ennuyait assez comparé à Zorro ou Robin des bois. Thorpe, je le trouve nul en fait (je me souviens d'un navet passé au cinéma de minuit, LAst of the pagans.

  • Comme Christophe, je me souviens avoir trouvé le film pénible quand j'étais enfant. Ivanhoe est bien meilleur. Thorpe a réalisé aussi certains des Tarzan avec Weissmuller. je ne dirais pas qu'il était nul, c'était un bon faiseur de la MGM. Je me souviens de "La main noire", un film dramatique avec Gene Kelly et de "Honeymoon machine" plutôt marrant avec Steve McQueen juvénile. Côté westerns, "Vengeance Valley" avec Burt Lancaster et "Le pistolero de la rivière rouge" étaient bien aussi.

  • Réponse groupée :
    Le film est longuet, parfois légèrement ennuyeux, quelque fois très platement filmé, mais, en plus de mes bonnes dispositions de ce jour-là, il y a quand même d'assez jolis moments, ceux que j'ai cité. Je ne l'avais pas vu étant gamin, contrairement au Robin des Bois de Curtiz, qui est cent coudées au-dessus et qui émeut toujours autant aujourd'hui. En revanche, j'ai certainement vu l'un de ses Tarzan, mais je n'en ai pas de souvenir.
    Par rapport à ce que je connais, je ne taxerai pas Thorpe de nullité (j'avais été par exemple agréablement surpris par Jailhouse Rock). Maintenant, il est possible que cette poignée de films cités ne soit que la partie émergée d'un iceberg sans aucun intérêt.
    Je signale à tout hasard, qu'Arte passera Ivanohe dimanche soir (mais je ne sais pas s'il sera possible de choisir la VO).

  • je précise quand même que je ne dois avoir pas avoir vu plus de quatre films de Thorpe. mais je n'ai aucune envie de creuser la chose.

  • Sur le Tarzan à NY:
    http://eightdayzaweek.blogspot.com/2008/05/quel-film-avons-nous-vraiment-vu-ce.html

Les commentaires sont fermés.