(Todd Solondz / Etats-Unis / 2009)
■□□□
Life during wartime se présente plus (mêmes personnages) ou moins (acteurs différents) comme la suite de Happiness (1998), film le plus réputé, à juste titre, de la filmographie de Todd Solondz. Le cinéaste rejoue sa petite musique grinçante pour traduire toute l’horreur que lui inspire la middle class américaine, proprette en surface mais minée en profondeur par les névroses et les déviances. Cette guerre, il la mène depuis au moins dix ans, et entendre une mère de famille expliquer à son fiston qu’elle s’est sentie toute mouillée lorsque son prétendant l’a touché ou que les pédophiles sont des terroristes ne provoque plus vraiment d'effet de surprise. Les bousculades narratives de Storytelling (2001) et de Palindromes (2004) avaient réussi à masquer le goût de réchauffé (selon moi de manière assez impressionnante en ce qui concerne le deuxième) mais cette fois-ci, il n’y a plus rien pour accompagner cette énième reprise des thèmes obsédant le cinéaste. Que ce soit à l'image ou au montage, Solondz a décidé cette fois de tout mettre à plat.
Le film paraît lent, notamment à cause d'une succession de scènes très similaires. Toutes sont en effet écrites pratiquement de la même façon, en prenant appui sur des dialogues ressassant l'idée du pardon, le problème étant que ces échanges renvoient la plupart du temps à un passé volontairement mal éclairé (à moins, peut-être, que l'on ait encore très clairement en tête les situations développées dans Happiness). Les confrontations organisées sont de toute façon trop longues. On y tourne en rond. Plus inquiétant encore, on en arrive à prévoir les choses à l'avance : ce panoramique partant d'un répondeur et balayant une chambre ne peut que s'arrêter sur un corps inanimé, cette phrase de Charlotte Rampling ("J'ai besoin d'autre chose qu'une simple caresse") ne peut qu'être collée à un plan sexuel, cette recommandation maternelle ("Si on te touche, tu cries !") ne peut que déboucher plus tard sur un "gag" mécanique (ayant de surcroît une conséquence scénaristique déconnectée de toute vraisemblance comportementale).
L'échec de Life during wartime est donc aussi bien narratif (les transitions sont laborieuses et les vignettes faussement idylliques et véritablement ironiques ne parviennent pas élever le reste) qu'esthétique (la photographie, neutre, n'a pas dû demander beaucoup de travail à Ed Lachman, l'apparition de fantômes ne faisant en rien dévier la ligne morne du film). Pas de scène-choc, pas de performance d'acteur notable... Il ne reste qu'à prendre acte de la permanence du pessimisme de Solondz, à se satisfaire du fait qu'il n'en fait toujours qu'à sa tête et qu'il ne semble pas prêt à rentrer dans le rang et surtout à espérer qu'il trouve prochainement un second souffle.
Commentaires
Tout à fait d'accord ! (à ce détail près que je n'ai pas vu les autres films)..
Life during war time m'a fait l'effet d'un film à sketch sans réel souffle, qui malgré son approche décalée, tombait un peu trop facilement dans le cliché ou la figure imposée.
Ce n'est pas donc qu'on s'ennuie franchement en le voyant, mais on peine à y trouver son compte....
Merci Yoye pour ce point de vue : que quelqu'un qui ne connaît pas les précédents Solondz ait le même ressenti que moi est un peu inquiétant pour le film...
Content de te relire... il faut dire que je ne prend plus trop le temps de lire les autres. Je n'ai pas eu le même ressenti que toi : j'ai trouvé que la mise en scène propre et bien léchée faisait un bon contrepoids au propos acerbe. Et que Solondz ajoutait de l'empathie à ses personnages, pour une fois, ce qui m'a semblé intéressant.
Mon cher Neil, j'ai les mêmes remords que toi : j'ai de moins en moins le temps de lire ce qu'écrivent les voisins...
Quant au film, il me semble que l'empathie était déjà présente dans Palindromes, au moins. Peut-être qu'on la ressent plus ici car les personnages ne cessent de converser sur la notion de pardon. Mais bon, ce film m'a ennuyé...