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Comme on peut très bien bénéficier d'un massage vigoureux et s'endormir au bout de quelques minutes, on peut regarder un film réalisé à l'arrache et avoir rapidement les paupières lourdes. Le masseur est le premier long métrage de Brillante Mendoza (et diffusé depuis 2006 en France en DVD avec semble-t-il, au départ, avant l'accès à la notoriété de son auteur, un succès confiné dans le circuit gay). Il y dévoile les états d'âmes d'un employé de salon de massage pour hommes dans lequel les services prodigués peuvent aller bien au-delà de la simple application de mains expertes sur des muscles noués.
Sur quelques jours nous assistons à la naissance d'une relation entre Iliac et un nouveau client qui semble s'être entiché de lui. Les séances scandent la narration, qui peut englober les petites aventures des collègues dans les pièces voisines. Conjointement, nous observons les répercussions de la mort du père d'Iliac, sur celui-ci en apparence tout d'abord peu troublé par ce drame, ainsi que sur sa mère.
Bien que les deux récits soient mêlés, ils ne semblent pas se dérouler exactement dans le même temps. Ce léger décalage est sans doute revendiqué par le cinéaste désireux de laisser son film être guidé par les seules actions et pensées de son personnage principal. Malheureusement, l'alternance souligne plutôt grossièrement son évolution psychologique. Le corps dénudé qu'il masse avec application rappelle celui de son père toiletté à la morgue, corps mort qui va même jusqu'à prendre la place du premier devant nos yeux, un court instant, lors d'une séance.
Il y a dès lors, chez Iliac, l'ombre d'une culpabilité qui se propage. S'il semble s'accomoder très bien de son activité très particulière, l'émotion qui l'étreint lorsqu'il fouille dans les papiers de son père et, auparavant, ses coups d'œil lancés à une jolie voisine inaccessible peuvent laisser croire qu'il mériterait une autre vie. De façon attendue, le film se termine sur son départ pour un ailleurs non défini.
Cette fin en annonce d'autres chez Mendoza, de même que le cadre choisi pour l'histoire : un lieu cloisonné et bien délimité mais perméable à toutes les intrusions de l'extérieur, un lieu-miroir de la société. Le style réaliste, l'utilisation surprenante du son (sa densité et les étranges chevauchements d'une séquence à l'autre qu'il permet), la présence d'un acteur, Coco Martin, destiné à revenir régulièrement devant la caméra du cinéaste, les prémisses d'une œuvre : voici ce qui peut susciter l'intérêt devant ce Masseur. Le reste, l'aspect foutraque du montage, les idées de cadrage incongrues (la caméra posée à terre : le point de vue du caniveau ?), les effets superflus et la lourdeur psychologique de certains passages, la répétition narrative et une manière de filmer le sexe qui n'évolue pas sur la durée (elle s'affirme, assez crûment, dès le départ, alors que la relation centrale avance, de ce point de vue, par paliers successifs), m'a laissé pour le moins sceptique quant à la valeur réelle de ce premier essai.
LE MASSEUR (Masahista)
de Brillante Mendoza
(Philippines / 80 mn / 2005)