(Rowland V. Lee / Etats-Unis / 1933)
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Oeuvre inclassable du début du parlant, Zoo in Budapest est signée par R.V. Lee, cinéaste peu connu si ce n'est pour ce film (et un Son of Frankenstein de la même époque). C'est manifestement l'un des films préférés de Patrick Brion qui l'a présenté plusieurs fois au Cinéma de minuit. Plusieurs registres sont parcourus : la comédie, le conte, le merveilleux, la romance, le tout dans une atmosphère est-européenne souvent rencontrée dans le cinéma hollywoodien des années 30 (mais de Budapest, nous ne verrons que les lumières de la ville, l'action se limitant à l'intérieur du zoo, de façon à accentuer la sensation de fantastique).
La première partie, un peu longuette, pose le décor du zoo. Au milieu de la masse des visiteurs et des employés sont dégagés astucieusement plusieurs protagonistes, tout de suite typés (le héros charmeur et rebelle, le directeur compréhensif, le méchant fainéant, la belle orpheline...). Le trait est forcé, tant au niveau de la direction d'acteurs (Gene Raymond dans le rôle principal de Zani roule beaucoup des yeux) que pour les plans sur les animaux, bien intégrés au reste mais qui leur donnent fâcheusement des réactions trop humaines (blagues des singes, rire d'éléphant...). La mise en scène est assez soignée, notamment au niveau de la photo. Cela devient évident avec la fermeture du parc en fin de journée.
La jeune Eve, souhaitant s'échapper de l'orphelinat se laisse enfermer dans le zoo au départ de son groupe, aidée aussitôt par Zani (orphelin lui aussi, protégé du directeur). Une histoire de vol le pousse à se cacher également. La romance peut commencer. Eve est interprétée par la belle Loretta Young et ses grands yeux. Les échanges se font subtils et tendres. Nous apprenons que ce n'est pas la première fois qu'ils se croisent, mais la première qu'ils se parlent directement (Zani commence par simplement poser la main sur le coeur de Eve avant de dire un seul mot). Dans le havre de paix qu'ils ont trouvées pour quelques heures, le duo d'amoureux offre de petits moments de grâce. Une poésie naïve mais très touchante se dégage de ces plans magnifiques où Zani porte Eve dans ses bras pour traverser un lac, entourés de cygnes. Un troisième fugitif les rejoint : un petit garçon a lâché sa désagréable nurse pour pouvoir enfin se promener à dos d'éléphant. La réunion des trois se fait tardivement et ne débouche pas sur des scènes trop convenues. Cette nuit insolite se termine avec la reprise en mains par la police et les gardiens, et surtout sur une étonnante séquence de chaos où des fauves sont libérés de leurs cages par une suite d'incidents. Le jeune garçon menacé est bien sûr sauvé par Zani, ce qui arrangera les choses pour tout le monde. Le film fait ressentir tout de même, à travers ses yeux, quelque chose de la fascination puis de la peur que peuvent inspirer le monde animal (libre mais violent) à un enfant. Si l'aspect poétique de Zoo in Budapest peut séduire les adultes, malgré un ensemble inégal, je pense que le jeune public devrait être assez sensible à cet univers (l'introduction montrant l'amour des animaux des responsables du zoo, ainsi que leur volonté éducatrice, est très proche des nombreux reportages que l'on peut voir à la télévision sur le même thème).