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El Perdido

(Robert Aldrich / Etats-Unis / 1961)

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1207096873.jpgUn bon Aldrich, auquel le scénario de Dalton Trumbo donne un air de tragédie classique. Bren O'Malley (Kirk Douglas) arrive dans le ranch mexicain de son ancienne maîtresse Belle Breckenridge (Dorothy Malone), mariée à un éleveur qui a déjà un pied dans la tombe (Joseph Cotten). O'Malley est poursuivi depuis la frontière par Stribling (Rock Hudson) qui veut le livrer à la justice pour le meurtre de son beau-frère et la mort indirecte de sa soeur. Ils se retrouvent et, suite à leur embauche par Breckenridge pour convoyer, tous ensemble, ses 1000 têtes de bétail jusqu'au Texas, ils passent un accord : une fois passés en Amérique, ils régleront leurs comptes. Aux dangers extérieurs attendus (bandits, indiens...) pendant le périple, s'ajoute la complication des relations dans le petit groupe qui inclut Belle et sa fille Melissa (Carol Lynley), autour desquelles tournent les deux hommes. Leur estime mutuelle naissante n'empêchera pas l'affrontement final au coucher du soleil.

On le voit, El Perdido (The last sunset) met tout de suite en place des enjeux dramatiques très forts, portés par des personnages au lourd passé (enjeux auxquels viendra s'ajouter un autre dilemme sur la fin, dont je ne dirai rien sinon qu'il pousse O'Malley dans une voie sans issue). Pour certains spectateurs, l'accumulation peut gêner et faire prendre à quelques ingrédients la couleur du cliché (comme l'a ressenti ma voisine de canapé). Mais c'est qu'en ces temps-là, ma bonne dame, la vie était rude, les expressions directes et les passions exacerbées. La réussite du film tient essentiellement dans la capacité qu'a Aldrich d'inscrire et de prolonger ces éléments purement scénaristiques dans sa mise en scène. Il fait preuve dans El Perdido, du générique du début jusqu'au dernier plan où "The end" s'inscrit dans un coin de l'écran, d'un sens de la composition confondant. Sa science de l'espace et la façon qu'il a de placer ses comédiens dans le plan impressionnent : lignes de fuite, visages en enfilade ou côte à côte (surtout ceux de Malone et Lynley, mère et fille très crédibles). La circulation ne cesse de se faire entre chaque personnage, par duo, trio ou quatuor, mais plus que la ronde, c'est plutôt la ligne droite qui soutient la construction visuelle de ce film basé sur un trajet : dans la séquence de l'attaque redoutée des indiens, les chariots sont regroupés au centre du troupeau, mais au lieu d'avoir l'encerclement habituel, nous avons deux files d'assaillants qui fendent le groupe de bovins pour en prélever une partie, compensation qui évite l'affrontement.

Les rôles sont distribués sans surprise mais très efficacement. Kirk Douglas, par son jeu au bord du cabotinage, est un tueur-poète idéal. Rock Hudson, qui n'est pas le plus fin ni le plus vif des acteurs fait un cow-boy frustre très acceptable (qui n'attend pas que le corps de Breckenridge soit refroidi pour dire à Belle qu'il veut l'épouser). Dorothy Malone fait passer par ses grands yeux bleus et ronds toutes les fêlures possibles de la vie et Carol Lynley a de charmants airs de Sue Lyon ou Caroll Baker. Morceau de bravoure du film, le duel final annonce Leone. Son étirement, son montage de plus en plus court, ses brusques variations d'échelles de plans et l'escamotage du tir décisif, qui prolonge le suspense en différant de plusieurs secondes la révélation à nos yeux du résultat, tous ces effets ne sont pas indignes des meilleurs moments du grand Sergio.

Commentaires

  • Bonjour Ed, je suis désolée mais j'aimerais de te faire un plus long commentaire sur ce film malheureusement je ne l'ai pas vu et j'en n'avais même pas entendu parler (honte à moi). A part ça, j'aimais beaucoup les films d'Aldrich, Pas d'orchidée pour Miss Blandish, Qu'est-il arrivé à Baby Jane, Les 12 salopards et un film que j'ai vu une fois dans ma vie et jamais depuis "Le démon des femmes" en VF "The legend of Lylah Clare" (1968) avec Kim Novak et Peter Finch. Bonne journée.

  • Heureux de voir que nous partageons ce grand intérêt pour Aldrich. Cela m'étonne de ta part d'ailleurs, car il fait plutôt des films d'hommes (je plaisante bien sûr, avec ce lieu commun sur Aldrich et avec cette opposition films pour mecs/films pour femmes, qui ne veut rien dire).
    Il a fait de bons westerns : celui-ci, "Vera Cruz", "Bronco Apache", "Fureur apache". Moi aussi j'aime beaucoup "Baby Jane", moins les "12 salopards" mais je ne l'ai pas revu depuis très longtemps. Dans le genre du film de guerre, "Attaque !", avec Jack Palance m'avait beaucoup plus impressionné. J'aimerai bien découvrir un jour "Le démon des femmes" dont tu parles.
    Pour info, j'ai déjà fait des notes ici sur "Fureur apache" et "En quatrième vitesse".
    Bonne journée à toi.

  • un film qui m'avait semble assez lourd, la tragédie semble plaquée sur le western, plutot qu'en découler.
    dans le genre tragedie westernienne, La riviere rouge ou L'homme de la plaine Mann sont des films nettement plus beaux (notamment car ils sont plus simples d'apparence).
    ceci dit j'ai toujours du mal avec Rock Hudson dans ses films d'action. il me gache plusieurs (bons) film de Walsh aussi.

  • Je trouve Rock Hudson pas mal dans ce western. Ses films avec Walsh, je n'ai en tête que "Victime du destin", qui n'était vraiment pas terrible.
    Pour ce qui concerne "El Perdido", c'est certes en dessous de "La riviere rouge" ou "L'homme de la plaine", mais pas tant que ça. Moi, l'aspect tragédie ne m'a pas paru plaqué, il est là dès le début du film de toute façon. Il est vrai que le style d'Aldrich est plein d'excès, à l'opposé de celui de Hawks ou Mann, mais je pense que cela marche ici aussi.

  • Je suis assez d'accord avec Christophe, j'ai plutôt un mauvais souvenir de ce film, les oppositions sont trop marquées, comme le sous-texte homosexuel, la mise en scène assez statique. J'aime beaucoup Aldrich comme je l'ai déjà écrit, mais là, il m'avait déçu... Maintenant c'était il y a longtemps et à la télévision. Si j'ai l'occasion, je retournerais y voir de plus près.

  • Statique, peut-être. Très composé en tout cas.
    Quant au sous-texte homosexuel, je ne l'ai point remarqué sur le coup. Mais bon, à la limite, tout film de cowboy...

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