(Peter Lorre / Allemagne / 1951)
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Lorsque quelqu'un parle de L'homme perdu (Der verlorene), il en arrive presque toujours à placer un mot sur La nuit du chasseur(ce que n'a pas manqué de faire Patrick Brion dans sa présentation de l'autre soir). La mise en parallèle n'est, il est vrai, pas idiote puisque nous avons là les uniques réalisations de deux acteurs mythiques, tournées à quatre années d'écart. Et si l'on peut dire que le film de Peter Lorre n'atteint pas à la poésie de celui de Charles Laughton, il s'en dégage un même sentiment de singularité.
La trame de L'homme perdu m'a paru relativement obscure. C'est que, partant des retrouvailles, pour le moins non souhaitées, de deux hommes dans un camp de réfugiés, en Allemagne, à la sortie de la guerre, et construit sur divers flash-backs, le récit semble avancer en prenant de larges virages successifs. On pense d'abord être dans une histoire de vengeance, avant de passer à des problèmes d'espionnage et de finir sur un portrait psychologique de tueur. L'esthétique elle-même cultive cet art de l'entre-deux, mêlant quelques figures expressionnistes (jeux d'ombres, gros plans lumineux) à un ensemble plus réaliste. Les ambiguïtés du scénario et des caractères se prolongent : nous ne sommes pas devant un film en noir et blanc mais devant un film en gris.
Peter Lorre cinéaste agrège avec sûreté tous ces éléments (vu sa carrière, il a été à bonne école). Tout juste signalerai-je une musique trop envahissante, pointant ostensiblement les tourments de l'âme. Peter Lorre acteur est au-delà de tout éloge, allumant cigarettes sur cigarettes (le film est indiffusable en prime time, trop de tabagisme), ne cessant de parler, affichant des traits tirés, loin de l'image rondouillarde que l'on a souvent en tête, et délestant son personnage de tout aspect comique (quand nombre de ses apparitions à Hollywood véhiculait une forte dimension grotesque).
L'homme perdu est un beau traité de la désespérance.
Commentaires
Hélas j'ai raté ma programmation et je n'ai pas le film.Il me semble l'avoir vu mais il ya si longtemps.Quel dommage car Peter Lorre aurait sûrement pu être un auteur.D'ailleurs n'est-il pas un peu auteur de M. tant son interprétation est de celles qui sont à jamais inaltérables?
Damned ! Il est passé au cinéma de minuit ? Alors que ça fait des années que je rêve de le voir...
Et oui, Joachim, il a été diffusé, il y a de cela 2 ou 3 semaines, dans le cycle en cours "films rares". Demain soir, "Gabriel over the white house", qu'il faut que je revoie.
Eeguab, tu as raison. L'échec public de "L'homme perdu" a stoppé net la carrière de Lorre cinéaste. C'est bien dommage, il semblait capable de construire un univers particulièrement original. Reste à savourer ses interprétations...