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Charade

(Stanley Donen / Etats-Unis / 1963)

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charade.jpgRapidité et élégance sont les mots qui reviennent le plus souvent pour qualifier l'œuvre de Donen en général et Charade en particulier. Le lieu commun a forcément son fond de vérité. Il demande toutefois à être nuancé.

Certes le montage de Charade est assez vif. Il n'en demeure pas moins que les séquences les plus marquantes sont les plus longues (la bagarre sur le toit, la poursuite dans le métro) ou les plus calmes (le dîner sur le bateau-mouche). Le film frise quand même les deux heures et le temps m'a paru bien long, la faute à un scénario sans grand intérêt plutôt qu'à la mise en scène. L'élégance, quant à elle, n'est pas non plus toujours au rendez-vous. Dans Charade, on rote et on éternue bruyamment et si la caméra propose de beaux travellings le long des colonnes de l'Opéra, elle peut aussi s'attarder sur les carcasses de viande des entrepôts des Halles, "à vous faire devenir végétarien". Le couple de star, si glamour, Audrey Hepburn et Cary Grant, pour esquisser un premier baiser doit se plier, dans un cabaret, à un jeu stupide et grotesque consistant à faire passer une orange à son voisin sans y mettre les mains. Notons encore que tous les assassinats sont perpétrés sur des victimes en pyjama, incongruité qui frappe jusqu'à l'inspecteur de police Grandpierre (joué par le moustachu Jacques Marin, inspiration possible de Peter Sellers et Blake Edwards pour le Clouzeau de La Panthère Rose).

L'action se déroule donc à Paris. Sur ce plan-là, Donen réussit son film, dont de nombreuses séquences sont tournées sur place. Cela provoque à la fois ce sentiment de visite touristique lié à bien des productions hollywoodiennes de l'époque et un certain ancrage des personnages dans le réel. Le problème vient de ce que ces derniers y font et de ce qu'ils racontent. L'histoire est celle de la naissance d'un couple sur fond de ballet d'espions courant après 250 000 dollars. Le ton est celui de la comédie romantico-policière et les clins d'œil à Hitchcock sont légion.

Cary Grant ne cesse de mentir à Audrey Hepburn sur sa véritable identité mais l'évolution de leur relation ne laisse guère de place au doute. L'acteur, vieillissant, n'arrive pas à rattraper la jeune femme s'enfuyant. Son auto-ironie lui fait porter à l'occasion des lunettes. Il est fort dommage qu'elle le pousse jusqu'à des pitreries assez pénibles (grimaces, douche en smoking). Audrey Hepburn, elle, dit avoir peur. Il est difficile de la croire, hormis lors de l'excellente séquence où James Coburn lui jette une à une des allumettes enflammées. On ne voit pas bien ce qui pourrait lui arriver de mal tant les menaces réitérées d'attenter à sa vie ne portent pas à conséquence. Les espions sont d'opérette.

Après une intrigante mise en bouche, rebondissements et changements d'identité ne suffisent pas à masquer le vide sidéral de l'argument. Que l'on se fiche des dollars, le Mc Guffin du récit, est tout à fait normal. Que l'on se fiche des personnages, voilà qui l'est beaucoup moins. Si Donen filme avec élégance et rapidité, il filme du vent. Une œuvre-jumelle suivra, trois ans plus tard, sous le titre Arabesque. Il y a fort longtemps, je ne l'avais guère apprécié. Cela me conforte dans mon jugement sur Charade.

Commentaires

  • Ah oui... James, le petit marchand d'allumettes... je l'aurais bien réchauffé tiens !
    Tu es drôlement sévère ce soir dis-moi...
    PS. Sais-tu bien que le plus amusant dans Arabesque est la scène où Peck fuit avec la Loren supposée terrifiée... il a raconté bien plus tard qu'il avait été obligé de lui dire de courir moins vite puisque c'était LUI qui était censé la sauver... ;)

  • Bonjour Ed, le souvenir de ce film (découvert, soit dit en passant via l'exécrable copie présentée sur un des DVD de la collection du Monde, vers 2003) reste pour moi une farce bien amenée, rien n'étant jamais pris au sérieux. Du coup, tout est surjoué dans une humeur bonne enfant que j'avais trouvée agréable ; un film de vacances pour ce merveilleux réal...

  • Fred : A vrai dire, je n'ai que très peu de souvenirs d'Arabesque.
    "Sévère" ? Tu ne m'as pas encore lu à propos du dernier Ozon... :)

    Raphaël : J'ai découvert Charade sur le même support et la copie est effectivement dégueulasse. Peut-être que cela a atténué encore mon plaisir...

  • Je me souviens l'avoir vu en salle, comme "Arabesque" d'ailleurs. J'ai un bien meilleur souvenir, sans que ce soit ce que Donen ait fait de mieux. Il me semble que les couples fonctionnaient bien, Grant/Hepburn surtout, et puis il y a une belle distribution, Coburn très félin comme d'hab'. Ce ne m'étonne pas que Frédérique l'ai relevé.

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