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Le film de Brett Morgen, est vraiment "immersif", par ses qualités enveloppantes, ce qui en fait un documentaire "avec" Bowie plutôt que "sur" Bowie. Spectaculaire montage d'archives uniquement guidé par les propos du chanteur (et quelques relances de journalistes), "Moonage Daydream" donne l'impression rare d'entrer dans sa tête, de partager ses visions et intuitions, d'apprendre vraiment comment il se voyait lui-même à chaque étape de sa carrière. Ce montage est tellement vif qu'il faut tout de même un moment pour s'y habituer. Par ailleurs, il vaut mieux bien connaître les différentes étapes de cette trajectoire artistique pour se repérer car même si l'avancée est chronologique, elle est surtout "thématique", fixant des époques successives en fascinants déluges d'images et de sons, sans quasiment donner aucun titre d’album, film ou chanson. Comme on se tient loin du didactisme conventionnel, cette précieuse proximité avec l’œuvre a un prix : il faut accepter que tout ne soit pas abordé, que tel morceau ne remonte pas sur la bande son, que telle image ne soit pas insérée ("Twin Peaks" ? mais le montage de Morgen est déjà, en quelque sorte, lynchéen), que des périodes soient survolées ou réduites à un thème (celle de "Outside"/"Earthling" à celui du chaos en une seule et longue séquence construite sur "Hallo Spaceboy"). Les créations visuelles et sonores de Bowie sont de toute façon si nombreuses qu'une heure de plus n'aurait pas suffi. Les 2h15 passent très vite et derrière le parti pris s'apprécie la fidélité envers l'univers ainsi transposé/remodelé.