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  • Armageddon Time (James Gray, 2022)

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    J'ai aimé la retenue dont fait preuve James Gray (celle-là même qui m'avait empêché d'adhérer complètement à ses deux précédents - mais je crois que nous sommes nombreux à avoir en tête des films de lui "qu'on aurait voulu aimer plus", bien que ce ne soient pas les mêmes pour chacun) et j'ai aimé surtout sa façon de placer ces souvenirs à la limite du cauchemar, par le travail sur la lumière, l'ombre enveloppante, les cadrages qui isolent les personnages, les insertions oniriques, les apparitions, le dépeuplement de certains extérieurs.

  • Fast & Furious 8 (F. Gary Gray, 2017)

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    Dernier volet en date d'une série de films oscillant entre divertissement bourrin à peu près acceptable (1 et 5) et machin visuel assommant infusé à la testostérone et l'adrénaline (tous les autres numéros). Ici, on est plutôt dans le premier groupe, uniquement parce que, au milieu d'un océan de débilités, se détachent trois longues séquences assez tarées. La première rend folles une horde de voitures autonomes dans New York, en un soudain délire cartoonesque. La deuxième repose, oui, oui, sur une idée de mise en scène : la caisse de Vin Diesel est harponnée par celles de ses cinq acolytes, ce qui traduit le lien indéfectible faisant tenir leur "famille". La troisième est une course poursuite, sur et sous un lac gelé, entre des bagnoles, des chars et un sous-marin atomique, c'est-à-dire totalement n'importe quoi. 

  • Two lovers

    (James Gray / Etats-Unis / 2008)

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    twolovers.jpgA propos de Two lovers, les admirateurs de James Gray n'ont pas manqué de relever la constance des thèmes (la famille, le choix qui engage toute une vie) et de l'ambiance (nocturne, épaisse). Je me suis réjouis pour ma part de voir le cinéaste cette fois-ci s'éloigner de son genre de prédilection, à savoir le film noir, qui, s'il lui avait permis d'effectuer de fracassants débuts (Little Odessa), l'avait ensuite vu quelque peu encombré (The yards, La nuit nous appartient).

    La trame de son nouveau film n'a rien de novateur, reprenant le dilemme, vieux comme le monde, de l'homme hésitant entre la blonde et la brune, l'aventure et la tranquilité. Mais la convention s'accepte mieux ici que dans les deux polars précédents, grâce à l'approche terre à terre et quotidienne, qui ne grandit pas éxagéremment les personnages par rapport au récit. Comme son héros Leonard, qui ne peut s'empêcher de faire sonner ses quelques mensonges comme autant d'aveux (voir, en réponse, les contrechamps silencieux sur la mère ou la fiancée), Gray est un artiste foncièrement honnête, ne cherchant jamais à jouer au plus malin, assumant son sujet et son traitement sans prendre tout cela de haut.

    Tout au long de cette série de scènes attendues, il se sort du piège d'abord par son sens du tempo qui lui permet de les laisser durer exactement le temps qu'il faut, celui nécessaire à une modulation des états d'âme de chacun. L'homme a également un don pour poser un décor, faire vivre un lieu, qu'il soit intime (la chambre) ou public (la discothèque). Il excelle enfin dans l'approche physique des personnages, sans esbroufe ni effet-choc de proximité sensorielle, mais en faisant ressentir la présence des corps avec une grande sensibilité (plans magnifiques de baisers et de mains caressant les visages).

    La grâce et la finesse des deux interprètes féminines, Gwyneth Paltrow et Vinessa Shaw, permettent de balayer tous les clichés que pourraient véhiculer leurs personnages antagonistes. Joaquin Phoenix est, lui, dans la peau d'un homme étrange. Insister sur ses troubles psychologiques n'est sans doute pas la meilleure idée, à moins que James Gray n'ait pas trouvé mieux pour faire accepter ses petites gamineries et le fait que son acteur paraisse parfois un peu trop âgé pour le rôle. Phoenix est toutefois assez passionnant à voir jouer : son "travail" peut se faire visible mais c'est probablement le prix à payer pour atteindre l'émotion des ultimes séquences.

    Dans Two lovers, tout est affaire d'équilibre. Lors d'une scène d'amour, on remarque tout juste que les stores de la chambre ne sont pas baissés, Gray ne nous imposant aucun plan insistant sur la fenêtre, alors que le détail est primordial (non pas dramatiquement, puisqu'il ne provoque rien, mais psychologiquement). De même, le film en appelle bien d'autres mais on parlera de réminiscences et non d'hommages. Bien que (ou en raison du fait que) l'action se déroule à New York, ces réminiscences sont d'ailleurs essentiellement européennes, et particulièrement italiennes.

    Pas aussi bouleversant que l'on pourrait le souhaiter, Two lovers est toutefois un beau film triste, qui semble de bon augure pour la suite du parcours de son auteur et qui vieillira, je pense, assez bien. C'est déjà pas mal en cette année cinéma 2008 qui n'aura pas été extraordinaire (à une exception près...).

  • La nuit nous appartient

    (James Gray / Etats-Unis / 2007)

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    095b15a3affa8a4fbcccb20a796cd328.jpgLe troisième long métrage de James Gray, La nuit nous appartient (We own the night), est de nouveau un film noir tournant autour d'une affaire de famille. Dans les années 80, Bobby Green, frère et fils de haut-gradés dans la police new yorkaise, gravit les échelons du monde de la nuit, devenant gérant de night club grâce à ses connaissances dans le milieu. Les dealers et la police se livrant une guerre sanglante et lui-même ayant caché à ses patrons et clients ses liens de parenté, il est obligé de choisir son camp lorsque les membres de sa famille sont menacés de mort par des mafieux russes.

    L'histoire est très classique et on ne sera guère surpris par les péripéties du polar ni par les évolutions psychologiques des personnages. Le grand Robert Duvall, dans le rôle du père, est égal à lui-même et excelle à faire passer cet amour filial, sentiment d'abord retenu et contrarié devant ce fils mal-aimé qui a, selon lui, choisi la mauvaise route, puis enfin affirmé, quand le même aura pris place à ses côtés afin de venger le frère modèle. Ce cheminement, cet échange, sont redoublés un peu inutilement par le trajet inverse effectué par les deux frères dans la dernière partie du film.

    James Gray sait filmer la nuit, les corps de ses acteurs et s'offre deux extraordinaires séquences d'anthologie : une poursuite en voiture sous une pluie battante, visuellement éblouissante, et une "montée" aux enfers de Bobby, dans le laboratoire où se trafique la drogue, scène d'une grande tension où Joaquin Phoenix, au bord de l'évanouissement, est à son meilleur. Tout le film n'a pas cette force et le dénouement est assez convenu, basé sur une fausse bonne idée de décor naturel. Toutes ces images d'hommes bien droits dans leurs uniformes, cette volonté de vengeance constamment assénée qui débouche sur un duel puis un abandon de telle façon que la morale s'en tire à bon compte et l'épilogue aussi sobre que parfaitement hollywoodien, tout cela laisse au final un drôle de goût. L'approfondissement des thèmes, la maîtrise technique et le classicisme de la mise en scène sont là, mais j'avoue qu'après son Little Odessa si impressionnant, j'attendais plus pour James Gray que cette place qu'il prend avec les deux films qui ont suivis (The yards et celui-ci), celle de petit disciple de Clint Eastwood.