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Potiche

(François Ozon / France / 2010)

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potiche.jpgPotiche est à peine moins mauvais que sa bande annonce ne le laisse penser. Post-moderne en diable, le dernier film de François Ozon apparaît sans enjeu ni point de vue. Quel intérêt à filmer aujourd'hui une vieille pièce de théâtre de boulevard si c'est pour se contenter d'imiter de manière nostalgico-fétichiste le style cinématographique des années 70 ? Au bout d'une heure trois quarts de projection, nous ne trouvons toujours pas la réponse à la question.

Au moment où Blake Edwards nous quitte, nous peinons décidément à voir en François Ozon, malgré ses déclarations d'intention et ses efforts, un auteur comique, la capacité de Potiche à déclencher le rire étant à peu près nulle. Tout juste ai-je personnellement décroché deux ou trois sourires, suite à un bon mot ou à une réaction amusante, ce qui, au bout du compte, est déjà ça de pris tant le début du film est calamiteux (là où l'on voit les acteurs forcer la note, histoire de se mettre immédiatement au niveau (?) du matériau de départ). Mais le manque d'invention de la mise en scène, l'absence d'emballement du récit et de géniale trouvaille de comédien(ne) sautent aux yeux. Les petits décalages créés par l'emploi anachronique de certaines répliques "sarkozystes" n'arrangent rien. Je suis certain que les blagues autour des "Casse-toi pov' con !" et autres "Travailler plus pour gagner plus" font aujourd'hui, en privé, hurler de rire notre Président lui-même et ses laquais. Replacer ces mots dans le contexte de Potiche serait subvertif ? Allons donc...

La dimension politique du film d'Ozon est d'ailleurs désarmante, pour ne pas dire affligeante. La caricature fait peine à voir, au point que certaines "comédies de gauche" signées Coline Serreau ou Gérard Jugnot paraissent, à côté, des chefs d'œuvres de finesse. Gardant sa position de retrait, Ozon se garde bien de faire le moindre choix. Il s'agit pour lui de critiquer un peu tout le monde pour ne froisser personne (les gens de gauche ont du cœur mais sont un peu cons, les gens de droite peuvent être odieux mais, paradoxalement, c'est le ridicule qui les sauve). Bien évidemment, Catherine Deneuve triomphe aux élections législatives en se présentant "sans étiquette".

Il y a tout de même, au cœur de ce marasme, quelque chose qui fait que Potiche vaut mieux qu'une émission d'Arthur, quelque chose qui résiste à la mécanique boulevardière et à la dissolution du politique : la présence de Gérard Depardieu, son corps, sa diction, son regard. A l'écran, il parvient même à élever ses partenaires, à les arracher, le temps de leurs scènes en commun, à l'artificialité ambiante (Jérémie Renier et, bien sûr, Catherine Deneuve, sans qu'il soit pour autant nécessaire de nous sommer de nous émouvoir outre mesure de leurs retrouvailles, celles-ci ayant de toute façon lieu tous les cinq ans à peu près). Grâce à Depardieu, quelque chose, dans cette lisse Potiche, accroche.

Commentaires

  • Si tu as lu ma note sur le film, tu devineras aisément que je suis parfaitement d'accord avec toi sur les trois premiers paragraphes. Sur le dernier, j'admets que Depardieu n'est pas mauvais mais il ne m'a rien accroché du tout trop enragé que j'étais.

  • Nolan, je t'avais bien sûr lu et je comptais bien y revenir...
    Le jeu de Depardieu m'a soulagé du reste. On dirait qu'il reste en deça, qu'il renacle presque, par rapport aux autres... (parmi eux, J. Renier et K. Viard sont tout de même assez corrects)

  • Bonjour Ed, je n'ai jamais trouvé qu'Ozon était un réalisateur comique. Mais j'avais été tellement fâchée par 8 femmes, que j'ai trouvé ce film nettement supérieur. En revanche, rien de vaut La Maillan. La pièce en DVD est irrésistible. Bonne après-midi.

  • Mon point de vue sur le film est l'inverse du tien : tout m'a plu, sauf Depardieu, qui se la pète de plus en plus. C'est amusant parce que l'intérêt que je trouve au film est dans ce que tu dénonces : il est post moderne parce que sans point de vue. Et de politique il n'est évidemment pas question, d'ailleurs on s'en fout.
    Par contre exhiber une Deneuve nymphomane et ingénue, ça c'est classe. Il y a du Demy chez Ozon quand il réussit cela.

  • Dasola : Comique, il cherche en tout cas à l'être ici... J'avais, moi aussi, été fâché par 8 femmes, comme par Angel et Le refuge. En fait, je n'aime vraiment que Sous le sable, Swimming pool et 5x2 (mais je n'ai pas vu ses 2 premiers, ni Le temps qui reste).

    Chris : Oui, c'est étrange cette inversion totale (ça arrive)...
    Je ne vois pas du tout Depardieu se la péter ici, c'est même, à mon avis, celui qui "en fait le moins" (ce qui m'a soulagé dans ce concours de cabotinage).
    Quant au côté post moderne, personnellement, il m'épuise. Cette façon de ricaner, de peindre quelque chose de médiocre en faisant bien comprendre que l'on est au-dessus de ça... Si au moins c'était drôle...
    A propos de la politique, je ne suis pas d'accord. Il est évident qu'Ozon cherche à faire entrer son film en résonance avec notre contemporain, ne serait-ce que par les clins d'oeil sarkozystes (et royalistes, avec la dernière partie). Si cet aspect était négligeable, pour lui comme pour nous, il n'aurait pas insisté sur les menaces de délocalisations etc...
    Et, pour finir, Catherine Deneuve, son image, elle ne cesse de la tordre à intervalles réguliers, et cela depuis, pourrait-on dire,... Répulsion ou Belle de jour...

  • Bonsoir Edouard,
    je suis presque totalement d'accord (la mollesse de l'ensemble, l'absence totale d'audace dans le point de vue ou le regard sur la politique, l'humour tombant à plat) sauf pour ce que tu dis sur Depardieu. Je trouve qu'il s'enlise tout autant que les autres acteurs dans ses scènes, et, au contraire, qu'il est l'un des pires dans le casting, traînant une forme de mollesse et récitant ses répliques sans grande conviction...

  • C'est un peu loin aujourd'hui (et je ne tiens guère à m'en rappeler :)) mais oui, seule l'observation de Depardieu m'avait permis de supporter le film.

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