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Drive, c'est l'histoire d'un chevalier blanc qui ne peut empêcher sa tunique immaculée d'être souillée de noir et de rouge. Le driver (puisqu'il n'est toujours nommé qu'à travers sa fonction) est un as du volant, un cascadeur-garagiste vendant ses services de nuit aux braqueurs de Los Angeles. Dans ce cadre, il se charge de la fuite après le casse, et ne veut pas savoir qui en a la responsabilité ni ce qu'il se passe en dehors de sa voiture garée près de l'endroit attaqué, prête à démarrer en trombe. Ne pas être impliqué plus avant, telle est sa règle d'or. Mais voilà qu'il prend soudain parti en posant une question (Qui étaient ces types ?) et cela pour une bonne raison : la protection d'une femme et de son enfant. Fatalement, la machinerie infernale est lancée à cet instant.
En faisant preuve de bienveillance et de fidélité, le driver provoque un nouveau cycle de violence à la force décuplée. Ce n'est pas le seul paradoxe à l'œuvre dans ce film époustouflant. Il en contient beaucoup d'autres. Une scène partout citée (à juste titre) montre très clairement que c'est juste après s'être approché au plus près de la fille aimée que le driver réalise les gestes qui, certes, les sauvent elle et lui, mais surtout l'éloignent, choquée, stupéfaite. Le visage du héros est ensanglanté, son blouson blanc l'est tout autant.
Dans ce monde-là, protéger c'est s'effacer, disparaître à la place. Après tout, le driver était destiné à cela. Dans l'organisation des casses, il est celui qui assure la fuite, n'intervient que ce temps-là et n'est plus joignable après le coup (il précise également que si les braqueurs tardent trop, il s'évapore au bout de cinq minutes). De même, au cinéma, le cascadeur est bien celui qui n'apparaît jamais à l'écran avec son propre visage. La mise en scène de Nicolas Winding Refn se charge de rendre sensible ce retrait. La tuerie au motel se clôt sur un ralenti accompagnant l'effacement progressif du visage du driver derrière une cloison et, logiquement, son grand coup d'éclat, celui-ci l'effectuera en portant un masque. L'homme disparaît peu à peu, ne laissant qu'une ombre sur le bitume, une enveloppe, celle d'un fantôme à la fois présent et absent. A la fin, la voiture redémarre mais la porte de l'appartement reste fermée.
Le laconisme du driver le plaçait dès le début "ailleurs". C'est un choix de mise en scène (qui avait déjà été fait par le cinéaste pour Valhalla rising). Certes, le silence, ou du moins la rareté de la parole, est un trait de caractère du personnage. Mais, comme dans la vie, ce silence se propage aux interlocuteurs (Irene et son fils), peut gêner et provoquer involontairement le malaise (le peu d'empressement à répondre à une question posée par le mari fait naître un doute). Ce silence n'est pas celui du justicier des années 70 qui en imposait à tout le monde. C'est plutôt une nécessité qu'a bien intégré le héros, dans cette jungle du crime qu'il connaît pour la fréquenter chaque jour. Dire que l'on a un "plan", aller dans l'échange au-delà de "je peux te proposer un coup", c'est déjà enclencher un mécanisme dans lequel le driver ne veut pas mettre le doigt. Bien évidemment, l'un des engrenages les plus déterminants est actionné par l'émission d'une parole de trop qui vaut trahison.
Ainsi justifiée, la réserve dans l'expression verbale, comme la suspension du temps, échappe à la pose. Mais il existe une autre raison à l'évitement de cet écueil : la vie ne fuit jamais ces moments arrêtés. Lors de la première soirée qu'ils passent ensemble, le héros et sa future protégée sont montrés face à face, ne disant rien, et avec ce plan étiré, nous écoutons le silence qui s'installe mais en même temps nous voyons comme Irene, troublée, respire fort. Plus tard, dans le peep show, une spectaculaire contre-plongée fige le driver debout, tenant en joue l'homme qu'il recherchait, à terre. Là aussi le plan est long et il s'arrache encore au maniérisme par le choix de faire apparaître soudain le héros en sueur, une sueur qui traduit son extrême tension et qui renvoie à sa tenue, opposée à la nudité des filles qui l'entourent.
Le cinéma de Nicolas Winding Refn est un cinéma de la sensation, mais non gratuite ou déconnectée. Ici : sensation de la lumière, des matières, de la musique (une électro-pop donnant un cachet 80's et évitant l'usage d'un rock'n'roll trop attendu). Sensation, surtout, de la vitesse. Drive n'est qu'accélérations et décélérations, jeux rythmiques génialement transposés au-delà des seules scènes de poursuites, déjà particulièrement brillantes. Celle qui ouvre le film, par les mutliples variations qu'elle peut offrir dans ce domaine, donne le la. Par la suite, la violence arrive par vagues imprévisibles et se retirant aussitôt. Une virée en voiture dans la canal asséché se termine en pause au bord de l'eau. Au supermarché, le driver avance dans les allées et les étalages défilent de chaque côté avant que le mouvement soit stoppé net par la vision d'Irene.
Enthousiasmant par ses propositions plastiques et rythmiques, Drive touche juste aussi dans le traitement des personnages. Le sentiment amoureux est là, et bien d'autres encore. On apprécie le frisson qui passe lorsque le petit garçon se retrouve avec une balle de flingue dans la main, on aime le changement d'éclairage sur le mari provoqué par le flash back, non présenté comme tel et inséré au milieu de la séquence du repas à quatre...
Ainsi, l'éloge de Drive peut aussi bien se faire en l'abordant comme un objet homogène et compact qu'en détaillant chacune de ses fulgurances et de ses beautés plus discrètes. Il est à placer au rayon Grands films noirs entre Le point de non retour de Boorman et En quatrième vitesse d'Aldrich, tout près de Reservoir dogs, rien que cela. Plaisir cinématographique de l'année, direct.
Nicolas Winding Refn sur Nightswimming : Pusher, Pusher II, Pusher III, Bronson, Valhalla rising.
DRIVE
de Nicolas Winding Refn
(Etats-Unis / 100 min / 2011)
Commentaires
Très belle critique, l'une des meilleures que j'ai lues sur ce film.
Le Prix de la mise en scène à Cannes était grandement mérité!
J'en suis, j'adhère, je contresigne (c'est toujours ça qui m'coûtera moins !).
Dans mes bras, l'Ed !
"Là aussi le plan est long et il s'arrache encore au maniérisme par le choix de faire apparaître soudain le héros en sueur, une sueur qui traduit son extrême tension et qui renvoie à sa tenue, opposée à la nudité des filles qui l'entourent."
je ne suis pas sûr de comprendre ce passage, peux-tu me l'expliquer?
excellente critique sinon^^
Merci Ben.
Mariaque : vu comment a été reçu le film sur la plupart des blogs, nous allons être nombreux dans vos bras, cher ami.
je ne comprends pas pourquoi la sueur renvoie à sa tenue, en fait^^ et pourquoi le fait de faire apparaître son héros en sueur fait que le cinéaste évite le maniérisme.
Rob : Je souhaitais expliquer comment, à mon avis, le cinéaste échappe à la pose, à l'affectation, même dans ce type de plans suspendus et très composés en y intégrant de la vie, du naturel. Ici c'est la révélation du visage en sueur du driver qui rend le plan aussi fort. Cette transpiration traduit sa tension, sa nervosité, et se justifie aussi par le fait qu'il ait sur les épaules son fameux blouson alors qu'autour de lui, les filles sont à moitié nues, dans une pièce où, manifestement, la chaleur monte... (de plus, cette opposition valide à posteriori les images précédentes de ces filles dénudées qui, sinon, pourraient paraître gratuites (bien que fort agréables))
merci Edouard, excellente critique. Je vais revoir la mienne, sans doute trop sévère, à partir de la clé que tu donnes "Dans ce monde-là, protéger c'est s'effacer, disparaître à la place".
J'aurais bien aimé être le petit scorpion solitaire au milieu des éloges unanimes du panoptique. Cela m'aurait évité de réécrire mais je ne m'obstinerai pas dans l'erreur face au meilleur de la blogosphère. Merci à vous.
Merci pour ton explication Edouard, c'est plus clair pour moi et je comprends à présent beaucoup mieux ce que tu voulais dire. D'ailleurs, je te rejoins totalement. Cette scène-là fait partie des fulgurances dont tu parles, m'est avis. ^^
Jean-Luc : Mais cela fait du bien aussi de se sentir parfois le petit scorpion solitaire... Moi, je le serai probablement quand je parlerai de L'exercice de l'Etat. De toute façon, nous ne sommes pas là pour définir une ligne rédactionnelle comme dans une revue. :)
Cela dit, cette volonté d'adoucissement t'honore et je suis heureux qu'elle concerne ce film-là. :)
Rob : Je t'en prie. Cela m'a permis de préciser une pensée sans doute trop vaguement traduite dans ma note.
Un chef d'oeuvre!
Je vois que tu as succombé au charme pop du chevalier impassible dans son bolide.
Tu parles du supermarché et le travelling opéré sur l'acteur m'a fait penser à la façon dont Refn filme les déplacements de voiture. Entre deux rayons, l'acteur fait même quelque chose qui ressemble à une marche arrière ou une manœuvre de voiture. D'une fluidité presque étrange.
Sinon, belle description de ces changements de vitesse dans le film.
Oui Benjamin, c'est tout à fait ça. Dans cette scène, c'est la même sensation qui se prolonge et c'est assez stupéfiant d'être arrivé à faire ça, dans cet environnement-là.
Je serai donc le petit scorpion solitaire sur Drive :D
Bientôt...
Il en faut toujours au moins un. J'attends ça...
Edouard, comment considères-tu Nicolas Winding Refn? Comme un cinéaste important du paysage actuel?
Ha Ha Ha...
sérieusement...
Ah,sérieusement ? (pardon mais avec l'illustration seagalienne qui l'accompagne, j'avais pensé me trouver devant un commentaire tout à fait ironique...)
Je le considère donc comme un cinéaste important, oui, mais très à part. A la fois Danois, Anglais, Américain... Abordant des genres hollywoodiens avec une sensibilité (une narration) européenne...
La façon dont il s'est ramassé aux Etats-Unis entre les deux premiers Pusher lui a bien servi de leçon (voir comment il a conduit le projet Drive avec l'appui Ryan Gosling).
Surtout, il me semble que c'est sans doute le cinéaste "postmoderne" le plus intéressant dans le sens où le fait qu'il se soit nourri de tant de films n'entrave pas les siens. J'admire son talent dans l'assimilation de toutes les références qui l'accompagne (et il ne cherche ni à les masquer, ni à en user au second degré). Kubrick dans Bronson, Tarkovski dans Valhalla rising, les polars 70s/80s dans Drive, c'est évident et en même temps cela fait des films très personnels et très homogènes. Et selon moi, s'en est arrivé au point même que Drive peut être vu et apprécié sans passé par cette approche référentielle.
Et puis assister à la progression d'une œuvre par paliers, comme cela, c'est passionnant.
Bien qu'étant d'accord avec la plupart de tes idées et voulant saluer la qualité de ton analyse, j'ai été un peu enthousiasmé. Sans doute parce qu'il m'apparaît que le film est moins complètement homogène que tu ne le dis. Justement, il me semble qu'interfèrent quelques scène "gratuites" (pas celle avec les filles dont tu expliques bien pourquoi elle ne l'est pas mais d'autres dans la seconde moitié) et que le réalisateur perd un peu confiance en son spectateur (ou en son héros).
Une remarque : tu écris que le driver est défini par sa fonction. Je dirais plutôt activité car il ne me semble nullement réifié quand il conduit (au contraire même). Le film me paraît fonctionner sur le principe d'une énergie (celle de l'oeuvre elle-même et celle contenue par le héros) qu'il faut brûler, d'abord par la conduite, ensuite, quand la situation a changé, par la violence. Pour moi, cela explique aussi les changements de rythme.
Des scènes gratuites ? J'en vois peut-être une, à la rigueur, celle au restaurant entre les deux boss et le second couteau (Chris je crois), qui va avoir beaucoup de mal à finir son repas. Oui, elle dénote un peu.
Tu as raison pour l'énergie qui doit brûler à intervalles réguliers et qui est donc à l'origine de ces variations rythmiques.
Celle-ci en particulier et, en fait, pour moi, toutes celles où le driver est absent (compte non tenu de l'alternance appartement d'Irene/couloir lors de la fête de retour du mari puisque, par le son, le driver a "accès" à ce qui s'y passe).
Très intéressantes remarques, Antoine. :)
Merci bcp pour ta réponse Edouard, à laquelle je n'avais pas pensé à répondre. Je rejoins totalement ton avis sur Refn.
J'aurais donc cessé d'être résolument minoritaire sur ce film ou je me suis retrouvé, à ma grande surprise, parmi les moins enthousiastes des critiques de Panoptique - alors que j'ai pourtant bien aimé.
Je ne ferai pas partie de la cohorte de ceux qui ont succombé au succès de Drive, film intéressant qui a sa petite musique, son rythme et qui bénéficie d'une belle mise en scène mais qui ne m'a pas touché plus que ça.
Quand tu le compares à Aldrich et au meilleur du film noir, là je trouve que tu te laisses gagner par ton enthousiasme. Il n'y a rien d'iconoclaste dans Drive, qui est une variation sur le thème du héros solitaire et mystérieux (Eastwood ?), une variation réussie (je ne le conteste pas) mais qui n'est pas du niveau de subversion des films noirs, ni du niveau d'un chef-d'oeuvre (quoiqu'il risque de fort bien vieillir avec le temps).
Drive n'est sans doute pas un film "époustouflant" car les intentions du réalisateur y sont trop évidentes, la lenteur, la musique, la mise en scène, tout est trop calculé, trop en prise avec son époque, avec l'air du temps, pour que ce soit foncièrement honnête. Personnellement, j'ai aimé. C'est déjà beaucoup.
Lu sur le cinéclub de Caen : "le film, malgré ses promesses, se dilue rapidement dans l'exercice de style". C'est bien dit, et c'est aussi ce qui constitue, à mon sens les limites de ce film (sans compter quelques scènes de violence un peu... gratuites - le crâne défoncé du tueur dans l'ascenseur... perso je n'ai pas vu l'intérêt de bien nous montrer comment le crâne s'enfonce sous la pression du talon de la botte).
Si je me laisse gagner par mon enthousiasme, Julien, je n'en constate pas moins que :
- Drive a reçu à Cannes un prix important
- qu'il a eu un beau succès en salles
- que même ses rares détracteurs lui reconnaissent une certaine force plastique et rythmique
- que ceux qui n'aimaient pas Valhallah rising ont cette fois été conquis (n'est ce pas Anna et Mariaque ?)
- que ceux qui ne connaissaient pas le cinéaste ont, au-delà de quelques réserves, plutôt aimé et sont devenus curieux des films précédents (Dr Orlof ?)
- que ceux qui connaissaient et appréciaient ces derniers ont vu là au moins la confirmation d'un talent, ou, comme moi, un aboutissement
- que la majorité des spectateurs le salue comme l'un des meilleurs films noir de ces dernières années (et j'ajoute, personnellement, LE meilleur depuis au moins 10 ans)
- que Drive aura été cette année, avec The tree of life, le film le mieux "noté" par l'ensemble de mes camarades blogueurs du Panoptique, sans parler de l'accueil critique proprement dit...
Alors je sais bien qu'il est difficile, quand on parle de cinéma contemporain, de sortir l'expression "chef d'œuvre", mais si on peut le faire une ou deux fois par an, je ne vois pas bien ce qu'il manquerait à la liste ci-dessus et qui nous en empêcherait ici...
(cela dit, tu as parfaitement le droit de faire la fine bouche, moi-même, je n'ai pas été transporté par cet autre "chef d'œuvre" qu'est le film de Malick)
1. Dancer in the Dark a reçu la palme d'or en 2000 (ce n'est qu'un exemple parmi d'autres) ;
2. Intouchables a connu un meilleur succès en salles ;
3. je ne peux pas juger, n'ayant pas vu d'autres films ;
4. même chose qu'Orlof : je trouve le film plutôt pas mal, j'émets quelques réserves et je ne m'empêche pas d'aller voir la filmo de HWR ;
5. qu'il a du talent, j'en suis certain (cf. Steve Mc Queen dans Shame : du talent mais qui, parfois peut tourner à vide ou verser dans la fioriture, l'exercice de style) ;
6. on ne peut pas parler de film noir, ce terme est impropre, il est daté dans le temps et même limité géographiquement (néo-noir, ok). A ce petit jeu-là, je prefère LA confidential (mais les deux films ne sont pas comparables) ou, mieux, Chinatown (encore pas comparable, sinon par le genre) ;
7. Pour moi, cette année, les deux films qui, incontestablement, se détachent du lot sont : Winter's Bone et La dernière Piste, avec aussi (pas loin derrière) La solitude des nombres premiers. Pourtant, je ne crois pas qu'un seul de ces films soit un chef-d'oeuvre ;
8. Oui, tu as raison : je fais la fine bouche. Drive est un film qui surfe beaucoup trop sur l'air du temps, pour moi, je le trouve agréable, sympa, bien mis en scène, mais sans plus. Par contre, La dernière piste ou Winter's Bone, sans concession à la mode, me semblent clairement boxer dans la catégorie supérieure ;
9. Le cinéma, cet art subjectif... ;-)
Hé Hé... vu comme ça, effectivement... :)
Chacun de ces points, pris séparément, ne garantit pas la grandeur du film. Mais regroupés ainsi, il me semble qu'ils constituent un faisceau suffisamment dense pour que l'on parle au moins d'un "film important" d'aujourd'hui.
Chef d'œuvre, je ne sais pas. On pourrait passer des heures à essayer de définir ce que c'est, et même à discuter pour savoir s'il faut absolument aimer à chaque coup les chefs d'œuvre établis du cinéma...
Mes étoiles, ce n'est pas : ****=chef d'œuvre et 0=navet. Ce n'est qu'un degré, de plaisir ou d'intérêt cinématographique.
Il vaut mieux, sans doute, que j'essaie de répondre plus directement à tes objections. Je ne comprends pas trop cette critique de la concession à la mode, à l'air du temps... Ce n'est pas parce que Drive se passe en ville et au présent qu'il fait plus de compromis que Winter's bone et La dernière piste. Franchement, je vois un film plus fidèle à son auteur, à ses préoccupations et à son style, qu'à une quelconque mode. Je ne pense pas que dans le film d'action ou le néo-polar contemporain, l'heure soit à une certaine lenteur ou du moins à ce type de changements de rythme. De plus, l'aspect référentiel du cinéma de Refn et les légers décalages (vestimentaires, musicaux) qu'il introduit renvoient plutôt Drive dans une autre époque (70's/80's) que la nôtre. Enfin, au niveau des "intentions du cinéaste", Winter's bone me paraît au contraire plus "signifiant" que Drive, où tout est entraîné dans le même flot, de manière très fluide.
Ryan Gosling, par exemple : c'est sûr HWR n'a pas cherché à plaire avec cet acteur à la sale gueule, qui joue comme un pied et qu'on ne voit pas trop à l'affiche en ce moment ;-)
La musique, omiprésente, n'est pas du tout un élément de la popculture (électropop culture, si tu préfères), les éclairs de brusque violence (depuis Tarantino) ne sont pas du tout du goût des spectateurs, les échappées en voiture, LA by night, la petite histoire d'amour toute en retenue, etc.
Je ne veux pas m'étaler car, tu l'as compris, j'ai bien aimé ce film. Si je poursuis, on va avoir l'impression que je le descends. Il est juste un peu trop stylé, hype, pour me plaire complètement.
Quant à Winter's Bone : je ne vois aucun élément de séduction, ça se passe dans une zone pauvre, crasseuse, les personnages sont affreux, sales et méchants, la musique n'est pas tapageuse. De plus, il lorgne très clairement du côté du Deliverance de Boorman. J'en ai discuté avec son auteur, à une époque, il a voulu faire un film atemporel, non daté. Donc, bon, de mon point de vue, le fossé est grand entre les deux oeuvres quand on se place du point de vue de "l'air du temps".
Quant à la Dernière Piste, faire un western où il n'y a pas d'action et où les figures féminines ont les premiers rôles, avec un indien mutique qui ne parvient jamais (et ne recherche pas) à établir de communication, c'est a minima prendre 10x fois plus de risques que Drive.
Enfin, tu penses que la mode n'est pas à une certaine lenteur et retenue, je ne parle pas non plus de films grands publics. Et ne me dis pas que tu n'as pas vu les clins d'oeil à In the mood for love de WKW, je ne te croirai pas. :-)
Le problème c'est que la mode, on peut la voir partout... On peut dire par exemple que Kelly Reichardt s'approprie la démarche de Gus Van Sant, cette errance, cette absence de communication, cette suspension du sens, ces plans "vides"...
De même qu'est-ce qui est risqué ou pas ? Le film de Debra Granik, c'est l'histoire initiatique classique d'une jeune fille dans un monde hostile, chargée de protéger son petit frère et sa petite soeur (et qui, à la fin, y parvient, à notre grand soulagement).
Enfin, je ne me souviens pas avoir pensé à Wong Kar-wai devant Drive (on n'est pas chez Xavier Dolan quand même). C'est encore un autre problème : aucun cinéaste ne peut dorénavant faire un ralenti accompagné de musique sans qu'on le soupçonne d'imiter WKW... :)
WKW : l'histoire d'amour le long de couloirs faiblement éclairés... ça ne te rappelle vraiment rien ? Bon, tant pis (je crois que le critique du Monde a vu la même chose que moi, mais bon).
Pour ce qui est de la mode, je préfère parler de l'air du temps. Tu veux un baromètre de cet air là ? Place un adolescent devant chacun des trois films. Demande-lui ce qu'il a le plus aimé (oui, je sais, c'est déloyal) :-)
Ah, ne convoquons pas les autorités critiques ici, hein... Sinon, je te sors du Michel Ciment, moi... :D
Tu as vu la moyenne d'âge du public des films que nous allons voir dans les salles d'art et essai ? Bon, alors s'il se coupe du public adolescent, le cinéma va finir par crever avec ses vieux spectateurs (comme nous)... :)
Quand j'ai vu le film à Cannes, j’imaginais qu'il susciterait des réactions comme celle de Julien et à vrai dire, j'ai été assez surpris du large consensus autour du film, même s'il n'est pas du goût de tout le monde.
Ceci posé, je ne suis pas d'accord avec ce qu'en dit Julien, à commencer (mais nous en avions déjà parlé) par une définition du film noir bien trop réductrice. "Drive" est bien plus près du film d'Aldrich que celui-ci de "Assurance sur la mort" (au hasard). A l'époque, Aldrich, à qui l'on a très souvent reproché une violence complaisante, revisitait les conventions du genre, développait un style plus moderne et repoussait les limites de la représentation au maximum de ce qui était permis. Il n'y a qu'à voir ce qu'il a pu faire avec "Fureur apache" quand il a eu les mains plus libres dans les années 70.
Aujourd'hui, la réussite de Refn se situe également au niveau du style et, vu le point où nous en sommes avec la violence, dans sa façon de traiter les temps morts et son histoire d'amour au premier degré à la façon d'un conte (un peu barré, certes). Le plan dont tu parles, Julien, dans l'ascenseur, et que l'on peut revoir sur Youtube, est très bref et beaucoup moins graphique que ce que tu laisses entendre, il est violent parce que nous l'imaginons plus que nous ne le voyons et aussi parce que le regard sur cette violence est transféré sur le personnage féminin. Je n'y vois aucune complaisance, bien au contraire. Rien à voir avec la tête défoncée à l’extincteur dans "Irréversible". Il y a une part de fantasme sur la violence de ce film (J'ai lu par exemple que le driver tuait à coups de marteau alors qu'il ne casse que quelques doigts), comme certains oublient que la caméra regarde au plafond quand Mr Blonde coupe d'oreille dans "Réservoir dogs" et "voient" la scène.
Pour ce qui est des références, comme Édouard, je n'y ai jamais pensé tout au long du film et c'est une chose que j'apprécie. Elles peuvent y être, mais jamais elles ne sont mises en avant comme le fait Tarantino (ce qui n'est pas une critique). Pour moi, c'est un film qui, comme les premiers Sergio Leone rebat les cartes et, en décalant un peu certaines choses, sur des bases très classiques, propose du neuf. Je peux me tromper mais des films comme celui-ci, j'en ai pas vu dix en vingt ans et je prends le pari que ce sera un classique du genre dans dix ans.
Le film noir est un genre suffisamment analysé pour que je ne m'etale pas trop dessus, je vous renvoie au Patrick Brion ou au François Guérif. Ce n'est pas pour rien si, à partir des années 70 on parle de "néo-noir".
Ceci dit, j'ai revu la scène, on voit bien le crâne defoncé par le talon des pompes du héros, je n'invente rien.
Enfin, je le redis, c'est un bon film de 2011 qui pour moi ne fait pas le poids face à Winter's Bone et, plus encore, La dernière piste. Je suis prêt à le revoir dans 10 ans, quand il n'aura plus cette patine "pop" qui m'a laissé les réserves évoquées plus haut. En parlant de référence, je ne peux m'empêcher de le rapprocher, dans sa forme, de Ghost Dog qui, lui aussi, m'avait paru un bel exercice de style mais manquant un peu de consistance.
Enfin, je suis ravi de lire cette homogénéité d'analyse et de ne pas la partager. Les classiques rencontrent rarement une telle adhésion d'emblée. Nous verrons ce que le temps fera de cette œuvre.
Les champs d'étude de Brion comme de Guérif sont bien plus large que la quinzaine d'années admise par les puristes qui ont d'ailleurs bien du mal à se mettre d'accord sur la place à donner aux chef d’œuvres en couleurs de Dwann ou Ray. Guérif parle de "renouveau" pour les années 70 puis de "sang neuf" pour les années 90. Je veux bien parler de "renouveau du sang neuf" pour Refn :)
Le fameux plan, je n'ai pas écris qu'il n'existait pas, mais qu'il était bien court et pas aussi graphique (C'est pas du Fulci !) que ce que certaines réactions laissent entendre. Ceci dit, il n'y aurait pas été que cela ne m'aurait pas gêné.
Sinon, j'ai beaucoup aimé "La dernière piste" aussi et je trouve très juste la comparaison avec "Gost dog" dont le jeu de références est peut être plus marqué.
Je ne vois pas bien en quoi cela représenterait un défaut pour un film (Drive ou un autre) d'être à la mode. On ne peut pas se désoler dans le même mouvement que des catastrophes du style Intouchables rencontrent des succès si considérables et vouloir que les bons films - ou les chefs-d’œuvre - fassent en sorte de rencontrer le public. Cela ne les empêche pas, pour certains, de durer. "Cinéma commercial" pour disqualifier, même partiellement, un film, cela relève pour moi du non-sens (d'ailleurs Hitchcock et Ford, c'était commercial, non ?).
Par contre, je suis assez partisan de la définition restrictive du film noir et ne pense pas que, par ses références, Drive en fasse partie.
Sinon, je n'ai pas du tout pensé à Wong Kar Wai en voyant Drive (on n'est pas chez Dolan, c'est sûr) et trouve que Ghost Dog, douze ans après sa sortie, a complètement résisté au temps.
Quant à savoir si Drive deviendra un classique, c'est pour moi toute la question. Je ne me prononce pas.
Alors puisqu'il faut prendre position... Je penche pour un usage large du terme "film noir", dépassant le cadre strictement "historique". Sinon, pour Drive par exemple, on est plutôt embêté : polar ? film criminel ? Film noir renvoie plus à une ambiance, qui peut éventuellement recouper les dénominations précédentes, mais pas toujours...
Quant à "l'air du temps", il me semble que Wong Kar-wai, à l'époque de In the mood for love, l'a humé lui aussi. C'est l'une des raisons de son succès.
Pour Brion, le film noir est clairement daté : de 1939 à 1958. Ceci dit, il fait entrer Traquenard de Nicholas Ray qui est limite et, surtout, il fait commencer son mouvement à Rebecca, qui n'a rien d'un film noir. Son analyse peut être soumise à caution. Mais, je cite : "le film noir c'est donc avant tout une période, celle de la fin des années 30, des années 40 et 50, une période qui verra successivement la pré-guerre, la 2de guerre mondiale, le retour au pays des combattants, la guerre de Corée et la guerre froide avec l'URSS, l'allié d'hier devenu l'ennemi d'aujourd'hui."
Pour Guérif, la chronologie n'est pas si ferme, puisqu'il poursuit son étude bien au-delà des années 60. Par contre, il parle bien de renouveau et d'évolution à partir de la fin des années 1950.
Qu'une analyse par genre soit imparfaite, c'est vrai pour n'importe quel genre. Mais qu'on me parle de film noir pour un film de 2011, je suis désolé, ça ne colle pas. Le néo-noir s'inspire des thèmes du film noir et procède à une sorte d'actualisation : l'époque n'est pas et ne peut plus être la même.
Après, si tu veux me faire dire que je suis un ayatollah du noir, je l'avoue bien volontiers :)
"L'ayatollah aimait le noir" ça ferait un bon titre ça... :)
Antoine : je ne parle pas de ne pas aller à la rencontre du public et n'emploie pas le terme commercial. Le film est singulier, original, bien mis en scène, il a sa petite musique. Tout ça, je ne le renie pas. Mais quelques fausses notes ne m'ont pas permis d'adhérer à l'ensemble. C'est vrai des éclairs de violence, que j'ai trouvé déplacés (dans le restaurant, l'ascenseur), c'est aussi vrai de l'histoire d'amour, que j'ai trouvée plaquée, qui m'a laissé indifférent. Là où le film tourne un peu à vide, selon moi, c'est sur son propos. C'est pourquoi je parle d'un exercice de style manquant un peu de consistance. Puisque vous me parlez des films noirs (et vous n'êtes pas les seuls à y faire référence), ces films disaient les maux d'une époque. Là, avec Drive, je ne vois pas ce qu'il cherche à me dire. C'est juste une belle histoire, bien mise en scène (ok, c'est déjà beaucoup et c'est pourquoi, je le répète, c'est un bon film) ?
Ed, merci de rebondir sur le film de WKW que je ne supporte pas pour les mêmes raisons. Et encore, je serais beaucoup plus virulent sur ce sujet (je crois qu'on en a déjà parlé).
En fait, je relis en même temps la note de Dr Orlof, je crois que nous sommes quasi à 100% sur la même longueur d'ondes, je le cite (parce qu'il le dit mieux que moi) : "tout paraît un peu trop calculé et calibré pour un public-cible bien défini."
Ed : "l'ayatollah était en noir" ;-)
Ah mince, j'avais oublié pour Wong Kar-wai. Mon contre-exemple tombe à l'eau alors...
Sinon, par rapport à ce qu'écrit le Doc, que l'éventail des défenseurs soit si large, justement, montre que l'on est pas dans la recherche d'un "public-cible".
"Je ne suis pas un public cible, je suis un homme libre !"
C'est bien là où nous divergeons, Julien, tu parles "d'actualisation", et c'est juste quand il s'agit de revenir sur un époque et des codes ("Le dahlia noir" par exemple), mais pour moi, le film noir est une façon d'aborder une époque, contemporaine du film, par le biais d'histoires criminelles, avec une certaine tonalité, une certaine façon de montrer la violence, etc. Le film noir peut donc être français, japonais ou italien s'il rend compte, de cette façon, d'une réalité. Et "Drive" est donc pleinement un film noir en ce qui me concerne. Et je crois qu'il a un fond (Je voulais répondre au Doc sur ce point) et qu'à travers le personnage du driver on a un portrait en creux de l'Amérique de 2011 comme on pu en avoir un tas depuis que le cinéma de genre existe. Et en même temps, Refn joue à fond le premier degré, comme WKW jouait la carte du mélodrame lyrique tout en donnant une évocation superbe du HK des années 60 et de la nostalgie qu'en avaient les années 90. Cela mérite d'être creusé.
On peut aussi dire que Twillight est un film de vampires, pourquoi pas ?
Pour le fond, autant je pense que Shame a beaucoup à dire sur la société contemporaine, autant Driver, je ne vois pas.
Je crois que je vais m'arrêter là. La seule différence entre vous et moi, c'est que vous placez ce film au-dessus de ce que j'en ai pensé / analysé / ressenti. Pour moi, c'est d'un bon niveau avec quelques lacunes, pour vous c'est une réussite totale.
Pour moi aussi, cela a quelques lacunes.
Brion, il fait commencer le film noir en 1940 ? Avec Hitchcock ? Moi, je ne mettrais pas Hitchcock là-dedans et ferait plutôt débuter le film noir en 1944 avec Assurance sur la mort (mais Traquenard, je l'inclue dedans).
Film de vampires, c'est un genre ? Je croyais que les vampires étaient partout, dans tous les genres ou presque (y compris le pop-corn movie pour adolescents - au moins, avec Twilight, on est sûr du public-cible et, pour une fois, on ne regrette pas trop d'être vieux).
Oui, je m'en suis rendu compte après : c'est un sous-genre du film d'horreur (ou film fantastique). A ce compte, donc, on peut faire figurer Twillight dans la catégorie "film d'horreur", pourquoi pas ? Toute analyse par genre se heurte à ce genre de difficultés, c'est ce que je voulais souligner. C'est pourquoi on peut en avoir une définition orthodoxe ou plus large. En ce qui concerne le film noir, je l'ai déjà dit, c'est pour moi un genre daté dans le temps, et à qui on rend hommage ou que l'on "modernise" - là, je préfère le terme de "néo-noir".
En fait, globalement, le premier film noir, qui fait date, c'est le Faucon Maltais (1941).
Tiens, au débotté, à part Drive, vous en retenez beaucoup, vous, des néo-polars ou des néo-noirs dans la décennie 2000-2010. De mon côté, je pourai citer éventuellement Les infiltrés de Scorsese, Zodiac de Fincher (et encore... on est limite dans le genre) et puis...? Les admirateurs ajouteront sans doute un James Gray. Mais pour le cinéma américain, c'est à peu près tout, non ? (bien sûr, si l'on regarde vers l'extrême orient, Johnnie To et Cie, la liste s'allonge).
Alors que dans les années 90 : Coen, Tarantino, Soderbergh, Fincher, Singer, Franklin, Sayles, Eastwood, De Palma et j'en oublie certainement...
Les films que tu cites ressortent plus du polar et du thriller. Et non, la décennie 2001-2010 n'a pas été florissante et productive en néo-noirs. Je vois Black-Dahlia, The Barber... et Drive (mais, comme tu dis, c'est au débotté, il faudrait que je relise mes listes de films vus et correspondant à cette période).
Ceux que tu cites, Edouard, ont donné de belles choses durant cette décennie ("No country for old men", "Kill Bill", "Black-Dahlia"...) . Au-delà, je ne vois pas grand chose, Gray bien sûr, Cronenberg, "Minoriyy report" et "Munich" en tirant un peu les cheveux, et c'est peut bien pour cela que "Drive" séduit tant aujourd'hui.
Oui, j'ai oublié Le Dahlia noir, ainsi que les deux Cronenberg que sont History of violence et Les Promesses de l'ombre. The Barber et No Country, effectivement... Ces deux-là sont d'ailleurs, à mon avis, les meilleurs de ce lot 2000-2010.
Quantitativement, on reste quand même très en dessous par rapport à la décennie précédente. Et surtout, ça manque de nouveaux venus, à part NWR donc...
Tiens, deux points pour continuer de participer au débat :
1) Sur le film noir classique, Simsolo - dans un ouvrage par ailleurs inégal - parle d'un cycle noir s'étendant de 1944 à 1959. Je suis assez d'accord avec cette datation. Il y a, entre 1941 et 1943, plusieurs films qui annoncent très directement le film noir - dont Le Faucon maltais - mais j'ai vraiment tendance à penser que c'est Assurance sur la mort qui permet que soit créé un genre propre (différent, donc, du polar ou du film de gangsters) notamment en intégrant, outre le personnage de la femme fatale, la dimension sociale et, de façon connexe, le rapport à la consommation. Après le genre va connaître des évolutions et des sous-genres (le film de casse notamment).
2) Je suis d'accord avec vos listes et n'ai pas grand-chose à y ajouter (les désormais avant-derniers Polanski et Scorsese sont des polars aussi ; il faut sans doute citer également, qu'on l'aime ou pas, Michael Mann) mais le cas des Coen, sur lequel je m'étais étendu longuement, est intéressant. Le film noir, comme le western, fait partie de leurs influences majeures. Elle se retrouve dans la quasi-totalité de leurs films à des degrés divers parfois avec des jeux complexes avec les canons du genre (Miller's Crossing, The Big Lebowski). Mais il y a une différence radicale entre The Barber et tous leurs autres opus. The Barber rend directement hommage au film noir classique et ce jusqu'en opérant un déplacement temporel en 1949 ou en en reprenant complètement l'esthétique (je passe sur la multiplicité des clins d’œil). Il ne peut donc pas véritablement être considéré comme néo-noir car il ne cherche aucune voie de renouvellement (si ce n'est l'intégration de quelques éléments de leur univers). Quant à leurs autres films, seul (et encore cela dépend sous l'angle de quel personnage on l'envisage) No Country for Old Men me paraît pouvoir être qualifié de néo-noir.
Très juste ce que tu dis sur The Barber, Antoine...
Par ailleurs, je sais comment mettre tout le monde d'accord sur l'acte de naissance : il n'y a qu'à se dire que, de toute façon, les Français n'ont pu découvrir le "film noir" qu'en 1946, lorsque sont sortis en masse les films américains réalisés pendant la guerre ! :D