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Inférieur à son modèle coenien, Fargo, mais largement supérieur à la moyenne de son origine de production, la "comédie populaire française".
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Inférieur à son modèle coenien, Fargo, mais largement supérieur à la moyenne de son origine de production, la "comédie populaire française".
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Pas très fan du segment central avec la longue interview : même si on sent Dupieux projeté dans le personnage de "l'artiste" sommée de s'expliquer, ce n'est pas plus intéressant que ça, et par ailleurs, les flashbacks insérés répètent cette comédie de l'insensibilité déjà vue chez lui. Mais j'ai apprécié la mise en place et surtout la noirceur désespérée de la dernière partie, jusque dans ses contradictions (le rapport à l'argent, qui revient dans l'ultime réplique).
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Miracle. Il m'aura fallu attendre la septième tentative pour aimer absolument un film live action de Wes Anderson (ses deux animés m'avaient bien/beaucoup plu), de l'explosive première séquence à la dernière, plus simple. La violence du monde s'est immiscée dans son univers protégé et même la musique s'est (favorablement) alourdie, sans sucre pop. Les épisodes de cette aventure exotique sont suffisamment variés, les apparitions des vedettes disséminées, les figures de style convoquées à bon escient (oubliée l'insupportable monotonie des travellings latéraux d'Asteroid City). Le segment presque final où Benedict Cumberbatch s'est fait la tête de Fantômas, c'est beau comme du Feuillade. Michael Cera est deux fois très bon en agent démasqué. Je découvre Mia Threapleton, toute de blancheur, face au bloc noir Benicio Del Toro, en Citizen Kane blessé, le point fort du film, l'élément le plus déterminant. Il apporte une épaisseur, une vibration remontant de loin, une présence directe sans second degré redondant. Ces personnages, qui n'ont pourtant au départ pas grand chose pour eux, m'ont paru pour une fois incarnés et sensibles, finalement très émouvants.
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Deux films roumains qui traitent de la révolution de 1989 et de la date pivot du 21 décembre, l'un racontant les prémices, l'autre les conséquences. Pas de révélation du niveau Porumboiu-Mungiu-Puiu de la grande époque mais ma préférence va nettement au second, qui pourtant, je crois, a été moins mis en avant.
"Ce nouvel an..." est un film choral qui, au-delà de ce principe de départ, ne m'a guère semblé aventureux, ni dans sa forme, ni dans son contenu. Le placement de tous ses personnages dans un état de fébrilité permanent est assez artificiel et chaque trajectoire plutôt convenue, avec beaucoup de choses prévisibles, à l'image de la demande de la vieille dame, rechignant à abandonner son appartement, qu'on l'aide à colmater ses fenêtres de chambre. Le choix du "Boléro" de Ravel pour mener le dernier mouvement me semble symptomatique : créer de l'émotion et de l'unanimisme à peu de frais.
L'agitation et la tension sont bien plus justifiées par la situation dans "Libertate" qui, d'ailleurs, choisit avec beaucoup moins de facilités et plus d'audace le decrescendo pour aller à son terme. Son côté thriller, ou film de guerre, ne l'empêche pas de prendre des petits détours, de s'octroyer des pauses, au fil d'une mise en scène habile et prenant consciemment le risque de laisser pendant longtemps très peu de repères au spectateur. La choralité du récit prend cette fois l'allure du hasard et ne dégage que tardivement une hiérarchie parmi les personnages, sans que l'on puisse la prévoir au début. En recréant dans une piscine vide un microcosme où se retrouvent, sous la menace de l'armée, policiers, membres de la Securitate, révolutionnaires de la première heure et simples passants, sa principale qualité est de toujours laisser la place au doute sur chacun et de démontrer courageusement combien il est difficile, impossible même, de juger les gens à chaud, sur l'instant.
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Retourné comme un gant. D'abord un peu agacé par le glacis, par le cynisme, par les bavardages, par la déshumanisation. Puis la mécanique s'emballe, merveilleusement perturbée ("to disrupt", formule de Fassbender en réaction). Et surtout, le facteur humain finit par émerger, enfin (notamment, avec "éclat", dans cette grande scène de retour autour de la table), préservant ce couple singulier. Bravo Steven.