*
Comme je le suspectais, mon souvenir de jeune ado rendait plus tragique, plus violent et plus ample quelque chose d'assez riquiqui et, surtout, faible techniquement. Les scènes d'action sont très moyennes (la séquence avec les avions est catastrophique), aucun effort n'est fourni pour aider à saisir une différence entre ce qui est vu par les téléspectateurs de la fiction et ce qui est vu par le spectateur du film, la photographie est quelconque et le travail sur le son semble inexistant, sans souci de l'ambiance, égalisant toutes les voix par une post-synchro généralisée, probablement en raison d'un tournage essentiellement yougoslave. Marie-France Pisier et Bruno Cremer n'ont pas de mal à paraître sobres à côté des seconds rôles et bien sûr de Michel Piccoli en roue un peu trop libre et de Gérard Lanvin (amusante Isabelle Jordan dans le Positif de l'époque : "magnifique dans Extérieur nuit, très bon dans Une semaine de vacances, intéressant dans Le Choix des armes et convenable dans Tir groupé, il prolonge cette courbe descendante dans l'emploi du personnage en crise : on aimerait bien qu'une habilleuse inspirée perde tous les blousons d'un prochain film et lui essaie un costume trois pièces. Ça nous changerait."). Pour autant, il est terrible de constater à quel point Boisset aura vu juste. Le jeu de la mort est certes encore contenu dans les recoins du net mais les discussions entre Cremer, Pisier et Piccoli (de loin les meilleures scènes), mêlant et malmenant spectacle, morale et politique, restent fortes car glaçantes d'actualité, imaginables sans ajustement, avec le même cynisme et les mêmes alibis, dans d'autres bureaux peuplés d'ordures, ceux de nos chaînes d'opinion d'extrême droite.