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80s - Page 2

  • Les Griffes de la nuit (Wes Craven, 1984)

    **
     
    A 13 ans, pas moyen que je me mette devant le film d'où étaient tirées des images extrêmement flippantes. A 53 ans, ça va. Les séquences horrifiques sont à la fois marquantes et originales. Celles qui les entourent sont correctes. L'idée de départ et son développement font évidemment la force du film, d'autant plus qu'un lien habile est tissé avec cette histoire de virée punitive contre le tueur Freddy, entraînant donc vers une sorte de vengeance à tiroir. Importante aussi, la tranche d'âge des victimes : à l'époque de la sortie, les cauchemars pouvaient passer pour des châtiments contre la débauche, alors que, maintenant, il est difficile de ne pas penser à un fléau comme le sida, qui allait bientôt frapper toutes les consciences. A part ça, tout le monde sait que Johnny Depp faisait là ses débuts mais personne ne m'avait mentionné la présence de Ronee Blakley, en mère de famille pas plus équilibrée que, dix ans plus tôt, Barbara Jean, la chanteuse star de "Nashville"...

  • Brazil (Terry Gilliam, 1985)

    ****
     
    Pas revu depuis très longtemps, je ne me souvenais plus que c'était aussi un excellent film de Noël. Ça reste le sommet de Gilliam, qui ne combinera plus jamais à ce point inventivité et cohérence (allez, si on veut, ça pourrait être un poil plus court que ces deux heures et quart). Et comme disait Michael Palin, c'est quand même le premier film à avoir donné son titre à un pays.

  • Bona (Lino Brocka, 1980)

    ***
     
    Il m'a fallu un petit temps d'adaptation pour y entrer totalement, pour me réhabituer au style de Brocka, qui expérimente encore autour d'une base de mélodrame populaire. Au bout d'un moment, la force du personnage de Bona devient celle du film, et inversement, totalement entremêlées. Par ailleurs, Brocka, tout en restant concentré sur l'héroïne et son "couple", parvient à dresser un tableau social d'une richesse incroyable en un film si court (et même ce salaud de petit acteur égoïste garde son humanité). Belle découverte, quelques années après celles de Manille et Insiang.

  • Femmes au bord de la crise de nerfs (Pedro Almodovar, 1988)

    **
     
    Comme c'est le film de la consécration internationale, j'étais resté sur l'idée d'un assagissement et d'un lissage, et c'est vrai qu'Almodovar arrondit les angles par rapport aux six premiers. Il n'en est pas moins audacieux, dans l'approche visuelle et dans la narration qui renvoie constamment à d'autres référents (jusqu'à ne faire par exemple de l'amant qu'une sorte de projection venue d'un roman feuilleton). J'avais oublié aussi la dimension très théâtrale de la chose, direction décidément très prisée par les cinéastes des années 80 et pas les plus mauvais. Tout ça m'a laissé un peu à distance et je pense toujours préférer les deux précédents. Mais Carmen Maura, qui apparemment s'est un peu fâchée avec Almodovar à ce moment-là, est assez géniale.

  • Le Pacte (Clive Barker, 1987)

    *
     
    Pas terrible ce film culte que, pas vraiment fan d'horreur, j'avais soigneusement évité à l'adolescence. L'aspect le plus intéressant est cette passion contre nature de la femme et du beau-frère revenant d'entre les morts et se reconstituant lambeau par lambeau. En revanche, dans cette narration décousue, ou dépecée, il m'a semblé que les portes infernales ouvraient sur des abominations ayant mal vieilli et que l'histoire de la fifille à papa était bien superflue, jusqu'à un dénouement particulièrement couillon.

  • Mortelle Randonnée (Claude Miller, 1983)

    ***
     
    Pas revu depuis trois décennies ce polar français parmi les plus insolites, parvenant à homogénéiser des éléments très disparates, des changements de registre et de décor. C'est d'ailleurs l'un des meilleurs exemples de transposition réussie d'un univers américain à notre environnement, le voyage à travers l'Europe remplaçant sans problème une déambulation états-unienne.
    Deux imaginaires croissent en parallèle, celui de L’œil et celui de Catherine, avec cette remarquable utilisation de la voix off, dont on n'est pas toujours sûr qu'elle le soit vraiment (certains personnages finissent par dire à L’œil : "Vous parlez tout seul ?").
    Bizarrement, j'ai parfois pensé au Gould du Privé devant Serrault, qui grille beaucoup de cigarettes et qui a tendance à quitter ses interlocuteurs en marmonnant, en se parlant à lui-même, comme le Marlowe d'Altman. Serrault qui était, même entre deux conneries, dans une sacrée période (Garde à vue, Les Fantômes du chapelier, et peut-être, à revoir, Malevil), qui parvenait à créer des personnages incroyables tout en lâchant des petites gestes, des petites expressions, des petits rires, n'appartenant qu'à lui. Ici, quand il "entre" enfin dans la photo, il sort du cadre, c'est très simple et émouvant.

  • Comrades (Bill Douglas, 1987)

    ***
     
    Description d'une communauté de cultivateurs et artisans au service d'un riche propriétaire, de sa constitution en syndicat et de l'arrestation de ses meneurs, au milieu du XIXe. Douglas, comme dans "My Way Home", scinde son récit en deux, étiré cette fois sur trois heures. Bonne idée, le changement total de perspective relance l'intérêt d'une autre manière. A l'étude pointilleuse, à la fois didactique et elliptique, des conditions de vie de ces familles opprimées du Dorset succède la démonstration de la résistance de six condamnés dans les bagnes anglais d'Australie. Après la polyphonie communautaire, les histoires individuelles sont contées l'une après l'autre, séparément, très différentes, pour des mises à l'épreuve de l'idéalisme ancré en chacun. En bon cinéaste de la modernité, Douglas parsème son film de réflexions sur la représentation, objets de pré-cinéma à l'appui, et délivre le discours final encourageant l'unité ouvrière sur une scène de théâtre.

  • La Forêt d'émeraude (John Boorman, 1985)

    *

    Alors que son personnage devrait passer par tous les états, Powers Boothe a une expression et demie. Le fiston Charley B. en a un peu plus et l'avantage d'une blondeur qui tranche avec les sombres cheveux des indiens. Déjà manichéen, le récit est invraisemblable par ses enchaînements (tiré d'une histoire vraie, il est tout de même très romancé et augmenté d'autres histoires d'enlèvements comparables, dixit Boorman). Entre des scènes d'action hollywoodiennes, les "visions" chères au cinéaste apportent un peu d'originalité sinon de la légèreté. Le meilleur est sans doute dans la gestion de l'espace, avec la frontière qui ne cesse d'avancer et les trajectoires des personnages, celle de Tomme principalement, entre ses deux pères (ses deux mères, elles, n'existent quasiment pas). Le film ne m'aura décidément plu qu'à l'adolescence.
  • Outsiders & Rusty James (Francis Ford Coppola, 1983)

    **/****

    Flashs de mon adolescence transformés longtemps après en expérience sur des cobayes de 14 et 22 ans. Résultat, les deux préfèrent largement Outsiders à "l'ennuyeux" Rusty James !
    Et pourtant...
    Outsiders a autant de hauts que de bas. La planque des pauvres petits Macchio et Howell est bien longuette et mélo, comme les scènes d'hôpital qui mobilisent les mêmes. Ailleurs, plus que les rapports entre mecs, c'est la gestion de l'espace qui séduit, embrassé avec ampleur et dynamisme (dans une hyper-expressivité qui fait parfois sourire : Coppola n'attend pas 2 minutes pour proposer des plans de baston à ras de terre, avec donc, on l'imagine, la caméra dans un trou). La mise en scène est musicale mais l'aide des standards attendus est aussi agréable que facile.
    Et donc, de l'illustration à l'inspiration...
    Tout semble touché par la grâce dans Rusty James, qui dérive du film de bande au film-rêve/cauchemar. Rusty James est entraîné ou suit son frère, ou plutôt l'image de son frère, dans les limbes. Le lien fraternel, bien plus profondément ressenti que dans l'autre, est d'autant plus beau qu'il est suspendu, dans l'espace et le temps, entre deux lieux, entre deux époques. Comme si Coppola faisait ici la critique même du monde et de la mythologie d'Outsiders, notamment en dépouillant Dillon de ses forces et de ses illusions, Dillon qui ne fait que prendre des dérouillées et des cuites, qui ne cesse de tomber et de se traîner. Le récit qui va vers la fatalité mais en n'empruntant que des détours (la virée à moto avant de revenir devant l'animalerie), le noir et blanc et les touches de couleurs, les ombres démesurées, les fumées fantastiques, la castagne chorégraphiée, la voix basse et les bras croisés de Rourke, la surdité et la folie, le flic moustachu, le symbolisme des poissons, les pulsations continues de Copeland, les rêves et la lévitation, tout passe, tout s'embrase. Même feu qu'au début 1984 à mes 12 ans et demi.