
Pour la première fois depuis longtemps (I want to go home), le jeu formel auquel m'a convié Alain Resnais ne m'a pas paru véritablement concluant.
Invités à la projection surprise de la captation d'une pièce de théâtre par de jeunes comédiens, pièce qu'ils ont jadis joués eux-mêmes à des époques différentes, un groupe d'acteurs français parmi les plus fameux se met à re-jouer celle-ci spontanément. De cette manière, ils emboîtent donc le pas, ils prolongent, ils répondent à la représentation qui se déroule sur l'écran du salon dans lequel ils ont été installés.
Partant de cette idée, Resnais développe une mise en scène très complexe par les relations qu'elle crée entre la salle et l'écran, entre le décor virtuel et le décor réel, entre le personnage et le comédien. Le découpage surprend constamment, tout comme les compositions dans le cadre qui font apparaître ou disparaître les acteurs, les font changer de position ou de place d'un plan à l'autre, cela alors qu'ils sont supposés rester assis dans leurs fauteuils. Vous n'avez encore rien vu est fort de son étrangeté. Etrangeté du point de départ (deux pièces d'Anouilh, Eurydice et Cher Antoine ou l'amour raté, vénérées par Resnais depuis les années 40), du sujet (une histoire mythique et fantastique) et du traitement (par conséquent, les plus beaux moments sont ceux convoquant des fantômes).
Cependant, le film me paraît osciller sans cesse entre le concept et le récit, même si son but, manifestement, est de glisser progressivement du premier au second pour mieux emporter le spectateur. A mon sens, l'adhésion, l'harmonisation, l'équilibre peinent à se faire : tantôt je m'accroche à l'histoire, tantôt je m'intéresse au dispositif, le rapprochement vers l'un se faisant au détriment de l'autre. Pourtant, c'est bien l'idée de modulation que cherche à partager Resnais, en particulier dans le jeu des acteurs puisque souvent un même personnage et les mêmes mots sont pris en charge par deux interprètes différents. Or, cette modulation induit l'établissement de préférences et, de manière plus précise et gênante, de hiérarchies.
Cette sensation s'accentue avec le choix du cinéaste de placer en miroir un ensemble de grands comédiens et une troupe paraissant beaucoup moins aguerrie, les bénéfices de la double représentation étant vite tirés par le premier groupe. Le second présente une version plus directe, brute, de la pièce, qui nous intéresse moins, qui manque singulièrement d'attraits. La captation presque sans artifice (ne reste que celui du montage) s'oppose à la magie cinématographique entourant ce qui se passe dans le salon. Lumières admirables, décors mouvants, découpage inventif, interprétation de haute volée... tout sert à magnifier le simple texte. D'ailleurs, on remarque la disparition progressive, au fil du film, des comédiens de la représentation enregistrée dans l'entrepôt. L'hommage aux acteurs, un brin solennel, est ainsi délivré essentiellement aux plus reconnus, ceux qui s'activent dans un écrin classieux, loin du cadre ingrat dans lequel travaillent les autres.
Enfin, si Alain Resnais nous offre encore là son lot de beaux moments, il utilise quelques effets de manière plus "gratuite" que d'ordinaire comme les renvois au muet à travers les fermetures à l'iris ou les cartons, il se saisit des outils numériques sans obtenir un résultat très convaincant esthétiquement et il propose une fin à tiroirs plutôt ratée dans son alternance de tons, pessimiste et/ou optimiste.
Cela dit, au-delà de cette déception, la dimension "testamentaire" de Vous n'avez encore rien vu ne m'inquiète pas outre mesure. Ce n'est que partie remise.
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VOUS N'AVEZ ENCORE RIEN VU
d'Alain Resnais
(France - Allemagne / 115 min / 2012)



Jugez-en plutôt : en cette rentrée 84, débarquent sur les écrans L'affamée du plaisir (Sam Corey), Assistantes sexuelles (Philip Drexler Jr.), Commando spécial pour sodomisations (Jacques Courtenay), Les cuisses en l'air (Tony Reed), Demoiselles à prendre par derrière (Jeremy Silver), Initiation pour une pucelle (Oliver Mato), Journal intime d'une nymphomane (Gérard Kikoine), Les orgies du Comte Porno (Joanna Morgan), Partouzes spéciales pour lesbiennes (Jacques Courtenay), Petites mains à tout faire (Léon Gucci), Sensual progression (Joanna Morgan encore) et Rosalie ou la débauche d'une adolescence (Michel Leblanc, avec, humm..., Olinka).
Quelques mois seulement après La vie est un roman (l'un des deux seuls films du réalisateur de Marienbad qui me laisse de marbre), un nouveau Resnais s'offrait à nous : L'amour à mort. Souvenir d'un beau film de chambre douloureux, intense et cependant moins ancré dans la mémoire que Mon oncle d'amérique ou Mélo. Autre grand nom au programme, celui de John Huston. Au-dessous du volcan, découvert quelques années après sa sortie, m'avait plutôt secoué avant qu'une
La grande affaire du mois, c'était le retour de l'homme au fouet et au chapeau. Indiana Jones et le temple maudit (Steven Spielberg) comblait l'ado peu regardant, tout en lui faisant sentir que quelque chose clochait (un peu long ce rituel sanglant, non ?). Peu de temps après, ce petit quelque chose se transformait dans notre esprit en gros ratage et renvoyait cet épisode six pieds sous terre en comparaison des volets 1 et 3. Avec Les Ripoux, Claude Zidi, qui sortait quand même, il faut le rappeler, des Sous-doués en vacances et de Banzaï, surprenait tout son monde en filmant avec une verve inattendue les magouilles de flics de Noiret et Lhermitte. Résultat : un triomphe au box-office. Vus également : Le meilleur de Barry Levinson, ou Robert Redford au pays du baseball, et Le moment de vérité (The Karaté Kid en VO) d'un John G. Avildsen en manque de Rocky, avec Ralph Macchio et Noriyuki "Pat" Morita (comment qu't'as la chair de poule à la fin quand Ralph y'fait le coup d'la cigogne avec sa jambe cassée !).
Autres titres du mois, plus ou moins attirants : Le Tartuffe première réalisation de Gérard Depardieu, Souvenirs souvenirs d'Ariel Zeïtoun avec les yéyés Christophe Malavoy et Pierre-Loup Rajot, Journal intime, film politique hongrois de la réputée Marta Meszaros, Jazz band de Karen Chakhnazarov (du jazz dans la Russie des années 20), La garce, étrange projet de Christine Pascal, avec Isabelle Huppert et Richard Berry, L'intrus d'Irène Jouannet avec Marie Dubois et Richard Anconina, Le voyage (de l'espionnage exotique par Michel Andrieu), Anou Banou, les filles de l'utopie (d'Edna Politi, documentaire sur l'histoire d'Israël vue par les femmes). Notons également que Carole Laure Stress (Jean-Louis Bertuccelli), que Sandrine Bonnaire Tir à vue (Marc Angelo) et que Miou-Miou et Souchon prennent Le vol du Sphinx (Laurent Ferrier). Enfin, n'oublions pas, outre les hong-kongueries habituelles (Ceinture rouge contre dragon blanc de Chen Hung Min, Les cinq foudroyants de Shaolin de Godfrey Ho, Les deux cavaliers de Shaolin de Yang Ching Chen et Les vengeurs du kung fu de Philip Chan), les improbables 2020 Texas gladiators (italien de Kevin Mancuso), L'homme coriace (blaxplotation de Cliff Roquemore), Pris au piège (de l'aventure dans la jungle, par Gus Trikonis), et l'alléchant Rock Zombies (ou plus précisément Hard Rock Zombies, titre original de ce film de Krishna Shah, qui semble basé sur une histoire pleine... de rock et de zombies).