***
L'écriture de Sollima est d'une rigueur et d'une fluidité remarquables dans le genre. Jamais son style n'apparaît haché, heurté, arbitraire, bien que son scénario, comme son découpage ou ses cadrages, ne soient pas avares de surprises (les réapparitions du personnage de Lee Van Cleef chassant sa "proie" sont toujours originales, sans jamais ressembler à des facilités). C'est que, au-delà du serieux de l'exécution, son récit est ancré dans un espace cohérent, que les silhouettes le traversant sont aussi singulières que crédibles, et que le tout repose sur un fond moral clair, ou plutôt qui s'éclaircit peu à peu (la dimension politique devient de plus en plus évidente au fil du film). L'intelligence de Sollima, de ce point de vue, est de laisser longtemps planer le doute sur la culpabilité du personnage du Mexicain (c'est un autre exploit d'être parvenu à justifier les pitreries et la "folie" de Tomas Milian) et de ne pas mâcher ainsi le travail au spectateur, qui peut apprécier pleinement le jeu de Van Cleef et la façon dont celui-ci et le cinéaste parviennent à décrire sans discours un retournement moral, un dessillement face aux puissants dictant leur loi.