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70s - Page 2

  • Paysage après la bataille (Andrzej Wajda, 1970)

    **
     
    Pas facile à suivre, ce film qui traite de la libération des camps en 45 pour dire la difficulté voire l'impossibilité de vivre après. A travers le regard du personnage principal, intellectuel catholique, ce sont les tensions, les interrogations et les culpabilités polonaises qui ressortent, leurs nouveaux rapports avec les grands blocs et avec les rescapés juifs (le personnage féminin, tout aussi perdu). Il faut vraiment s'accrocher car Wajda fait passer tout ça dans des dialogues chargés politiquement et philosophiquement, et il déploie une mise en scène expressionniste qui ne laisse aucun répit (mouvements incessants, caméra portée, zooms, panoramiques, plans très rapprochés, traversées régulières d'éléments ou de silhouettes devant les personnages...). C'est plutôt usant mais l'échappée amoureuse hors du camp de regroupement est un vrai bol d'air, qui valorise mieux les envolées poétiques des dialogues. Avant un retour vers le néant assez fou.

  • L'aventure c'est l'aventure (Claude Lelouch, 1972)

    °
     
    J'avais récupéré ce DVD en pensant découvrir une comédie sympa, moi qui ai finalement vu très peu de Lelouch, mais ce n'est qu'une pitrerie lamentable, politiquement irresponsable et moralement douteuse, dont la mise en scène est d'une nullité absolue, invraisemblable suite de séquences aussi approximatives qu'interminables, centrées sur cinq acteurs rendus, par l'absence de direction ferme, mauvais comme des cochons.

  • Mr. Klein (Joseph Losey, 1976)

    ****
     
    Génial film de cauchemar, où la petite histoire laisse d'abord juste entrer la grande par inserts avant d'être totalement emportée par son flux, et où les absences soudaines du regard de Delon se répercutent dans les miroirs de Losey, où ses gestes sont emprisonnés par ses décors.

  • La Véritable Histoire d'Abe Sada (Noboru Tanaka, 1975)

    ***
     
    Enfin découvert cette fameuse "autre version", qui est effectivement un très bon film. La surprise principale est sans doute le mouvement général qui, en quelque sorte, est inversé par rapport à celui d'Oshima entraînant vers la claustration sans retour. Tanaka, lui, impose le huis clos d'entrée pour aller, dans les dernières minutes, vers une libération (malgré le fait que cela se termine sur l'arrestation). C'est moins dérangeant et moins tragique que le chef d'œuvre d'Oshima mais pas moins incarné, tout à fait crédible dans la description de la passion et mis en scène avec une grande intelligence, plastique (l'utilisation du rouge sang) et rythmique (la première moitié est répétitive sans être lassante).

  • Supervixens (Russ Meyer, 1975)

    *
     
    C'est si éclaté, si excessif, si parodique, si arbitraire, le montage est si rapide, le mixage si bruyant (la musique, qui force l'ambiance et qui appuie tous les effets, devient un peu assommante), les cadrages si expressifs, qu'il est difficile d'y voir autre chose qu'un cartoon, même si c'est un cliché (de Russ Meyer, je n'avais vu que Faster Pussycat...). C'est un univers parallèle, avec un héros qui voit non pas le monde s'accorder à ses désirs mais les devancer, les dépasser, ce qui le désarçonne complètement. Ces femmes délurées et déshabillées, ce devrait être le paradis mais ça vire toujours pour lui au cauchemar. La dernière partie est d'ailleurs franchement onirique, faite de réapparitions et riche en images absurdes. Je dois débarquer en faisant maintenant le lien, mais : un flic taré, du gore, des espaces vides, des angles bizarres, l'enseigne d'un commerce paumé, une même actrice pour deux personnages, une progression par sauts, une discussion sur une route, du déraillement de réalité... Supervixens, c'est un film de Quentin Dupieux... avec beaucoup plus de sexe.

  • Gina (Denys Arcand, 1975)

    *

    Une stripteaseuse et une ouvrière, une équipe de tournage et une bande en motos-neige, un protecteur mafieux et un couple propriétaire de bar. Arcand met en miroir ces groupes ou ces personnages de manière "politique". Pas inintéressant mais difficile de tirer quelque chose de ces mises en rapports, effectuées dans des scènes trop longues pour ne pas perdre en vigueur (une partie de billard est déroulée en entier, comme le striptease plus tard). Le dernier tiers laisse encore plus sceptique en virant au "rape & revenge". Décevant en regard de Rejeanne Padovani et de La Maudite Galette.

  • Trilogie Bill Douglas

    My Childhood (1972) ***
    Chronique du dénuement tournée sinon dans le dénuement, avec presque rien. Même la durée est rétrécie, 48 min. Des plongées, pourtant pas larges, embrassent tout l'espace commun de ces enfants. Datant de 72, le film paraît presque être de 45 (l'époque décrite). Si quelques marqueurs narratifs sont disposés, il n'y a quasiment pas d'enchaînement cause-effet. A la place, une succession de scènes plutôt détachées les unes des autres (le côté rigide du film), comme des remontées de souvenirs, certaines de ces scènes ne semblant se développer que pour mettre en valeur un geste, un objet, un situation, une phrase, quelque chose du passé, de la mémoire. Dur et marquant.
     
    My Ain Folk (1973) ***
    Gardant les mêmes principes (noir et blanc, format serré, cadres fixes, montage en coupes franches), ce 2ème volet est plus travaillé, moins brut. Du 16, on passe au 35mm. Mais la brutalité des comportements reste de mise, l'élargissement aux adultes donnant à voir une société terrifiante. Alors qu'on pense que la force du premier film ne sera pas tout à fait retrouvée, la surprise est de constater un glissement vers une sorte de conte fantastique et horrifique, avec des cercueils, un revenant, une ogresse, et d'étranges suspensions des gestes qui, dans ce cadre familial inquiétant, m'ont, contre toute attente, fait penser à Eraserhead. On se tient pourtant toujours dans le réalisme, qui plus est, de façon un peu plus évidente cette fois, à visée "politique".
     
    My Way Home (1978) **
    A nouveau le changement dans la continuité pour clore la trilogie, avec un virage radical au cœur de ce troisième volet. On y passe de Bresson à Antonioni, arrachés à la petite ville minière écossaise pour suivre Jamie, soldat engagé en Égypte. L'émancipation, l'élévation, aux côtés d'un seul et unique camarade, se font dans le temps arrêté (l'opus est le plus long des trois), dans l'ennui (le personnage lui-même l'éprouve). La force émanant du projet a tendance, là, à s'amenuiser.

  • Les Cavaliers (John Frankenheimer, 1971)

    *
     
    Frankenheimer tente une échappée loin de Hollywood, ambitieuse, curieuse mais décevante. Des images de l'Afghanistan de 1970 étonnent mais elles ne restent qu'un fond documentaire : au premier plan, aucun acteur ne semble afghan, une distribution cosmopolite se partageant les rôles parlants, en anglais avec accent prononcé, et l'Espagne a accueilli de nombreuses scènes. Omar Sharif est surprenant, excellent cavalier seulement doublé aux moments les plus extrêmes (le morceau de bravoure arrive très tôt, sorte de course à la Ben Hur sans les chars et sans musique). Il traverse le film dans un état second, fiévreux, se perdant volontairement dans le danger, ses évanouissements creusant des ellipses dans le récit. Derrière lui, le peuple afghan, société archaïque, s'enivre de sports violents, d'affrontements d'animaux divers (chameaux, oiseaux, béliers). La seule figure féminine est une putain cupide et manipulatrice qui aura le temps, in extremis, avant d'être renvoyée, d'être comblée de plaisir par le héros. Son irruption dans la dernière partie réduit encore l'intérêt d'un film qui devenait déjà moins intéressant à force d'opacité des motivations au-delà d'une rivalité père-fils très symbolique.