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70s - Page 2

  • La Technique et le Rite (Miklos Jancso, 1971)

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    Attila le Hun, aux portes de l'Empire romain, s'adonne aux jeux de pouvoir avec ses hommes, un centurion ou son frère Bleda.
    C'est une épreuve de voir Jancso assécher ainsi son cinéma, même s'il œuvre ici dans le cadre d'une production TV pour la RAI. Fidèle à son style, il tend cette fois à l'extrême vers le théâtre, en un lieu unique à ciel ouvert, entre terre et mer. Le format de l'écran ainsi que le terrain, trop accidenté pour permettre de belles arabesques, altèrent le rapport aux corps et à l'espace. Mouvements et plans longs se révèlent alors d'une grande monotonie. Et comme reviennent les figures habituelles (morts qui se relèvent, groupes qui encerclent, valse des armes qui symbolise l'arbitraire des décisions), le texte se retrouve seul à devoir soutenir tout l'intérêt de cette histoire, allégorie sur l'autorité. Derrière les rituels, ce texte s'efface d'ailleurs peu à peu, ce qui rend la fin à peu près incompréhensible. Pour couronner le tout, très tôt, la bande son ajoute au bruit du vent perpétuel celui de tambours peu supportables rythmant les pas ou les songes des protagonistes. Je vais vite passer à (et revoir) Psaume rouge.

  • Agnus Dei (Miklos Jancso, 1971)

    **
     
    Beaucoup aimé lors d'une première vision très isolée il y a cinq ans. A la deuxième, vraiment dans la continuité des précédents cette fois, j'ai plus de réserves. Après l'échec de La Pacifista, Jancso revient en terrain connu, un peu trop connu. A nouveau la plaine, à nouveau l'année 1919 (la lutte entre révolutionnaires et contre-révolutionnaires, ici attisée par un prêtre fanatique), à nouveau les longs plans, à nouveau les soldats, les chevaux, les femmes nues (dès les premières secondes et avec une régularité parmi les moins justifiées). Le film, qui joue lui-même sur la répétition des gestes, n'évite pas l'impression de surplace. On reste certes dans la réalité des corps et des éléments, et les images marquantes ne manquent pas, mais la volonté de représenter dans un seul lieu et un temps ramassé des enjeux historiques complexes donne des chorégraphies qui finissent par nous perdre (le dernier tiers est assez abscons).

  • Scandalo (Salvatore Samperi, 1976)

    **
     
    Pas vraiment un film de Noël, plutôt un film "problématique" comme on dit aujourd'hui ou un film "à scandale" comme on disait avant et comme l'annonce bien le titre. Avec deux personnages féminins prénommés Juliette et Justine, on se dit que ça va rapidement dégénérer en rituel sadien et effectivement, à peu près toutes les lignes rouges sont franchies dans cette histoire d'employé de pharmacie (Franco Nero) révélant, par méprise et contrainte d'abord involontaire, les désirs profonds de sa patronne (Lisa Gastoni) et développant avec elle une relation sado-masochiste, ou dominant-dépendante, jusqu'à réclamer au final le "don" de sa fille mineure. On a donc tous les détecteurs qui s'affolent. Pourtant Samperi parvient à ne pas sombrer dans le sordide ni dans la dégueulasserie grâce à une mise en scène maîtrisée, une distance rétro (la France en 1940) et une certaine théâtralité qui font passer cette fiction en jeux d'ombres, jeux de lumière, jeux de rôles. Le film va au bout de son sujet avec aplomb et se termine sur un dernier long plan saisissant remontrant sans coupe visible toutes les pièces de cet appartement-officine, point final d'un quasi-huis clos augmentant la dimension "imaginaire" de tout cela.

  • La Pacifista (Miklos Jancso, 1970)

    *
     
    Premier échec patent pour Jancso avec ce film tourné en Italie sans son scénariste Gyula Hernadi ni son chef op Janos Kende (Carlo Di Palma à la place). Pari difficile d'aborder avec son style la réalité italienne de l'époque puisque l'histoire est contemporaine, mélange de passion amoureuse et de luttes politiques (une journaliste bourgeoise de gauche tombe sous le charme d'un jeune homme traqué par ses anciens camarades terroristes parce qu'il a refusé de commettre un assassinat). On y trouve des traces d'humour, des petits détours presque felliniens, mais les mouvements chorégraphiés semblent contraints dans l'espace d'une villa, d'une rue, d'un jardin milanais. Au centre, Monica Vitti ne semble pas parfaitement accordée aux désirs de Jancso. Autour d'elle, une sorte d'internationale auteuriste : Pierre Clementi, Daniel Olbrychski et l'acteur fétiche Joszef Madaras. Encombrée d'une musique romantique et mise en scène avec la distanciation habituelle, l'histoire d'amour indiffère et n’élève jamais le constat sociétal sur les tensions italiennes, très simplifiées, à l'image de ces fonds de plans où quelques figurants agitent côte à côte des drapeaux rouges et noirs.

  • Paysage après la bataille (Andrzej Wajda, 1970)

    **
     
    Pas facile à suivre, ce film qui traite de la libération des camps en 45 pour dire la difficulté voire l'impossibilité de vivre après. A travers le regard du personnage principal, intellectuel catholique, ce sont les tensions, les interrogations et les culpabilités polonaises qui ressortent, leurs nouveaux rapports avec les grands blocs et avec les rescapés juifs (le personnage féminin, tout aussi perdu). Il faut vraiment s'accrocher car Wajda fait passer tout ça dans des dialogues chargés politiquement et philosophiquement, et il déploie une mise en scène expressionniste qui ne laisse aucun répit (mouvements incessants, caméra portée, zooms, panoramiques, plans très rapprochés, traversées régulières d'éléments ou de silhouettes devant les personnages...). C'est plutôt usant mais l'échappée amoureuse hors du camp de regroupement est un vrai bol d'air, qui valorise mieux les envolées poétiques des dialogues. Avant un retour vers le néant assez fou.

  • L'aventure c'est l'aventure (Claude Lelouch, 1972)

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    J'avais récupéré ce DVD en pensant découvrir une comédie sympa, moi qui ai finalement vu très peu de Lelouch, mais ce n'est qu'une pitrerie lamentable, politiquement irresponsable et moralement douteuse, dont la mise en scène est d'une nullité absolue, invraisemblable suite de séquences aussi approximatives qu'interminables, centrées sur cinq acteurs rendus, par l'absence de direction ferme, mauvais comme des cochons.

  • Mr. Klein (Joseph Losey, 1976)

    ****
     
    Génial film de cauchemar, où la petite histoire laisse d'abord juste entrer la grande par inserts avant d'être totalement emportée par son flux, et où les absences soudaines du regard de Delon se répercutent dans les miroirs de Losey, où ses gestes sont emprisonnés par ses décors.

  • La Véritable Histoire d'Abe Sada (Noboru Tanaka, 1975)

    ***
     
    Enfin découvert cette fameuse "autre version", qui est effectivement un très bon film. La surprise principale est sans doute le mouvement général qui, en quelque sorte, est inversé par rapport à celui d'Oshima entraînant vers la claustration sans retour. Tanaka, lui, impose le huis clos d'entrée pour aller, dans les dernières minutes, vers une libération (malgré le fait que cela se termine sur l'arrestation). C'est moins dérangeant et moins tragique que le chef d'œuvre d'Oshima mais pas moins incarné, tout à fait crédible dans la description de la passion et mis en scène avec une grande intelligence, plastique (l'utilisation du rouge sang) et rythmique (la première moitié est répétitive sans être lassante).