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2000s - Page 22

  • There will be blood

    (Paul Thomas Anderson / Etats-Unis / 2007)

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    Je commence par mon petit geste d'humeur habituel envers certains critiques. Dès ses débuts, Paul Thomas Anderson s'est vu collé une étiquette sur le dos, celle de petit malin. Ceux qui emploient cette expression désignent ainsi tout cinéaste généralement américain, jeune, à la technique irréprochable, très cinéphile et sachant travailler les genres populaires pour mieux les revigorer. Le cinéaste idéal, donc ? Et bien non, ils vous diront qu'ils ne sont pas dupes, que tout cela n'est qu'apparence, qu'un voile masquant la vacuité et le cynisme du prodige. Alors juste une question : que sont Reservoir dogs, Miller's Crossing, Boxcar Berta, Le Parrain, L'ultime razzia, Citizen Kane, sinon des films de petits malins ? Moi j'adore les petits malins.

    Passons aux choses sérieuses. L'aboutissement que constitue There will be blooddans la filmographie de Paul Thomas Anderson est finalement logique. Boogie nights (1997, deuxième long-métrage mais première distribution française, Sydney, 1996, n'étant sorti qu'en dvd), Magnolia (1999), Punch-drunk love (2002) : chaque nouveau film se révélait meilleur que le précédent.

    Au tout début du XXe siècle, un homme fait fortune en rachetant à des fermiers leurs terrains arides afin d'en extraire du pétrole. Tout film traitant de cette autre conquête par des pionniers, celle du sous-sol, fait naturellement naître une opposition visuelle entre verticalité (les derricks) et horizontalité (les paysages). Paul Thomas Anderson ne se cantonne pas à cette simple évidence géométrique. D'une part le désir d'élévation de Daniel Plainview est redoublé, concurrencé, mais sur un autre terrain : celui de la foi. A côté du derrick se construit en même temps une église, celle de Eli Sunday. Cette course entre les deux hommes, entre deux visions, ne cessera pas. Si Plainview désire s'élever ainsi, c'est parce qu'il sait que tout nous ramène à terre. S'affaisser, c'est mourir, ou presque. Les accidents projettent violemment sur le sol, obligeant à ramper pour sauver sa peau, l'humiliation de l'autre se fait en le terrassant, s'endormir allongé laisse à la merci d'un pistolet ou d'un incendie. On comprend alors pourquoi Daniel Plainview, dans les trois moments les plus intenses où il est au contact de son fils H.W., à chaque fois, le porte à bout de bras (pour le sauver, le punir ou fêter des retrouvailles).

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    Ces trois séquences admirables sont traitées en longs plans généraux. Cette figure, privilégiée tout au long du film, permet d'embrasser tout le paysage et d'y inscrire très fortement les personnages. L'arrivée de Plainview, accompagné de son fils, au ranch des Sunday en est l'exemple parfait. La fluidité des amples mouvements de caméra permet de s'imprégner du lieu, la conversation entre les protagonistes démarrant même avant que nous nous approchions d'eux. Le cinéaste semble constamment inventer sous nos yeux des figures inédites, des mouvements, des postures : un saut au dessus des flammes pour sortir de son lit, une explosion de colère par dessus la table, un pugilat dans une mare de pétrole... De la stylisation naît un réalisme étonnant. Les dialogues se font souvent rares. Ils ne sont pas pour autant lourds de sens, mais frustres, justes, parfaitement en accord avec le monde décrit. Si ébouriffante soit la fiction, There will be blood est aussi un formidable documentaire.

    Le récit avance par blocs. Et entre deux blocs, il y a des trous : quel pêché le vieux Bandy reproche-t-il exactement à Daniel ? Ce dernier tuera-t-il vraiment un jour celui qui veut lui racheter ses lots ? Et ce fils, ce frère, qui sont-ils ? Ambigus, les liens familiaux ne perdent pourtant rien de leur force. La façon dont sont filmées les rencontres de Plainview avec les fermiers, avec ces plans cadrant ensemble le père discourant et le fils silencieux, libère une intrigante beauté. On ne l'attend pas spécialement sur ce terrain, mais P. T. Anderson montre qu' il peut atteindre à l'émotion simplement par deux ou trois détails bouleversants de justesse : le refus de H.W., sous le choc de l'accident, de lâcher le cou de son père et puis ses grognements plaintifs qui ne peuvent s'arrêter même quand ce dernier, allongé contre lui, le lui demande. L'effet de mise en scène qui consiste à donner au spectateur, un instant, l'impression d'une surdité subjective (comme on parle de caméra subjective) est régulièrement utilisé maintenant, notamment pour des scènes de guerre avec explosions multiples. Ici, les lèvres qui bougent sans qu'un son n'en sorte atteignent la beauté du cinéma muet.

    Le rythme du film et la période abordée aident aussi à faire ce rapprochement. Un autre mènerait vers le cinéma de Terrence Malick. Même lyrisme secret, même montage musical. Pour gagner cet autre pari, il fallait trouver la bande son parfaite. La réussite dans ce domaine tient du miracle quand on sait que c'est apparemment la première contribution significative de Johnny Greenwood à la musique de film. Le plus fort est que la modernité de cette bande originale ne soit pas due aux instruments utilisés (ni anachroniques, ni décalés, essentiellement des cordes et des percussions, loin de l'univers de Radiohead) mais à sa texture si particulière et son utilisation.

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    Il serait gonflé de faire l'éloge de There will be bloodsans parler de Daniel Day Lewis, meneur d'une troupe unanimement excellente. On ne voit pas finalement qui d'autre aurait pu tenir ce rôle, de manière aussi intense. Pourtant, il ne tire pas tout à lui, laisse la place, même à ceux que son personnage domine. En deux heures de film, il a été capable de passer d'un Jack à l'autre : de Palance à Nicholson. L'épilogue situé en 1927 désarçonne quelque peu. Le dernier quart d'heure évoque assez ouvertement, contrairement à tout ce qui précédait, Kubrick et Shiningpar la monumentalité et la symétrie d'un décor fermé, par le mélange de grotesque et de violence et par une phrase conclusive forte et absurde. La forme peut se discuter mais il est certain que la séquence restera en mémoire.

    Dans There will be blood, intentions et réflexions se dévoilent et se développent à partir d'un récit et d'une incarnation forte, au lieu de leur pré-exister. Film ample, d'une grande ambition et s'articulant en une série de scènes magistrales, surtout dans sa partie centrale (séquence inoubliable de l'incendie du puits) : un rêve de cinéma hollywoodien comme il s'en réalise de temps en temps.

     

    PS : Arrivant un bon mois après la sortie, et dans un souci Bayrouiste de dépassement des clivages, je vous invite à lire les avis de bloggeuses et bloggeurs de bonne compagnie : Dasola, Neil, Eeguab, Ishmael.

    Photos : dvdbeaver.com

  • Être sans destin

    (Lajos Koltai / Hongrie / 2005)

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    1113820649.jpgL'une des postures critiques qui m'insupporte le plus est celle qui pose la représentation des camps de concentration et d'extermination nazis comme le tabou absolu du cinéma, celle qui assène régulièrement que depuis Shoahde Claude Lanzmann, il n'est plus possible d'aborder frontalement cette catastrophe. Si il est évident que le sujet requiert mille précautions, que l'esthétisme peut vite rendre toute mise en scène détestable, que certaines choses, comme une chambre à gaz vue de l'intérieur aux côtés des victimes, ne peuvent pas être filmées (et encore, quelqu'un, un jour, trouvera peut-être un moyen acceptable de le faire), pourquoi décréter un interdit total ? Pourquoi aucun cinéaste ne devrait essayer ? La liste de Schindler et La trêve, entre autres, ont ainsi été discrédités tour à tour (je ne parle pas de La vie est belle, que j'aime beaucoup, car son propos n'était pas de traiter de manière réaliste de la shoah). Effectivement problématiques, essentiellement en raison de choix de mise en scène très contestables pour certaines séquences (la petite fille au manteau rouge ou les douches chez Spielberg, la génuflexion de l'officier nazi face au déporté libéré chez Rosi), ces deux films n'en sont pas pour autant odieux.

    Être sans destin (Sorstalansag) est l'adaptation cinématographique d'une autobiographie, modulée en roman, d'Imre Kertesz, publiée en 1975. L'auteur, prix Nobel de littérature, s'est chargé lui-même de l'écriture du scénario et a confié la réalisation au "débutant" Lajos Koltai, grand chef opérateur des films d'Istvan Szabo notamment. Gyorgy a quatorze ans en 1944. Les juifs hongrois, relativement protégés jusque là par la dictature en place, alliée à l'Allemagne, subissent à leur tour les déportations. La première partie du récit nous montre les préparatifs du départ du père de Gyorgy pour un camp de travail et l'arrestation inattendue du garçon dans les jours suivants. L'épisode central, le plus long, décrit son séjour à Auschwitz (camp d'extermination) puis à Buchenwald (camp de concentration). Enfin, nous assistons à son retour à Budapest, suite à la libération du camp par les Américains.

    Commençons par les réserves. La première, qui saute aux oreilles, est la musique d'Ennio Morricone, d'un sentimentalisme qui va à l'encontre des autres choix de Kertesz et Koltai (on a même droit à la flûte de pan). Les séquences à Auschwitz en sont heureusement dépourvues, ce qui traduit peut-être l'embarras des auteurs face à cette partition. La seconde tient à quelques moments où Koltai se laisse un peu dériver vers la trop belle composition : un ou deux plans oniriques sur Gyorgy et surtout une plongée sur les détenus obligés de rester debout immobiles dans la cour du camp pendant des heures et se balançant de fatigue tels des herbes ondulant sous le vent.

    Mais à part ces scories, ce souci plastique porte ses fruits. La photographie est remarquable, passant insensiblement des bruns et ocres des premières scènes dans les intérieurs cossus de Budapest à un quasi-noir et blanc dans les camps, pour finir avec seulement quelques touches de couleurs qui réapparaissent avec le retour à la vie. Dans les carrières nazies, les tenues rayées des déportés se fondent dans le gris de la pierre. Entrecoupés de fondus au noir, ce sont des flashs de la vie dans l'univers concentrationnaire qui sont proposés, plutôt qu'un récit clairement articulé. C'est la grande qualité du film, ce qui fait que le pari est réussi. On est vraiment dans un flux de la mémoire, dans une succession d'instants comme autant de souvenirs terribles. Grâce à ce choix de narration, l'impression est forte d'une gestion du temps qui n'appartient plus ni au personnage, ni par extension, au spectateur. Ce flottement temporel est de plus en plus prégnant, jusqu'au passage à l'infirmerie où Gyorgy, à moitié mort, ne sait plus où il est, pourquoi on le soigne, qui gère le camp.

    Sûrs de leurs choix esthétiques et moraux, Kertesz et Koltai se permettent même de placer une réponse à La liste de Schindler, avec une scène de douche dont le "suspense" est autrement mieux justifié que chez Spielberg. Gyorgy/Kertesz, incarné avec excellence par le jeune Marcell Nagy, est le personnage idéal. Ce n'est ni un enfant auquel la réalité échapperait, ni un adulte qui prendrait à bras le corps le récit. Gyorgy se laisse porter par les événements (il ne fuit pas lors de la rafle alors que le policier hongrois lui fait un signe de la tête) et se propose en quelque sorte pour guider notre regard. A quelques rares exceptions près (voir plus haut), Koltai garde le point de vue de l'enfant. Sa défaillance, son horrible blessure, son état dans les dernières semaines sont bouleversants. Les séquences du retour sont elles aussi remarquables, par leur retenue et leur capacité à rendre la fracture irrémédiable entre ceux qui reviennent des camps et ceux qui les attendent (et qui posent toujours la question : "Comment c'était ?", question à laquelle aucune réponse ne peut alors être formulée).

    Être sans destin, passé inaperçu lors de sa sortie française en 2006, est bien, à ce jour, le film de fiction réaliste le plus satisfaisant sur le sujet.

  • Julia

    (Erick Zonca / France / 2008)

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    183517848.jpgCe n'est pas de gaieté de coeur que je m'apprête à dire du mal de Julia. J'avais beaucoup apprécié, à la fin du siècle dernier, La vie rêvée des anges et Le petit voleur. Ce retour était donc attendu et intriguait d'autant plus avec ce projet : tourner aux Etats-Unis l'histoire d'une femme sous influence (celle de l'alcool principalement) qui a cette idée folle de kidnapper un enfant de 8 ans afin d'extorquer à sa famille deux millions de dollars.

    Le problème n'est pas tellement la transplantation d'un univers. Zonca s'adapte parfaitement et sans le générique, nous serions bien en peine de démontrer que le film est réalisé par un européen. Julia, avant d'être un film noir, est un portrait de femme. Du début à la fin, la caméra reste collée à Tilda Swinton, qui se jette corps et âme dans son rôle. Dans la première partie, où on la suit de bars en bars s'enivrer jusqu'à se réveiller complètement paumée le lendemain matin dans des lits inconnus (Zonca, par son montage, nous réserve les mêmes surprises qu'elle), l'actrice réussit l'une des choses les plus difficiles au cinéma : rendre plausible l'état d'ivresse et son pendant pâteux du lever du jour.

    Le kidnapping, au cours duquel, forcément, tout va de travers, fait bifurquer le film. La dureté et l'inconscience de Julia envers Tom, le gamin, donnent une série de scènes glaçantes et l'évolution de leurs rapports est des plus réalistes. Le tourbillon organisé autour de Julia semble se calmer avec ce tête à tête imposé, d'autant plus que le drôle de couple se retrouve dans le désert californien. On s'aperçoit alors que cette femme, rendue tout à fait imprévisible par l'alcool, est finalement tout aussi insupportable à jeun. Son irresponsabilité confine à la bêtise. Pourtant, Zonca tient absolument à nous accrocher à elle (il faut reconnaître que son point de vue est rigoureusement épousé, nous ne suivons qu'elle, en laissant hors champ tout protagoniste quitté). Mais tenir aussi longtemps à côté d'un tel personnage est une sacrée gageure et le soutien d'une mise en scène d'équilibriste est nécessaire. Celle de Zonca est agitée et énergique, malheureusement elle n'est que cela. Il y a trois ans, Lodge Kerrigan avec Keane, proposait, sur un thème très voisin, le portrait d'un homme au bord du gouffre. Le voyage dans un esprit dérangé, ramassé sur 1h40, se révélait autrement plus impressionnant que les fatigantes 2h20 de Julia. Pour continuer dans les confrontations défavorables (Zonca lui-même nous y incite dans ses entretiens très référencés), la partie mexicaine ne soutient pas la comparaison avec la moindre séquence d'Amours chiennes et le long tunnel de la dernière demi-heure ne fait passer la tension des situations que par une hystérie collective particulièrement pénible.

    Je peste assez contre le manque d'ambition des cinéastes français pour ne pas regretter fortement cet échec. Il ressemble assez à celui de Bruno Dumont avec Twentynine Palms. Espérons donc que Erick Zonca enchaîne avec son Flandres à lui.

  • La ronde de nuit

    (Peter Greenaway / Grande-Bretagne - Pays-Bas - Pologne / 2007)

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    772942635.jpgRetour en demi-teinte pour Peter Greenaway avec cette évocation d'épisodes de la vie de Rembrandt s'articulant autour de la réalisation du tableau La ronde de nuit. Celui-ci est censé glorifier une milice, soit une quinzaine de gardes civiles, personnalités de haut rang aux fortes ambitions marchandes et politiques. L'oeuvre a fait date en rompant avec les conventions picturales en vigueur, notamment par la présentation dynamique des corps en un temps où les peintres proposaient dans cet exercice des portraits figés.

    Toujours stimulé par les jeux intellectuels, Greenaway, partant de ce tableau aux nombreux détails énigmatiques, a développé une intrigue montrant que Rembrandt, s'acquittant à contre-coeur de cette commande, a peint sciemment une oeuvre accusatrice révélant les activités meurtrières de ses commanditaires. Cependant, si l'on s'attend à une sorte d'enquête criminelle par le biais de l'art, La ronde de nuit (Nightwatching) déçoit quelque peu. Je me suis retrouvé fréquemment perdu au milieu de ces multiples personnages sollicitant Rembrandt et le goût de Greenaway pour les références culturelles et les phrases à double sens ne m'a guère aidé à reprendre pied. On finirait par croire le film réservé aux spécialistes de la peinture du XVIIe. Si l'on a plaisir à retrouver l'esthétique théâtrale si particulière du britannique, elle semble ici plus froide, comme en sourdine (à l'instar de la musique, qui n'est pas signée cette fois-ci par Michael Nyman).

    Le film est long (2h25) mais, oserait-on-écrire, plus long au début qu'à la fin (ce qui vaut mieux que l'inverse). Car au bout d'une heure, Greenaway daigne enfin nous montrer le fameux tableau et ses indices. La confrontation des sujets-commanditaires avec le résultat final, organisée et théâtralisée par Rembrand, est une scène formidable qui éclaire enfin et accélère le récit. Dans le même esprit, la discussion lors de l'exposition du tableau, cet échange entre Rembrandt et De Roy, fait office pour le spectateur d'explication de texte pédagogique tout à fait bienvenue et pertinente. Ainsi, c'est bien dans cette seconde partie du film que l'on retrouve toutes les qualités du cinéaste. La scène de la mort de Saskia arrive à émouvoir grâce à la distanciation. La répétition, procédé qui donna de si belles choses dans les années 80 chez Greenaway, charge d'émotion également les trois apartés que Rembrandt réserve au spectateur pour présenter ses trois femmes successives. Se remarquent enfin les obsessions habituelles du gars Peter : corps singuliers offrant une fois dénudés une beauté certaine et cohabitation dans les dialogues d'un langage savant et d'invectives grossières.

  • Capitaine Achab

    (Philippe Ramos / France / 2008)

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    1263655300.jpgPhilippe Ramos, ambitieux, a donné à Moby Dick un prologue. En laissant courir son imagination autant qu'en s'inspirant de la biographie d'Herman Melville et de la sienne, il a inventé une enfance au Capitaine Achab. Cinq chapitres égrènent des épisodes de la vie du chasseur de baleine. Seul le dernier recoupe le roman. Capitaine Achab est un film singulier, fragile et rageant.

    Un film singulier par ses propositions radicales. Intitulés "Le père", "Rose", "Mulligan", "Anna" et "Starbuck", les chapitres sont pris en charge par cinq voix-off différentes et chaque récit a une tonalité différente. Ramos entraîne une troupe d'acteurs dans un projet étrange qui mêle le théâtre et les fantasmes visuels pour aboutir à une sorte de primitivisme (on pense au cinéma muet et pas seulement pour l'abondance des ouvertures et fermetures à l'iris). Les comédiens sont pour la plupart des francs-tireurs habitués aux expériences à part. Aux côtés de Denis Lavant, Achab adulte des deux dernières parties, on trouve Jacques Bonnafé, Jean-François Stévenin ou Lou Castel (et Philippe Katerine dans un rôle tragi-comique dont il se tire bien). La musique brasse envolées lyriques et chansons pop sans que cela paraisse incongru, ce qui est un bel exploit. Un voyage magique en barque est accompagné par la voix la plus évanescente du monde, celle de la seule chanteuse qui semble vous susurrer chaque mot à votre oreille à vous, ici, dans le noir : Hope Sandoval de Mazzy Star.

    Un film fragile car en équilibre constant entre l'ellipse qui dit tout et le manque qui frustre. Le récit des origines qu'invente Ramos est constamment convaincant. Il n'était pourtant pas évident d'amener toute cette Amérique de ce côté-ci. Le panneau central ("Mulligan") est celui qui a ma préférence. Malgré toutes les limites imposées à l'expression du conte, on croit à cette rencontre avec des brigands et à cette dérive fluviale qui mène à la mer. Il suffit d'une poignée de plans très simples pour faire passer toute la fascination qu'éprouve tout à coup le petit Achab face à l'immensité (et au bruit) de l'océan. Les séquences de la blanchisserie sont moins tranchantes, malgré la présence de Dominique Blanc et l'importance de l'épisode dans l'affirmation du thème principal du film (le rapport aux femmes) et de sa couleur (la blancheur partout : des draps au ciel). Le dernier chapitre, lui, n'a pas tout à fait la force attendue avec cette mise en scène tiraillée entre les ombres de la cabine et l'ouverture sur le pont du baleinier. La chasse prend la forme d'un vieux document d'archives et sonne ainsi comme un aveu, celui de l'impossible tournage d'une séquence sensationnelle.

    C'est en cela que le film est rageant. Un cinéaste français tente un pari audacieux, qui tranche avec l'insupportable tiédeur habituelle, mais les moyens ne suivent pas (et le public non plus : projection d'hier soir, pourtant avec présentation préalable, pour cinq spectateurs, moi y compris). Comme face au Radeau de la Méduse d'Iradj Azimi sorti à grand peine en 98, nous voilà à nouveau devant un film bancal qui ne peut que proposer une épopée en creux et des fulgurances, comme quand Achab, géant, se tient droit sur la mer.

  • Le roi et le clown

    (Lee Jun-ik / Corée du Sud / 2005)

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    824798337.jpgEn 1504, deux artistes de rue particulièrement doués, Jang-sang et Gong-gil, décident d'aller gagner leur pain à Séoul, ville alors sous la coupe du Roi Yeonsan. En se moquant de celui-ci dans leurs spectacles, ils y font fureur mais sont arrêtés et battus. Pour avoir la vie sauve, ils proposent de faire une représentation au palais royal. Le coup de poker réussit : le Roi rit et accepte de les garder auprès de lui. La suite nous éclaire sur les motivations du souverain. Autant que l'envie d'être diverti, ce sont l'attirance pour l'androgyne Gong-gil et l'utilisation des saltimbanques dans sa lutte contre ses ministres qui provoquent sa bienveillance.

    Sorti en France en début d'année, Le roi et le clown est un mélodrame historique ayant connu un succès énorme en Corée du Sud. Allergiques aux excès dramatiques et aux jeux d'acteur très expressifs s'abstenir. Les autres passeront un excellent moment. L'une des qualités du film tient à la variété des registres et des thèmes. Les caractères des trois personnages principaux s'opposent et se complètent. Jeong Jin-yeong (le Roi) cabotine avec délice pour rendre la folie contagieuse du monarque, Lee Jun-gi (Gong-gil, l'homme-femme) joue avec retenue, économe en mots et en expressions et Karm Woo-seong (Janf-sang), celui qui entraîne les autres par son énergie, allie l'intelligence, la lucidité et la fougue en tentant de masquer ses fêlures.

    Le film développe trois enjeux et se nourrit de leurs interpénétrations : théâtre, pouvoir et passion. Le premier est présent sous tous ses aspects de la farce à la tragédie, en passant par le cirque. Lee Jun-ik a la bonne idée de faire durer suffisamment chaque représentation et de différencier chaque cadre et chaque public dans sa mise en scène (les bruits et les mouvements de la foule dans la rue opposés au silence et à l'immobilisme des ministres et de l'entourage du Roi). Comme dans tout bon drame d'inspiration shakespearienne, les jeux théâtraux se font le miroir des luttes intestines au sommet de la société. La volonté de pouvoir du Roi s'étend à bien des niveaux : sur son peuple (bien qu'il disparaisse quasiment du film à partir du moment où l'on entre dans le palais, puisqu'on ne ressort plus de ce piège), sur ses ministres, sur sa famille, mais également sur les artistes qu'il manipule. La passion amoureuse, quant à elle, bien que moins affirmée, prend une place aussi importante. Elle est hétéro ou homosexuelle, indifféremment ("normalisation" bienvenue mais peut-être aussi, tout simplement, vérité historique des moeurs).

    Lee Jun-ik harmonise habilement tout cela par sa mise en scène, dynamique sans trop faire des pieds et des mains. Les séquences d'acrobaties sont basées sur des trucages simples à base de doublures, de cadrage et de montage. Sur ce point et sur celui plus général de la tragédie shakespearienne, ces 2 heures nous font oublier la grosse pâtisserie numérisée et assourdissante de l'an dernier qu'était La cité interdite de Zhang Yimou. Y compris grâce à ce happy end triste, déclaration mélodramatique filmée avec aplomb et désenchantement à la fois.

  • Shotgun stories

    (Jeff Nichols / Etats-Unis / 2007)

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    1848688301.jpgShotgun stories est un film qui fait la gueule, Shotgun stories n'est pas un film aimable. Ce n'est pas forcément un défaut, comme le montre parfois le cinéma de Breillat, de Dumont ou de Haneke. Ici pourtant, quelque chose me gêne.

    Dès les premiers plans, une chape de plomb pèse sur chaque personnage. Le poids de la tragédie ne semble jamais devoir s'alléger. La ligne, le ton, ne dévient pas. Les dialogues sont rares mais chargés eux aussi (amour, haine, vengeance, famille). Un engrenage répétitif, opposant deux fratries, se met en marche à partir d'un éclat lors d'un enterrement, celui d'un père ayant eu deux vies de famille successives. Le conflit est montré du point de vue des trois frères abandonnés au terme du premier mariage. Leurs prénoms résonnent lourdement du manque d'amour parental : Son, Boy et Kid. L'interprétation, par des visages peu ou pas connus, est intéressante sans être transcendante (Michael Shannon était plus à l'aise l'an dernier dans le Bug de Friedkin).

    L'histoire n'est pas située clairement dans le temps. Elle pourrait dater des années 70. De fait, c'est tout un pan du cinéma américian de cette periode qui est convoqué : Malick et Badlands pour la violence dans le cadre d'une petite ville de campagne filmée en scope et pour le montage "musical", Monte Hellman pour ces moments du quotidien où rien ne se dit de spécial, rien ne se passe d'important, et enfin tous ces films d'horreurs du genre Massacre à la tronçonneuse, faisant naître le pire du calme paysage champêtre. L'ambiance est à la menace sourde. Chaque nouveau plan nous voit guetter avec inquiétude telle voiture entrant dans le champ. Régulièrement annoncée, la violence est, passés les prémisses, maintenue hors-champ ou désamorcée.

    Pas de doute, Jeff Nichols sait y faire et sait ce qu'il veut. Seulement, si maîtrisé que soit son film, les intentions sont toujours évidentes (un seul exemple : le thème musical passe insensiblement du folk au lamento, suivant en cela la montée dramatique, pour repasser sur la fin des violons à la guitare quand une lueur d'espoir se fait enfin sentir). Il y a peu de latitude laissée aux sentiments du spectateur. Une légère impression de manipulation flotte. Il serait idiot de nier que Shotgun stories soit un bon film et un début de carrière plus qu'honorable, mais le volontarisme de l'ensemble génère comme un picotement désagréable.

  • Juno

    (Jason Reitman / Etats-Unis / 2007)

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    1249970646.jpgCela faisait quelque temps que je n'étais pas tombé sur un petit film indépendant américain (j'entends ici le qualificatif au sens musical et culturel du terme, plutôt qu'économique). Le dernier se trouvait être Ghost world de Terry Zwigoff, datant de 2001 mais vu seulement quatre ans plus tard. Sous forme de vignettes ironiques, on y parlait de la culture indé, du refus du conformisme, de l'amour de la musique et de l'importance des pratiques artistiques de chacun, pour aboutir à une réflexion touchante sur ce qui nous paraît cool ou ringard. Steve Buscemi et l'ado Thora Birch formaient un savoureux duo dépareillé, sous les yeux d'une jeune fille qui gagnait déjà à être connue, Scarlett Johansson.

    Chronique de l'adolescence, Juno aborde les mêmes rivages que Ghost world, avec un peu moins de réussite toutefois. L'héroïne a 16 ans, est lycéenne et enceinte, résolue à accoucher mais aussi à faire don de son bébé à une famille en mal d'enfant. Un prologue décalé suivi d'un beau générique animé, sorti tout droit d'une pochette d'album, nous embarque dans l'histoire. Les quatre saisons rythment la grossesse de Juno, ses rapports avec le père involontaire, avec sa famille recomposée et avec le couple adoptant qu'elle a choisi elle-même. Aussi agréable que soit le récit, le film peine parfois à rendre naturel un désir farouche d'originalité. Le personnage de Juno est très attachant mais les dialogues à l'humour décalé lui donnent trop souvent réponse à tout, abusant des réparties malines, apparaissant parfois comme une version ado de Woody Allen, d'ailleurs cité dans le film. Le rythme faiblit par moments, surtout dans les scènes très dialoguées où la mise en scène est bien sage. On entend avec plaisir des discussions sur les mérites comparés de Dario Argento et Herschell Gordon Lewis ou sur Sonic Youth, mais ces passages font un peu trop explication de texte (le jeu autour des références était mieux intégré dans Ghost world). Mark, le passionné de culture rock s'illustrant maintenant dans les rengaines publicitaires, est peut-être le double du cinéaste, coincé entre expression personnelle et désir de plaire.

    Bon, arrêtons avec les petites réserves. Finalement, le film réussit plutôt là où l'on craint qu'il ne se casse la figure : dans le noeud dramatique, dans ce passage obligé sur la route de la perte de l'innocence. Juno, l'excellente Ellen Page, n'est jamais aussi touchante que quand les événements lui échappent. En allant au bout d'un choix qui étonne (et avec lequel chacun dans l'histoire, semble s'accommoder), Reitman parvient à faire passer une sorte de "consensus dans la marge", sans doute un poil trop rose mais plaisant. En levant le pied sur les répliques, le dernier quart d'heure offre de jolis moments suspendus : une séquence d'accouchement très bien filmée, des scènes où Michael Cera enlace la petite Ellen Page comme Martin Donovan enlaçait la petite Adrienne Shelly dans Trust me, et ce dernier plan qui, en reprenant une nouvelle fois la belle ballade des Moldy Peaches, nous signifie que nous ne sommes pas dans un film français mais bien là où il est possible de faire converger pendant quelques instants la trajectoire de figures attachantes, l'amour de la musique indépendante et le cinéma.

  • Viva Laldjérie

    (Nadir Moknèche / France - Algérie / 2004)

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    1856051809.jpgEst-ce que l'éloignement (pour ne pas dire l'exotisme) rend plus indulgent ? Sûrement qu'une scène de rue tournée à Alger se charge pour nous d'une autre dimension par rapport à la même qui nous montrerait n'importe quelle ville française. Je précise tout de suite : Viva Laldjérie est bien plus qu'un film informant sur une société. C'est une oeuvre ambitieuse et maîtrisée, un petit bijou.

    Bien sûr, Nadir Moknèche, à travers ce double portrait (mère et fille), propose une vision de l'Alger d'aujourd'hui. Toutes les premières séquences sont là pour présenter les personnages et surtout pour rendre compte d'entrée des contradictions et des tensions secouant les hommes et les femmes algériennes. Les sorties en boîte de nuit, le sexe dans les toilettes, les amours adultères, les aventures homosexuelles, les problèmes financiers, sont autant d'éléments que l'on ne se s'attend pas forcément à rencontrer, surtout de façon aussi ouverte. Le cadre ainsi posé, le cinéaste peut ensuite approfondir les caractères, tracer des trajectoires, nous toucher réellement après nous avoir surpris. L'une des grandes qualités de Viva Laldjérie est son scénario. Admirablement écrit (par Moknèche lui-même), il ne cède pas à la mode du film choral qui entremêle souvent artificiellement les destinées de chacun. Si de très nombreux personnages secondaires ont leur importance, le récit garde comme point d'appui Papicha, l'ancienne danseuse terrorisée par les islamistes, et sa fille Goucem, qui, à 27 ans, perd ses illusions de mariage bourgeois et multiplie les aventures. Entre les deux femmes (l'interprétation, tant de la star Biyouna que de la jeune Lubna Azabal, est remarquable), les scènes d'incompréhension ou de colère existent, mais les rapports conflictuels attendus sont écartés. Cela fait que chacune suit son chemin (toute la dernière partie semble les séparer) même si les liens qui les relient sont toujours solides. Cette évolution n'est pas la seule preuve de l'excellence scénaristique du film. La plupart des séquences ne se termine pas comme on pouvait le soupçonner et régulièrement, Moknèche attend quelques instants pour délivrer toutes les informations sur l'identité ou l'intention réelle de ceux qui apparaissent devant nous. Il faut voir aussi la façon dont le cinéaste intègre parfaitement au récit des éléments à première vue pittoresques, comme le mariage qui bloque la circulation ou la visite à la voyante (cette scène étonnante qui permet de plus cet échange merveilleux : "- Avec cet homme, depuis trois ans, vous avez dû faire autre chose que vous regarder. - Évidemment. On est en 2003... - Si on est en 2003, pourquoi vous venez me voir ?").

    La retenue dont il est fait preuve ici en ce qui concerne la politique n'est pas synonyme de manque de lucidité ou de courage. Les membres de la Sûreté Nationale n'ont rien de rassurant et les attentats islamistes sont craints (mais peuvent aussi servir de faux prétexte à un retard au travail). Dans ce monde écartelé entre fondamentalisme et liberté, presque tous rêvent d'ailleurs. Si la plupart sont tentés par l'Europe, d'autres, comme Papicha souhaitent retrouver un passé idéalisé. Cette mélancolie est rendue par une belle mise en scène. Si quelques instants du début laissent craindre une esthétique de sitcom, par les éclairages ou par un ou deux seconds rôles mal assurés, l'inquiétude est vite dissipée. Nadir Moknèche donne à chacun de ses plans la durée qu'il faut. Parfois, il laisse couler après la sortie de champ du personnage, laissant se développer un beau leitmotiv au piano sur des magnifiques panoramiques ou captant la vie qui continue, comme pour le très beau dernier plan du film. Réussissant à unifier bien des registres, de la chronique au drame, de la comédie au polar, Viva Laldjérie est une vraie découverte.

  • La Môme

    (Olivier Dahan / France / 2007)

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    1229403370.jpgMis de bonne humeur par le Kusturica, je me suis laissé tenter par la ressortie post-César de La Môme. Je vous jure que je voulais bien l'aimer ce film, que j'étais prêt à passer par dessus bien des contraintes imposées par le genre. Mais pour ce faire, il aurait fallu que le cinéaste me fasse un peu plus confiance en temps que spectateur et qu'il ne se base pas uniquement sur son cahier des charges pour conduire son récit. Je ne connais pas les précédents travaux d'Olivier Dahan mais il m'a l'air d'être un jeune cinéaste (40 ans) "moderne et ambitieux". Alors pourquoi diable nous fait-il un biopic aussi conventionnel ? C'est sûr, tout était calibré dès le départ pour que ça marche, ici et de l'autre côté de l'Atlantique. Tous les rôles principaux sont tenus par des vedettes, au point qu'on s'étonne de ne pas voir débarquer Clovis Cornillac en Marcel Cerdan. A ce jeu de reconstitution historique avec l'accent, ce sont les plus aguerris (Depardieu et Greggory) qui sont le moins insupportables. On a droit en passant à l'incarnation de Marlene Dietrich par Caroline Sihol, et ça, ça fait très mal. Quant à Marion Cotillard, c'est vrai que ça a dû être dur pour elle toutes ces heures passées au maquillage (mais elle est en fait meilleure en vieille dame qu'en femme de son âge).

    Si Polanski a fait Oliver Twistpour son fils, Dahan a dû faire La Mômepour sa grand-mère. Bien sûr l'académisme dont le film fait preuve est un académisme au goût du jour. Les scènes de rue ou d'affrontements sont tournées avec une caméra nerveuse quand les moments plus lyriques ou émouvants sont traités à coups de fondus enchaînés et de fluides mouvements de caméra. Tout ça est très au point et parfaitement ennuyeux. La belle séquence du premier dîner entre Edith et Marcel est gâchée par l'insertion parallèle du compte rendu qu'en fait la chanteuse à sa confidente, procédé gratuit qui rompt le charme initial. La seule petite audace tient donc dans le faux retour de Cerdan à Paris. A ce moment, Dahan parvient à faire pressentir que quelque chose cloche, rien qu'en faisant durer pour la première fois un plan. Ah si, une autre jolie idée : la redressement de Piaf quand on lui joue pour la première fois Je ne regrette rien, lui faisant s'écrier "C'est ce que j'attendais depuis des années". A part ça, de l'aspect musical, rien ne ressort. Les concerts sont filmés banalement, la leçon de chant draîne tous les clichés possibles pour montrer la progression technique de la chanteuse. Aucune tentative n'est faîte pour prendre du recul, pour tenter d'expliquer pourquoi les chansons de Piaf cheminent dans l'esprit de chacun. Il n'y a que de l'unanimisme.

    Comme dans tous les biopics modernes, la narration est forcément éclatée, partant en même temps du début et de la fin de la vie pour faire converger les lignes vers une apothéose du milieu. La vie de la Môme étant chargée d'événements dramatiques, il paraissait difficile de finir avec la tarte à la crème habituelle de la révélation finale d'un traumatisme fondateur. Et bien Dahan a quand même réussit à en placer un, il est vrai souvent ignoré (par moi en tout cas). Le film peut donc se terminer (longuement) sur cette vague émotionnelle qui nous emporte tous Tous ensemble ! Tous ensemble ! Eh ! Eh !, au son de la chanson la plus connue de Piaf (j'aurais dû parier avant la projection sur l'ordre dans lequel seraient proposés les morceaux, j'étais sûr de gagner). Pourvu que personne ne nous prépare un Jacques Brel...