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Film - Page 4

  • Brazil (Terry Gilliam, 1985)

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    Pas revu depuis très longtemps, je ne me souvenais plus que c'était aussi un excellent film de Noël. Ça reste le sommet de Gilliam, qui ne combinera plus jamais à ce point inventivité et cohérence (allez, si on veut, ça pourrait être un poil plus court que ces deux heures et quart). Et comme disait Michael Palin, c'est quand même le premier film à avoir donné son titre à un pays.

  • Affliction (Paul Schrader, 1997)

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    Constamment prenant malgré quelques scories, les brefs effets esthétisants ou encore la voix off de Willem Dafoe qui gâche un peu le (presque) dernier plan du film, magnifique, où Nick Nolte se sert un verre avec la grange en flammes au fond, voix off qui explicite alors trop ce que l'on avait très bien saisi : le film est une histoire familiale de la violence et une critique implacable de la notion de virilité. Je trouve le film assez fort dans sa façon de montrer comment la crise personnelle en vient à altérer la perception de la réalité, à partir de la longue intro décrivant le rapport de Nolte et sa petite fille puis le drame adjacent dont celui-ci va commencer à fantasmer les causes. Le lien entre les deux sphères, privée et publique, est remarquablement tissé. Excellente interprétation : Sissy Spacek retrouvée avec plaisir, Dafoe dans un beau personnage en retrait et pourtant prenant en charge le récit, James Coburn qui parvient à dépasser la composition de l'ogre monolithique et Nolte à son aise dans la dérive explosive, avec une sacrée démarche dans la neige.

  • Sirocco d'hiver (Miklos Jancso, 1969)

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    1934, des Oustachis, nationalistes croates accueillis, surveillés et instrumentalisés sur le sol hongrois, préparent un attentat contre Alexandre II de Serbie. Jancso commençait à lasser certains, allant toujours plus loin, même dans ce cadre de coproduction franco-hongroise. Passé un temps d'adaptation à l'utilisation du français, la greffe prend, Jacques Charrier et Marina Vlady (et beaucoup plus brièvement Laszlo Szabo et Michel Delahaye) trouvant rapidement leurs marques et ne déparant pas au milieu des habitués hongrois. Plus aucun plan court ici mais le tour de force de treize plans séquences, intérieurs et/ou extérieurs, menés avec virtuosité. Leur longueur, le nombre élevé de protagonistes et la volonté constante de parler politique font qu'ils peuvent glisser de l'observation comportementale à l'allégorie plus distanciée, mais l'intérêt est maintenu dans la représentation des forces en présence et des revirements (symbolisés par d'innombrables passages de main en main de revolvers et de fusils de toutes sortes). Dans un décor quasi-unique, les mouvements de caméras incessants et calculés sont justifiés par la situation du personnage principal, placé dans un endroit qu'il ne connaît pas, entouré d'hommes et de femmes dont il doit douter à chaque fois des intentions. Politiquement, c'est une alerte sur les organisations structurées pyramidalement qui entravent toute liberté personnelle et qui préfèrent créer des martyrs plutôt que s'appuyer trop longtemps sur de fortes individualités.

  • Fargo (Joel et Ethan Coen, 1996)

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    Film sur la bêtise, non pas systématique mais nuancée, graduée, étagée, allant de celle, tordante et dangereuse, prise en charge par Steve Buscemi à celle, virant au pathétique, assumée par William H. Macy. Comme c'est remarquablement écrit, les bifurcations participent aussi à l'enrichissement, tout en surprenant (les deux filles du bar, l'ancien camarade mytho, le témoin interrogé dans la rue). Cette façon de dépeindre les personnages est aussi formidablement prolongée par le traitement de l'espace, comme le prouve la séquence où Buscemi enterre la mallette, se redresse, s'aperçoit qu'avec la longueur de la clôture il ne la retrouvera jamais et plante juste son grattoir rouge dans la neige. Marge, elle, se distingue rapidement, au contraire, par son bon sens, presque un sixième sens tant elle touche juste immédiatement à chaque fois. Frances McDormand est formidable notamment dans ces instants où elle abandonne son sourire bienveillant (devenant presque "normale"), quand elle doit marquer la grande gêne (face à l'ex-copain de classe) ou le brusque énervement (face à Lundegaard qui tergiverse). Marge a donc bien les épaules pour se sortir toute seule de la plongée au cœur du Mal, telle Clarice Starling à la fin du Silence des agneaux.

  • L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford (Andrew Dominik, 2007)

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    Très beau film d'Andrew Dominik (rien vu de lui jusque-là), qui s'est donné les moyens de son ambition, avec le casting, la musique de Cave et Ellis, la photographie vraiment sublime de Roger Deakins. Grâce à l'esthétique poussée et à la narration, elliptique ou légèrement déréglée, il surprend constamment à partir d'une histoire connue, réussissant même à intéresser avec cette idée de quasi-suicide, bien rattachée aux autres, l'auto-destruction du gang, la fascination pour les grandes figures, la jalousie, la soif de gloire mêlée à la trouille. Et un traitement également intelligent de la violence, particulièrement évident lors de la séquence où Jesse James s'acharne sur le petit cousin des Ford puis peine à repartir, malade.

  • Jojo Rabbit (Taika Waititi, 2019)

    °
     
    Une comédie sur le nazisme à la manière de Wes Anderson, mais oui, quelle bonne idée !!!
    (Un détail parmi cent. Apprenons à distinguer les bons libérateurs des mauvais libérateurs : les Américains traversent le fond joyeusement et parlent d'ailleurs la même langue que celle utilisée par nos héros berlinois pendant deux heures ; les Russes aboient des ordres incompréhensibles et abattent froidement les soldats allemands y compris le SS le plus sympa)
    (Et le final dansé sur "Heroes" de Bowie, pitié...)

  • Bona (Lino Brocka, 1980)

    ***
     
    Il m'a fallu un petit temps d'adaptation pour y entrer totalement, pour me réhabituer au style de Brocka, qui expérimente encore autour d'une base de mélodrame populaire. Au bout d'un moment, la force du personnage de Bona devient celle du film, et inversement, totalement entremêlées. Par ailleurs, Brocka, tout en restant concentré sur l'héroïne et son "couple", parvient à dresser un tableau social d'une richesse incroyable en un film si court (et même ce salaud de petit acteur égoïste garde son humanité). Belle découverte, quelques années après celles de Manille et Insiang.

  • Ah, ça ira ! (Miklos Jancso, 1968)

    **
     
    1947, des étudiants des Collèges populaires investissent un établissement catholique pour débattre et rallier les élèves à la cause socialiste, sous le regard de militaires. Face aux refus, ils finissent par user de l'intimidation et de la force, avant d'être recadrés par des membres du parti qui poussent les plus radicaux à quitter l'organisation. Le film est en couleur et musical, chants très nombreux et danses, qui deviennent de plus en plus contraignantes, rondes servant finalement à encercler les opposants. Jancso filme des groupes bien définis, même s'ils peuvent se scinder. Et toujours par la seule mise en scène des mouvements (ici, donc, ceux du ballet), il montre le possible basculement dictatorial et bureaucratique des révolutions, dans un récit bouclé sur lui-même. Il avance loin dans l'allégorie, par conséquent, on cherche absolument le sens, ce à quoi renvoie ce face à face, ce chant, ce discours, ce leader, ce procès, cette exclusion... D'autant plus que les habits et certains slogans ou certaines pratiques appartiennent aux contemporaines années 60 plutôt qu'à l'immédiate après-guerre. Au-delà du tour de force, contrairement aux précédents, les idées me semblent ici trop masquer les personnages, trop les essentialiser.