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60s - Page 10

  • La Chinoise

    (Jean-Luc Godard / France / 1967)

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    Si se promener de loin en loin dans la filmographie de JLG et découvrir ses films dans le désordre le plus total au fil du temps empêche d'avoir une nette vision de son évolution, cela a toutefois l'avantage certain de recevoir par moments de véritables uppercuts. La Chinoise date de 1967. Seulement huit années sont donc passées depuis A bout de souffleet Godard a déjà tout chamboulé, comme aucun cinéaste français avant lui et certainement aucun après lui, si l'on tient compte du resserrement du séisme sur quelques années (disons 1959/1968) et de l'amplitude de l'onde de choc, ressentie jusque chez les spectateurs de l'époque ne voyant aucun de ses films.

    "Il faut confronter des idées vagues avec des images claires". Dès le trois ou quatrième plan, Godard annonce son programme, écrit sur l'un des murs de l'appartement dans lequel se déroulera la quasi-totalité de La Chinoise. Si il y a bien une chose que l'on ne peut pas reprocher au cinéaste, c'est de ne pas jouer cartes sur table. Et rarement quelqu'un aura aussi parfaitement réussi à coller à son manifeste. Dans La Chinoise, tout se ramène à cet axiome. Cinq jeunes militants parisiens marxistes-léninistes ont investi pour l'été un appartement familial, pour y peaufiner leurs réflexions, mettre à l'épreuve leur foi révolutionnaire et trouver des moyens d'action. Pourfendant l'impérialisme des grandes nations occidentales autant que le socialisme soviétique abîmé dans le stalinisme, ils font reposer leur pensée politique sur la lutte des classes et la Révolution Culturelle chinoise de Mao. Dans ce lieu clos, se succèdent discussions enflammées, exposés sur des sujets précis, lectures de discours célèbres, tentatives de théâtre révolutionnaire. Parallèlement, chacun des personnages est interviewé par un journaliste (Godard lui-même, dont on entend faiblement la voix) et revient sur son parcours et sur le pourquoi de son engagement.

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    Le montage entrechoque tout cela avec des slogans, des photos, des chansons, des cartons. L'éclatement est à nouveau total, claps à l'image et répétitions comprises. Du point de vue narratif, l'objet est déjà inouï. Le miracle est que cette distanciation (réellement brechtienne, puisque la citation est faîte littéralement), ces procédés qui poussent les acteurs à jouer un documentaire, cette accumulation d'exposés théoriques produisent tout de même de la fiction. L'expérimentation cohabite avec l'évidence d'un récit cinématographique. D'admirables comédiens parviennent à rendre crédibles et vivants des personnages qui, au départ ne dégagent qu'une curiosité idéologique. Jean-Pierre Léaud, que l'on croit connaître par coeur, étonne toujours autant par sa capacité à inventer une figure mémorable. Véronique et Yvonne, les deux femmes du groupe, sont incarnées, transfigurées, par Anne Wiazemsky et Juliet Berto, touchantes, bouleversantes. Au cours d'une séquence magnifique, Waziemsky fait croire à Léaud qu'elle ne l'aime plus en lui prouvant qu'elle peut faire deux choses à la fois. Mais la vie surgit aussi et surtout des entretiens et d'une discussion dans un train, entre Véronique et Francis Jeanson, fameux intellectuel ayant soutenu le FLN quelques années auparavant et intervenant ici dans son propre rôle. Ces échanges, ces questions posées interrogent sans cesse les militants maoïstes, mettent à jour les contradictions et pointent les propos abusifs, obligent à préciser inlassablement. Véronique et les autres défendent becs et ongles leurs positions tout en laissant passer dans leur regards, leurs hésitations, parfois, le déséquilibre et donc l'émotion.

    Comme les personnages travaillent incessamment à forger leurs arguments, cherchant dans la pensée marxiste des fondements scientifiques et donc irréfutables, Godard s'attache à éclaircir par le cinéma ces idées vagues. Dans un va et vient interrogateur, tantôt il épouse et prolonge la virulence des protagonistes, tantôt il use d'un recul contradictoire ou humoristique. En donnant autant d'importance à la foi révolutionnaire de l'une qu'à la désillusion de l'autre, il peut donner l'impression de reprendre à son compte toutes les positions et s'abîmer dans la confusion (reproche qui lui a été fait régulièrement par ses détracteurs, désarçonnés à ce moment-là, dans la deuxième moitié des années 60, par son virage idéologique vers l'extrême-gauche). Parlons plutôt d'une image de la complexité du monde, certes à mille lieues de la démarche de cinéastes plus humanistes. La Chinoise est l'exposition d'un mouvement révolutionnaire, de la théorie à l'activisme (ici terroriste). Je n'aime guère parler de prédiction d'un événement historique, tournure qui la plupart du temps débouche sur une ré-écriture fausse de l'histoire, mais force est de constater que bien des éléments qui feront Mai 68 se retrouvent dans le film.

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    Étonnement sensible vu le sujet, le film est aussi plastiquement superbe. L'utilisation de la couleur pourrait, comme celle du travelling, passer pour une affaire de morale. Cadrages et mouvements d'appareils sont d'une fluidité et d'une précision incroyables (l'alternance des plans fixes dans la discussion déjà évoquée entre Véronique et Jeanson) jusqu'à un dernier plan (annoncé par le carton : "Dernier plan du film") magnifique. Tout cela n'est pas mal pour "un film en train de se faire" (sous-titre de La Chinoise).

    Peur de passer à côté de certaines choses, de me tromper... L'envie de revoir dès maintenant, deux jours après, La Chinoise me taraude. C'est sans doute moins beau que Le mépris, moins génial que Pierrot le Fou, mais c'est le film qui me travaille le plus et le choc esthétique le plus évident parmi ceux vus ces derniers mois.

  • Une femme est une femme

    (Jean-Luc Godard / France / 1961)

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    unefemmeestunefemme.jpgTroisième long de Godard, après A bout de souffle et Le petit soldat (ce dernier sorti plus tard, suite aux problèmes que l'on sait), Une femme est une femmeest une petite chose au milieu d'oeuvres bien plus consistantes. Abordant la couleur pour la première fois, JLG annonce une comédie, parfois musicale, sous les auspices de René Clair et de Ernst Lubitsch (convoqués dans l'un de ces génériques aussi percutants que succincts dont notre homme a le secret).

    Angela, strip-teaseuse de son état, vit avec Emile. Elle veut un enfant. Aujourd'hui. Lui n'en veut pas. Pourquoi ne le ferait-elle donc pas avec le premier venu ou avec l'ami du couple, Alfred ? Il n'y a guère plus à dire de l'histoire. On suit d'abord Angela (Anna Karina et son accent si particulier) dans la rue, à sa boite de strip, au travail d'Emile (Brialy) ou en conversation avec Alfred (Belmondo). C'est la meilleure partie du film. Car ensuite, le couple s'enferme dans son appartement et n'en sort plus guère. Godard aime les scènes de ménage en chambre. L'étirement de celles d'A bout de souffle et du Méprisprovoquaient génialement. Celle qui met aux prises Karina et Brialy paraît ici bien superficielle. L'affrontement relève de l'enfantillage et la mise en scène toute en ruptures de tons nous laisse à penser que tout cela n'est finalement pas bien grave. Les personnages ont bien du mal à exister et tout ne semble tourner qu'autour du problème général et peu original de la guerre des sexes.

    Le générique nous prévenait, Godard fait une comédie. Mais si surprenantes et inventives que soient ses trouvailles (calembours, coqs à l'ânes, superpositions sonores...), nous sommes bien en peine de relever un gag particulier, hormis les blagues de bureau (on croise Marie Dubois qui est en train de lire Tirez sur le pianisteet Jeanne Moreau à laquelle Belmondo demande comment ça se passe sur Jules et Jim, Belmondo qui, ailleurs, dit qu'il aimerait bien aller voir A bout de soufflequi passe à côté...). Non, Godard n'est pas le plus drôle des cinéastes et il a même la fâcheuse habitude d'abuser des grossièretés de langage.

    Bien évidemment, et heureusement, la provocation godardienne ne se limite pas aux "Eva-te faire foutre" et autres "enfoiré". La déconstruction du récit bluffe toujours autant : bande-son extrêmement complexe et montage déstabilisant. Les meilleures séquences se déroulent dans les bars. Celle où Karina et Belmondo écoutent intégralement Tu t'laisses allerd'Aznavour est l'une des plus belles et des plus étranges. Quelques plans admirables ponctuent ainsi la fantaisie, la plupart centrés bien sûr sur Anna Karina. Mon préféré voit la caméra se substituer à Brialy et empêcher sa femme de forcer le passage jusqu'à la serrer dans un coin de l'appartement.

    Cela dit, j'ouvre mon parapluie afin de ne pas prêter le flanc aux attaques du style : "Ah Bravo ! tu préfères un Lelouch à un Godard...". Adorateurs du Maître Franco-Suisse, inutile d'affûter vos couteaux, ma prochaine note prendra la forme d'un éloge de La Chinoise.

  • Un homme et une femme

    (Claude Lelouch / France / 1966)

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    unhommeunefemme.jpgJe n'avais jamais vu Un homme et une femme. L'ensemble de la filmographie de Claude Lelouch m'est d'ailleurs inconnu. Les seules exceptions sont Itinéraire d'un enfant gâté et Il y a des jours et des lunes, vus à l'époque de leurs sorties en salles. A 16 ans, facilement impressionnable, en général on trouve ça bien Lelouch. Et souvent on abandonne ensuite, en suivant, à tort ou à raison, les conseils de contournement des critiques.

    Devant Un homme et une femme, je vois bien ce qui, en 66, gênait certains et, aujourd'hui encore, doit continuer à agacer les détracteurs du cinéaste. Lelouch, qui, avant cet énorme succès, avait connu une série d'échecs avec ses six premiers longs-métrages, utilise l'esthétique, les procédés narratifs et les techniques de la Nouvelle Vague en les lissant pour les rendre le plus acceptables possibles pour le public. Oui, en un sens, Lelouch fait un roman-photo avec le nouveau cinéma. On peut éventuellement parler d'affadissement, s'irriter du côté catalogue de la modernité (voire, avec mauvaise foi, prendre chaque plan du film et en référer tantôt à Godard, tantôt à Resnais, élargir même à Fellini ou Antonioni). Il n'empêche que c'est bien une certaine joie de faire du cinéma qui se dégage de ces longs dialogues jamais filmés ou illustrés de la même façon, c'est bien la liberté de la narration qui marque. Il est bon de rappeler que si tout le monde s'était extasié à l'époque, et à juste titre, devant telle séquence de The unbelievable truth(Hal Hartley, 1990) où une leçon de mécanique improvisée faisait office de discours amoureux, Lelouch avait fait exactement la même chose en faisant longuement parler Trintignant du bruit de son moteur en course à Anouk Aimée.

    Le cinéaste est un technicien sans faille. Il faudrait être aveugle pour ne pas admettre que jamais en France n'avaient alors été aussi bien filmées des courses automobiles, comme pour la longue séquence d'entraînement de Trintignant, entièrement couverte par les bruits de moteurs. L'histoire quant à elle est simplissime et émouvante (le couple est magnifique). Cette simplicité scénaristique sert beaucoup le film, qui évite ainsi de nous bassiner avec les grands problèmes sociaux et la philosophie de la vie, choses qui sont ailleurs beaucoup reprochées à Lelouch. Ici, nous avons plutôt des petites notations humoristiques, des bribes de cinéma direct, des apartés, des citations, bien dans l'esprit, encore une fois, de la Nouvelle Vague. Courir sur la plage, poursuivre un train en voiture, c'est cucul mais ça marche. Parfois, la vie est cucul.

    La mémoire télévisuelle, qui ressasse indéfiniment les mêmes signes sans jamais revenir à leur source, a réduit telle une tête jivaro Un homme et une femme au thème musical de Francis Lai. Celui-ci n'est pourtant que l'une des nombreuses interventions musicales qui parcourt la bande-son, jusqu'à donner l'impression d'un vrai film musical. Lelouch intègre magistralement dans son récit deux chansons de Pierre Barouh, qui pourrait se voir indépendemment comme l'un des scopitones que le cinéaste aimait tourner en début de carrière. D'autres procédés se remarquent, notamment l'usage godardien d'une musique venant en contrepoint de l'image (musique symphonique et grave sur des images qui ne le sont a priori pas...). Poussés à leur limite dans le dernier quart d'heure où se succèdent trois larges plages mélodiques, ces usages, aussi beaux soient-ils, laissent penser que Lelouch a du mal à trouver un moyen autre que musical pour boucler son voyage émotionnel. Mais cette impression de séquences qui n'en finissent pas de ne pas finir n'est pas si désagréable. Oui, tout cela est joli. Le terme n'est, pour une fois, nullement dépréciatif.

  • Double suicide à Amijima

    (Masahiro Shinoda / Japon / 1969)

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    doublesuicide.jpgQuatrième et dernier film de cette série Shinoda, où l'on voit malheureusement qu'indépendance et radicalité ne sont pas forcément synonymes d'extase. A la fin des années 60, le cinéaste avait quitté la célèbre maison de production de la Shochiku. L'une de ses premières réalisations hors-système est ce Double suicide à Amijima (Shinju ten no Amijima), tiré d'une pièce du dramaturge Monzaemon Chikamatsu, grand écrivain de théâtre de marionnettes et de kabuki de la fin du XVIIe siècle. Lassé d'oeuvrer dans des genres bien définis comme le film noir ou le film de sabre, Shinoda décida de partir dans l'expérimentation en adaptant ce récit. Le générique s'égrène au fil des préparatifs pour un spectacle de marionnettes. Dans un style documentaire, on voit s'affairer les artistes dans les coulisses : préparation des costumes et des accessoires et habillage dans des tenues entièrement noires pour les manipulateurs qui auront à se fondre dans le décor de la scène. Parmi eux, Masahiro Shinoda lui-même, en conversation téléphonique avec sa scénariste, s'inquiète de l'avancement de l'histoire et évoque quelques choix de mise en scène (que l'on découvrira effectivement plus tard).

    Le récit à proprement parler peut ensuite démarrer. C'est celui du couple illégitime que forment Jihei, un riche marchand marié à sa cousine, et Koharu, une courtisane. Amoureux fous, ils se disent prêts à mourir ensemble. Le scandale grossit et la famille vient briser les derniers espoirs de rachat de Koharu par Jihei, malgré la compréhension de sa femme. Ne reste plus alors aux amants qu'à s'enfuir pour se suicider. Toute l'introduction dans la maison de geishas poursuit la mise à distance qu'imposait le générique. Les décors sont simplifiés jusqu'à l'abstraction; dessins et écritures emplissent murs et sols (on pense beaucoup, pour prendre une référence contemporaine au Dogvillede Lars Von Trier). Les personnages peuvent d'un coup se figer, comme manipulés par le metteur en scène et les hommes en noir du théâtre sont là. Ils observent, attendent silencieusement, puis changent le décor, tendent un accessoire aux protagonistes-marionnettes qui, bien sûr, ne les voient pas. Le décalage ainsi obtenu avec le jeu très théâtral des acteurs du drame, la stylisation extrême et quelques visions érotiques fulgurantes font de cette première partie un moment très intrigant.

    Seulement, au fur et à mesure, les procédés distanciateurs s'effacent, ne laissant plus à l'écran qu'une captation de pièce somme toute assez classique. De longs plans séquences nous confinent dans deux ou trois lieux et n'offrent plus qu'un unique degré de lecture (hormis de trop brefs moments, tel ce saccage de la maison par Jihei qui devient changement de décor). Le récit se met à patiner et le spectacle des pleurs incessants, des déclarations implorantes et des atermoiements des personnages devient fatigant. La fuite du couple, si elle ne nous épargne pas non plus ces tergiversations larmoyantes, a le mérite d'élargir le cadre. Une étonnante dernière scène d'amour dans un cimetière se déroule sous les yeux d'un marionnettiste et son regard indéchiffrable dirigé vers ses créatures enlacées nous fait retrouver un instant la distanciation et le trouble de la première partie.

    Comme dans les trois autres films dont il a été question ces derniers jours, on sent derrière la caméra la présence d'un metteur en scène assez virtuose, passionné, extrêmement cultivé. Shinoda aime à gorger ses oeuvres de réflexions très poussées sur la société japonaise, l'histoire, la politique ou le théâtre. Vu d'ici et maintenant, leur complexité en est parfois rebutante. Il me semble que c'est lorsque le discours du cinéaste ne surplombe pas tout, mais qu'il se diffuse simplement au travers d'un scénario de genre, que la réussite est au bout du chemin (soit, indéniablement : Fleur pâle et La guerre des espions).

  • La guerre des espions

    (Masahiro Shinoda / Japon / 1965)

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    guerrespions.jpgTroisième temps de mon périple chez Masahiro Shinoda. Si Assassinat ployait quelque peu sous le poids de la politique, La guerre des espions (Ibun Sarutobi Sasuke) doit sa réussite au fait qu'il soit d'abord une enthousiasmante variation sur un genre avant de distiller ses réflexions.

    Nous voilà en 1614. deux grands seigneurs se disputent le pouvoir sur le Japon. La période n'est pas à la guerre mais la recherche d'informations et les complots sont continuellement orchestrés de chaque côté, par l'intermédiaire d'espions redoutables : les ninjas. Cette lutte nous est montrée du point de vue de Sarutobi Sasuke, ninja dont le seigneur, Sanada, n'a pas encore choisi son camp, préférant attendre en envoyant aux quatre coins du pays ses informateurs.

    La quantité de noms entendus et de nouveaux personnages arrivant au fil du récit demande encore une fois une attention très soutenue. Mais ici, même le héros semble par moments totalement dépassé. Il prend en fait part à la traque d'un homme, un nommé Noriji, espion que tous veulent retrouver et que l'on ne découvrira pas avant le dénouement. Peinture d'un monde tirant vers l'absurde à force de revirements et recherche d'un Saint Graal : les thèmes croisent ceux du roman noir américain. Dans un bonus du dvd, Shinoda évoque l'admiration que l'auteur du roman original portait à Hammett et Chandler. Sarutobi Sasuke, interprété par un Koji Takahashi au visage anguleux, est le personnage le plus attachant des trois oeuvres de Shinoda dont je vous ai entretenu jusqu'à présent. Certainement parce qu'on le voit évoluer tout au long du film, ballotté entre un désir de retrait inculqué par son maître, hostile à la guerre, et une volonté d'engagement dans une cause qu'il croit juste, pour finir par ne se laisser guider que par l'amour. En parallèle, sont dressés deux beaux portraits de femmes, qui, malgré leur condition, ne véhiculent pas de thématique sacrificielle et n'appellent à aucun apitoiement.

    Je l'ai dit plus haut, La guerre des espions est un parfait film de genre, un film de ninjas (ne manquent même pas les fameuses étoiles aux effets dévastateurs). Les nombreux combats font preuve d'une grande inventivité. La séquence de l'évasion en particulier, qui est composée admirablement : l'affrontement de Sasuke avec les gardes est masqué d'abord par l'ombre de l'héroïne qui se redresse pour s'échapper, puis par une bougie et se poursuit, toujours en travaillant la profondeur de champ, par un travelling latéral le long d'une palissade aux parois tantôt détruites, tantôt intactes. Plus tard, un combat important démarre de façon réaliste pendant une fête populaire nocturne mais se poursuit dans l'abstraction totale d'un paysage désert et ensoleillé. Shinoda n'est ainsi pas avare en surprises. Les apparitions et disparitions de ses personnages sont saisissantes. Lors d'une sublime séquence de bain, trois comparses pittoresques dialoguent avec Sasuke, alors qu'au premier plan, arrive vers lui, dans l'eau fumante, très lentement, une femme inconnue, qui finit par lui susurrer qu'elle lui donnera plus tard un rendez-vous pour des informations. Dans l'autre sens, l'effet de surprise peut être le même. Sasuke affronte Sakon, ninja blanc virevoltant, venu le jauger dans sa chambre d'auberge. Ce dernier s'éclipse en lançant cette phrase : "Au fait, il y a une femme morte à côté". Et effectivement...

    Shinoda déplace ses ninjas, blancs ou noirs, en jouant magnifiquement des sources lumineuses. Dans les décors cloisonnés autant que dans les clairières ou les forêt, sa mise en scène ravit, qu'elle se concentre sur une balade amoureuse ou sur un combat. Beaucoup de plaisir, donc.

  • Assassinat

    (Masahiro Shinoda / Japon / 1964)

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    assassinat.jpgDeuxième étape de ma visite chez Masahiro Shinoda : Assassinat (Ansatsu).

    A la fin du XIXe siècle, dans la peur d'une invasion étrangère, le Japon connut une série de soubresauts menant le pays au bord de la guerre civile. Le pouvoir était partagé par deux représentants : d'un côté l'Empereur et sa cour à Kyoto, de l'autre, le Shogun (le "Général") soutenu par les militaires. Ce titre de Shogun avait fini par se transmettre de façon héréditaire et il ne disparut qu'avec la restauration Meiji en 1868 qui redonnait l'entier pouvoir à l'Empereur.

    Merci Wikipédia pour ces bases historiques. Et merci aussi la jaquette du dvd et les cartons introductifs. Car Assassinat, sous son habillage de film de sabre, est une oeuvre politique d'une grande complexité pour qui n'est pas familier avec l'histoire du Japon féodal. L'intrigue principale se situe en 1863. Le samouraï Hachiro Kiyokawa, nationaliste combattant le Shogun (accusé de faiblesse face à l'étranger), est arrêté et cependant gracié par ce dernier, qui lui propose de former une garde chargée de rétablir l'ordre dans la région. Kiyokawa accepte, allant jusqu'à éliminer d'anciens camarades révolutionnaires. Au bout d'une longue marche avec sa petite armée, il finit par dévoiler son double jeu, retournant, avec l'assentiment de l'Empereur, les hommes engagés à ses côtés par le Shogun. Tout cela pour conquérir lui aussi une parcelle de pouvoir.

    Les intrigues politiques sont aussi compliquées que le personnage de Kiyokawa est impénétrable. Shinoda livre ici une réflexion sur le pouvoir très pessimiste, proche du nihilisme. Dans la première moitié du film, tout en posant les enjeux politiques, le cinéaste lance une enquête sur la personnalité du samouraï. Par l'intermédiaire de l'un des hommes du Shogun, chargé de surveiller et d'éliminer, quand il le faudra, Kiyokawa, nous naviguons au gré des rencontres et des souvenirs de chacun, de flashbacks en flashbacks. Ses combats, ses amours : des bribes d'informations sont lâchées. Mais le puzzle reste incomplet, l'homme insaisissable.

    Le genre appelle le hiératisme, seulement, l'enquête provoque surtout des bavardages et une répétition lassante, chacun y allant de son anecdote. Toujours très soigné, le travail sur l'image se double de sauts temporels et de récits dans le récit qui, si ils forcent l'admiration, nous laissent souvent complètement perdus dans cette histoire. Cette construction à tiroirs s'arrête à mi-film. Le cours chronologique des choses reprend et notre intérêt avec. Shinoda orchestre quelques combats de sabre violents et réalistes, sans excès musical ou sonore et on suit jusqu'au bout la montée et la chute inévitable de son protagoniste, héros parfaitement impénétrable. En nous montrant le parcours de ce manipulateur extrémiste, l'auteur brosse le tableau noir d'une époque charnière tout en tendant un miroir à la société japonaise contemporaine. Mais pour ma part, il me manque bien trop de clefs pour pouvoir apprécier à sa juste valeur la perspicacité de ce regard.

  • Fleur pâle

    (Masahiro Shinoda / Japon / 1964)

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    fleurpale.jpgPlaisir de la découverte. Voici la première des quatre galettes d'un coffret dvd consacré au cinéaste japonais Masahiro Shinoda, qui m'était jusque là parfaitement inconnu. L'homme, né en 1931 et ayant signé en 2003 son trente-deuxième long-métrage, a débuté en 1960, soit au moment où le cinéma mondial commençait à bouger dans tous les sens. Shinoda appartient donc à la Nouvelle Vague japonaise et Fleur pâle (Kawaita hana) prend place dans ce mouvement grâce à, au moins, deux caractéristiques : un fort sentiment de vie rendu par le plaisir communicatif de filmer les rues et, conjointement, un désir d'expérimentation esthétique.

    Muraki retrouve Tokyo après avoir passé trois années en prison et reprend sa place au sein de son clan de yakuzas. Il trouve que rien n'a vraiment changé, quoi qu'en disent ses compagnons (qui eux voient bien que les luttes d'antan laissent petit à petit la place aux alliances à visées économiques). Passée une période de transition relativement calme, Muraki se porte volontaire pour remplir un nouveau contrat qui doit inévitablement le reconduire en prison. Mais comme son titre l'indique (d'autant plus qu'il s'inscrit à l'écran, au bout de plusieurs minutes, sous le visage indéchiffrable d'une belle jeune femme), Fleur pâlen'a pas grand chose à voir avec un film de yakuzas classique. En effet, dès qu'il remet les pieds dans son tripot favori, Muraki croise le regard de Saeko, flambeuse diaphane, fille riche, venue d'on ne sait où pour se mêler aux joueurs clandestins.

    Nous avons alors, en parallèle, la description des activités du clan et le développement de la relation entre Muraki et Saeda. Les deux lignes narratives ne convergent que pour se rejoindre à la toute fin, lorsque le héros proposera à son étrange amatrice de sensations fortes l'expérience ultime, plus grisante encore que le jeu ou la drogue : le spectacle d'un meurtre. Ce dénouement sera bien le seul moment de représentation de la violence engendrée par les yakuzas, et encore, la manière en est opératique et donc déréalisée. Comme Kitano plus tard, Shinoda aborde le genre par des chemins de traverse.

    Dans un noir et blanc contrasté, le style est vif et heurté, à l'image de l'époque. Très morcelées au début, les séquences peuvent très bien par la suite tenir en un seul plan. S'ajoutent à cela des ellipses intrigantes : le personnage du yakuza drogué, pièce essentielle de la dernière partie, restera constamment hors-champ ou à peine cadré à la volée, au fond d'une pièce ou à l'angle d'une rue mal éclairée. Les règles des jeux de cartes sont incompréhensibles, mais les nombreuses scènes s'y rapportant sont assez fascinantes par les regards qui se croisent et qui semblent tous converger vers la seule femme se joignant à ces assemblées de noctambules. L'architecture japonaise, avec ses panneaux coulissants, rend comme toujours un grand service à la mise en scène : surcadrages, obturations et découpages géométriques abondent.

    Depuis au moins Boulevard du crépuscule, nous avons souvent l'impression qu'un récit entamé par une voix-off l'est depuis l'au-delà. Les propos introductifs de Muraki ne font pas exception, avec leur pessimisme et leur ton morbide. Selon notre yakuza, l'homme est un animal qui s'agite en vain. Shinoda nous enjoint donc à observer l'espèce à distance. Prises sur le vif, les scènes de rue ou d'hippodrome isolent Muraki au téléobjectif. Il ne se fond pas dans la masse. Il est ici aussi seul que lorsqu'il arpente le soir venu les ruelles désertes le menant d'hôtels en tripots. Muraki n'est pas une marionnette : personne ne tire les fils (son boss, après l'acceptation du contrat, lui répète pendant plusieurs jours "Prends ton temps..."). Il est bien un insecte qui fait ce qu'il a toujours fait, à peine bousculé par une histoire qui pourrait ressembler à de l'amour, mais qui garde de toute manière, jusqu'au bout, son mystère entier.

  • La chute de la Maison Usher

    (Roger Corman / Etats-Unis / 1960)

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    1403213053.jpgVoici ma première rencontre, longtemps attendue, avec Roger Corman. Ses propres films étant peu diffusés, son nom semble aujourd'hui évoquer plus un type de production et un statut de "parrain" de jeunes talents qui débutèrent chez lui (Scorsese, Coppola, Hellman, Demme, Dante...) qu'une oeuvre de cinéaste. Celle-ci est pourtant pléthorique, comptant plus de cinquante longs-métrages de 1955 à 1971 (puis plus une seule mise en scène jusqu'à un Frankenstein, en 1990). Comme l'ensemble de ses productions, l'éclectisme caractérise ces films : westerns, policiers, musicals. Toutefois, sa réputation s'est faîte essentiellement sur le fantastique. Sur ce point, parmi bien d'autres, son aventure peut se comparer à celle des productions Hammer qui faisaient dans le même temps les beaux jours du cinéma britannique.

    La chute de la Maison Usher (House of Usher) est la première d'une longue série d'adaptations d'Edgar Poe (suivront en particulier : Le puits et le pendule, L'enterrement prématuré, Le corbeau, Le masque de la mort rouge, La tombe de Ligeia... titres qui font rêver). La totalité du film se déroule dans la demeure des Usher. Le jeune Philip Winthrop vient y chercher Madeline, qu'il a connu à Boston et avec qui il doit se marier. Mais Madeline semble sous l'emprise de son frère Roderick. Tous deux se disent victimes d'une malédiction pesant sur tous les membres de la famille Usher et les contraignant à attendre la mort dans leur château. Philip, refusant toute idée de demeure ou de lignée maléfique, cherche donc à quitter l'endroit avec Madeline.

    La première qualité du film est picturale. De très beaux mouvements d'appareil nous accompagnent dans la découverte de ce funeste endroit. Corman place dans son décor des tentures, costumes ou verres d'un rouge éclatant, comme autant de lacérations du cadre. L'apparition soudaine de Roderick avec sa veste écarlate en est la première manifestation et des ongles ensanglantés en sont l'une des dernières, en toute logique. La maison des Usher est vivante et nous le sentons parfaitement.

    Avec le domestique, seuls quatre personnages prennent part au récit (si l'on excepte le cauchemar de Philip dans lequel une assemblée vampirique me fit penser à la fois aux morts-vivants de Romero et à la cérémonie de Rosemary's baby). Le jeune premier, Mark Damon, a un physique original mais son jeu l'est moins. Madeline est interprétée par Myrna Fahey, qui finit mal en point mais en nuisette bien sûr, ce qui est très bien. Vincent Price, impérial, n'a donc aucun mal à dominer l'ensemble, lui qui, dans toute la première partie, se retient magnifiquement, ne laissant que son sourcil se mettre de temps à autre en accent circonflexe.

    Corman et son scénariste (Richard Matheson) ont eu l'intelligence de laisser la porte ouverte à plusieurs interprétations des faits : l'explication surnaturelle, la folie contagieuse ou la simple manipulation. Malheureusement, le dénouement, si satisfaisant par son pessimisme, ne convainc pas vraiment en terme de mise en scène. Ici, Corman, faute de moyens, n'arrive pas à trouver le moyen détourné de faire ressentir l'ampleur de la catastrophe, alors qu'il avait jusque là plutôt bien réussi à filmer les prémisses de la terreur.

  • El Perdido

    (Robert Aldrich / Etats-Unis / 1961)

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    1207096873.jpgUn bon Aldrich, auquel le scénario de Dalton Trumbo donne un air de tragédie classique. Bren O'Malley (Kirk Douglas) arrive dans le ranch mexicain de son ancienne maîtresse Belle Breckenridge (Dorothy Malone), mariée à un éleveur qui a déjà un pied dans la tombe (Joseph Cotten). O'Malley est poursuivi depuis la frontière par Stribling (Rock Hudson) qui veut le livrer à la justice pour le meurtre de son beau-frère et la mort indirecte de sa soeur. Ils se retrouvent et, suite à leur embauche par Breckenridge pour convoyer, tous ensemble, ses 1000 têtes de bétail jusqu'au Texas, ils passent un accord : une fois passés en Amérique, ils régleront leurs comptes. Aux dangers extérieurs attendus (bandits, indiens...) pendant le périple, s'ajoute la complication des relations dans le petit groupe qui inclut Belle et sa fille Melissa (Carol Lynley), autour desquelles tournent les deux hommes. Leur estime mutuelle naissante n'empêchera pas l'affrontement final au coucher du soleil.

    On le voit, El Perdido (The last sunset) met tout de suite en place des enjeux dramatiques très forts, portés par des personnages au lourd passé (enjeux auxquels viendra s'ajouter un autre dilemme sur la fin, dont je ne dirai rien sinon qu'il pousse O'Malley dans une voie sans issue). Pour certains spectateurs, l'accumulation peut gêner et faire prendre à quelques ingrédients la couleur du cliché (comme l'a ressenti ma voisine de canapé). Mais c'est qu'en ces temps-là, ma bonne dame, la vie était rude, les expressions directes et les passions exacerbées. La réussite du film tient essentiellement dans la capacité qu'a Aldrich d'inscrire et de prolonger ces éléments purement scénaristiques dans sa mise en scène. Il fait preuve dans El Perdido, du générique du début jusqu'au dernier plan où "The end" s'inscrit dans un coin de l'écran, d'un sens de la composition confondant. Sa science de l'espace et la façon qu'il a de placer ses comédiens dans le plan impressionnent : lignes de fuite, visages en enfilade ou côte à côte (surtout ceux de Malone et Lynley, mère et fille très crédibles). La circulation ne cesse de se faire entre chaque personnage, par duo, trio ou quatuor, mais plus que la ronde, c'est plutôt la ligne droite qui soutient la construction visuelle de ce film basé sur un trajet : dans la séquence de l'attaque redoutée des indiens, les chariots sont regroupés au centre du troupeau, mais au lieu d'avoir l'encerclement habituel, nous avons deux files d'assaillants qui fendent le groupe de bovins pour en prélever une partie, compensation qui évite l'affrontement.

    Les rôles sont distribués sans surprise mais très efficacement. Kirk Douglas, par son jeu au bord du cabotinage, est un tueur-poète idéal. Rock Hudson, qui n'est pas le plus fin ni le plus vif des acteurs fait un cow-boy frustre très acceptable (qui n'attend pas que le corps de Breckenridge soit refroidi pour dire à Belle qu'il veut l'épouser). Dorothy Malone fait passer par ses grands yeux bleus et ronds toutes les fêlures possibles de la vie et Carol Lynley a de charmants airs de Sue Lyon ou Caroll Baker. Morceau de bravoure du film, le duel final annonce Leone. Son étirement, son montage de plus en plus court, ses brusques variations d'échelles de plans et l'escamotage du tir décisif, qui prolonge le suspense en différant de plusieurs secondes la révélation à nos yeux du résultat, tous ces effets ne sont pas indignes des meilleurs moments du grand Sergio.

  • La marche sur Rome

    (Dino Risi / Italie / 1963)

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    1552413056.jpgJean-Paul Rappeneau a raconté à la radio, il y a quelque temps, une anecdote intéressante. Ayant terminé La vie de château, il avait assisté à une projection de son film en compagnie de l'un des grands spécialistes de la comédie italienne (je ne me rappelle plus si il s'agit de Risi, Monicelli ou Comencini). Tout heureux d'avoir si bien réussi son coup, il demanda son avis à l'italien. Celui-ci finit par répondre à peu près ceci : "Oui, c'est pas mal, mais chez nous, les comédies à partir d'événements historiques importants, on fait ça depuis longtemps."

    La marche sur Rome (La marcia su Roma) est réalisé par Dino Risi entre Une vie difficile et Le fanfaron. Moins abouti que les deux oeuvres qui l'encadrent, le film prouve au moins, une nouvelle fois, à quel point les cinéastes italiens de l'époque étaient gonflés dans leurs choix de sujets. On suit ici les pérégrinations de Domenico Rocchetti et d'Umberto Gavazza, anciens combattants qui, peu après la première guerre mondiale, se joignent au mouvement fasciste. Ils prennent part à la célèbre marche sur Rome d'Octobre 1922, dont le but était de faire pression sur le Roi d'Italie afin qu'il fasse appel à Mussolini pour former un gouvernement. Cette marche, organisée en réaction à une défaite électorale, est d'abord traitée dans la franche rigolade. Risi (et ses nombreux scénaristes, parmi lesquels Scola, Age et Scarpelli) fait de ces fascistes des clowns. Si l'optique peut toujours se discuter, il faut souligner cependant que le comique traduit aussi une justesse de réflexion et d'analyse des auteurs quant aux mécanismes d'enrôlement, à la nostalgie de la guerre qu'éprouve les soldats rendus à la vie civile et à la rancoeur des paysans sans terre. Les gags ne sont pas toujours d'une extrême finesse mais le duo Gassman-Tognazzi, réuni pour la première fois, est déjà efficace.

    Umberto (Tognazzi), plus lucide que Domenico, raye une à une les lignes du programme fasciste au fur et à mesure que les promesses lui semblent bafouées au cours de leur périple. Par moments, la vision se noircit. Le rire se coince quand arrivent quelques plans rendant compte de l'avancée vers Rome : on voit les fascistes se regroupant et convergeant de plus en plus nombreux. Une fois mise à jour la faiblesse du gouvernement en place qui les laisse passer, les défilés-démonstrations de force dans la capitale sont tirés de documents d'archives. Risi termine alors son film sur une idée dévastatrice. Sur d'authentiques images du Roi et d'un amiral conversant sur un balcon, il plaque ce dialogue : "- Que pensez-vous de ces fascistes ? - Ce sont des gens sérieux, nous pouvons leur laisser un peu de pouvoir - Oui, essayons pendant quelques mois."