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Nightswimming - Page 9

  • Horizon, chapitre 1 (Kevin Costner, 2024)

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    Un geste d'une telle ampleur mérite non seulement le respect mais la vision sur grand écran. Le western, Costner sait y faire, et ne comptez pas sur lui pour moderniser bêtement, pour céder aux effets spéciaux ou pour rigoler de la violence. Ici, l'espace, le vrai, est embrassé en majesté. Les personnages et les lieux sont nombreux, les lignes sont parallèles, croisées ou brisées. Les sentiments n'empêchent pas les pertes douloureuses. La figure héroïque met une heure avant d'apparaître. Trois heures de classicisme cinématographique, dans l'immensité de la Frontière et aux racines problématiques de l'Amérique. Et déjà plusieurs scènes marquantes. A suivre, forcément.

  • The Bikeriders (Jeff Nichols, 2024)

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    Jeff Nichols veut réaliser son "Equipée sauvage", comme son personnage Johnny veut ressembler à Marlon Brando. Mais 10 ans ont passé et les années 70 approchent, bien plus sombres. Le romantisme du rebelle sans cause est mis en péril, la bande vire au gang, la petite délinquance au crime, le noyau dur est éclaté. Nichols filme sereinement et classiquement, à la fois la violence des comportements et les rapports plus subtils. Construit du point de vue de la femme-témoin, c'est du solide.

  • Parasite (Bong Joon-ho, 2019)

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    Toujours aussi étonnante cette césure, cette faille qui s'ouvre d'un seul coup à l'exact milieu du film et qui engloutit tout le reste sans espoir de remontée, comme ces images spectaculaires d'affaissements de terrain, d'énormes trous, qu'on voit de temps en temps aux infos. (et puis aussi, bien sûr, ce renouvellement rigoureux, par la mise en scène/mise en espace, du thème du sous-sol, en croisant son usage horrifique et sa signification sociale)

  • Supervixens (Russ Meyer, 1975)

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    C'est si éclaté, si excessif, si parodique, si arbitraire, le montage est si rapide, le mixage si bruyant (la musique, qui force l'ambiance et qui appuie tous les effets, devient un peu assommante), les cadrages si expressifs, qu'il est difficile d'y voir autre chose qu'un cartoon, même si c'est un cliché (de Russ Meyer, je n'avais vu que Faster Pussycat...). C'est un univers parallèle, avec un héros qui voit non pas le monde s'accorder à ses désirs mais les devancer, les dépasser, ce qui le désarçonne complètement. Ces femmes délurées et déshabillées, ce devrait être le paradis mais ça vire toujours pour lui au cauchemar. La dernière partie est d'ailleurs franchement onirique, faite de réapparitions et riche en images absurdes. Je dois débarquer en faisant maintenant le lien, mais : un flic taré, du gore, des espaces vides, des angles bizarres, l'enseigne d'un commerce paumé, une même actrice pour deux personnages, une progression par sauts, une discussion sur une route, du déraillement de réalité... Supervixens, c'est un film de Quentin Dupieux... avec beaucoup plus de sexe.

  • Bienvenue à Zombieland (Ruben Fleischer, 2009)

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    On profite 30 secondes de l'une des plus belles chansons du monde, le Oh ! Sweet Nuthin' du Velvet, et 5 minutes d'une participation un peu amusante de Bill Murray dans son propre rôle. Mais le scénario est débile, le récit est conduit n'importe comment, après 10 premières minutes bien gores ça devient quasi-familial, l'excès de hard rock se veut subversif, la grossièreté du dialogue tente de dissimuler le puritanisme, le casting alléchant passe à travers (Woody Harrelson, Jesse Eisenberg, Emma Stone), le second degré permanent empêche tout attachement aux personnages, et enfin, le dégommage des zombies, sans beaucoup de risque, devient un jeu dont la violence tarantinesque ne parvient pas à masquer un fétichisme des armes puant.

  • In Water (Hong Sang-soo, 2023)

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    Je craignais un peu la mauvaise idée de dispositif, à tort car c'est, à mon sens (sans avoir tout vu), paradoxalement, l'un des HSS les mieux tenus et l'un des plus stimulants esthétiquement. Notamment parce que le flou est utilisé avec de nombreuses variantes, et pas pour la totalité des plans (de plus, ça dure à peine une heure, pas le temps de se lasser). Surtout, l'idée a priori saugrenue "fait sens" (comme le dit l'actrice à propos d'une autre chose, mais pas si éloignée ; le côté "méta" du film est d'ailleurs agréablement simple et direct). Et elle fait sens à plusieurs niveaux : la concentration sur les sons et les paroles, l'humour des détails que seuls les personnages distinguent, le flottement des intentions, la difficulté à accéder au monde extérieur, la séparation sociale des espaces (les touristes et la femme qui nettoie), l'évocation de fantômes, la disparition finale, etc.

  • Rachel se marie (Jonathan Demme, 2008)

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    Toujours partant pour découvrir les quelques Jonathan Demme que je n'ai pas pu voir à leur époque, je ne m'attendais pas à cette imitation tardive du Dogme95, dix ans après Festen, avec caméra portée, cadrages volontairement imparfaits, musique diégétique, phrases et mouvements coupés en plein milieu... La mention d'Altman au générique de fin ne peut être qu'une preuve d'admiration générale, non un remerciement pour l'inspiration venant d'Un mariage tant les divergences sont grandes : ici, le rituel n'est jamais remis en question, le vernis des convenances ne craque que provisoirement pour ouvrir sur de la psychologie lourde, la choralité n'est qu'apparente, les personnages n'ayant clairement pas tous les mêmes chances d'orienter le récit. Dans ce cadre bourgeois démocrate, cultivé et métissé, les préparatifs sont d'un ennui total, le premier repas est un sommet de gêne avec des interventions pathétiques, la remontée du passé traumatisant entraîne dans un psychodrame interminable, la cérémonie et la fête apaisent les tensions à force de petites larmes et de gros câlins. Même l'amour de Demme pour la musique lui joue des tours. On se sent aussi inutile que dans un mariage où l'on ne connaîtrait personne parmi des gens surjouant l'enthousiasme festif. Grande déception.

  • La Maison de Frankenstein (Erle C. Kenton, 1944)

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    Je ne retiens que cinq minutes de fascination vampirique en jeux d'ombres et de lumière (John Carradine et Anne Gwynne) d'un film de série correctement réalisé mais pas très bien interprété (Boris Karloff et Lon Chaney Jr. en haut de l'affiche) et surtout au scénario abracadabrantesque. Un savant, adepte des théories de Frankenstein et ayant pour serviteur un bossu, redonne vie à Dracula (mais celui-ci est vite grillé au soleil). Il rencontre ensuite une bohémienne, le loup-garou et le monstre de son idole. A la fin, tout le monde s'entre-tue. J'avais récupéré ça après avoir lu l'historique "Premier Plan - Frankenstein" de JP Bouyxou qui le présente comme un grand film surréaliste mais c'est un peu too much pour moi.

  • Finding Fela! (Alex Gibney, 2014)

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    En prolongement de mon défrichage récent et bien trop tardif de l'ébouriffante discographie de Fela Kuti, ce doc américain qui ne pâtit pas trop du format conventionnel grâce à la densité du sujet et le doublement de la durée habituelle (2h). Son principal défaut est de se servir comme squelette d'une comédie musicale montée à Broadway en 2009, en hommage au musicien. Sans doute à cause de la rareté des archives. On y revient beaucoup trop souvent pour ne pas sentir le poids du deal promotionnel. Cela permet cependant de poser la question "comment parler de Fela aujourd'hui ?" (et encore, c'était il y a 10 ans), puisqu'il faut aussi évoquer l'herbe fumée sans discontinuer, le "harem" de jeunes femmes dans lequel piocher chaque jour, le courage politique jusqu'à l'inconscience, le spiritisme jusqu'à la folie, le déni du SIDA... Finalement, le tableau est assez complet, y compris sur le contexte nigérian (ah, ces américains qui vous balancent sans prévenir dans leur film un plan d’exécution par balle pour parler de la guerre du Biafra...). Et sur la musique, principale attente, grâce à la durée et la qualité des intervenants (Tony Allen notamment), c'est assez bien creusé. Amusant tout de même que tout le monde insiste sur la longueur des morceaux de Fela, en exagérant d'ailleurs à chaque fois en parlant de 25 ou 45 minutes (alors que tous les extraordinaires morceaux des années 70 tiennent entre 8 et 15), dans ce documentaire qui moque la frilosité des radios américaines réclamant des extraits de 3 minutes mais qui ne se résout à aucun moment à conserver une continuité musicale et visuelle de plus de quelques secondes. Intéressant donc, mais ne relayant qu'imparfaitement la force de ce groove unique et de ces variations irrésistibles.

  • Manon (Henri-Georges Clouzot, 1949)

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    Découverte de ce drôle de film pour lequel Clouzot passe hardiment de genre en genre : guerre, comédie de mœurs, drame romantique, crime, pour finir en western et en quasi-film surréaliste d'amour fou. On ne sait pas sur quel pied danser, d'autant que ce personnage de Manon est pathologiquement changeant et que cela provoque constamment des envolées, des éclats et des cassures à l'intérieur même des séquences. Heureusement, dans le monde noir de Clouzot, ces façons tranchantes de faire (et d'être) provoquent une belle somme de contradictions plutôt que des effets manichéens.