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france - Page 15

  • Le trio infernal

    (Francis Girod / France / 1974)

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    trioinf.jpgLe trio infernal, premier film de Francis Girod, est inspiré d'un sordide fait divers de l'entre-deux-guerres. Le notable Georges Sarret, rencontre les deux soeurs Schmidt : Philomène et Catherine, belles, d'origines allemandes et avides d'argent. Le ménage à trois se forme. Les femmes se marient avec des vieillard et l'homme monte les escroqueries à l'assurance vie qui portent leurs fruits à la mort rapide des maris. Cette première partie, plutôt enlevée, est une satire de la bourgeoisie provinciale. La respectabilité est synonyme de ridicule ou de monstruosité cachée. Au-delà d'une esthétique rétro guère renouvelée (mais Resnais lui-même, avec Stavisky, n'avait pas totalement réussi à la dépasser), l'humour noir et les audaces sexuelles propres à l'époque tirent vers la farce. La peinture grinçante évoque Chabrol, le trio, les uniformes, la cruauté, renvoient aux Folies de femmesde Stroheim. Georges et Philomène, c'est le couple de vedettes Romy Schneider et Michel Piccoli, utilisé à contre-emploi. Ce dernier est assez impressionnant dans le registre du clown réactionnaire et dépravé. La troisième est la découverte Mascha Gonska qui montre bien plus que ses charmes physiques.

    Tout aussi bien mis en valeur sont les seconds rôles notamment Philippe Brizard et Andréa Ferréol. C'est avec eux que débute le second mouvement du film et premier virage à 180°. Chambon (Brizard) est associé aux magouilles de Sarret. Le fait que lui et sa femme soient riches les désignent comme les prochaines victimes du trio. Alors que le parcours était jusque là borné par des morts certes accélérées mais naturelles, le meurtre prémédité prend maintenant la place. Francis Girod se passe alors quasiment de dialogues, étire ses séquences et pousse ses acteurs dans leurs retranchements physiques et nerveux. La violence éclate soudain dans toute sa brutalité et surtout l'immédiat après-meurtre (nettoyage et élimination des corps) est enregistré longuement et froidement. Ici, dans ces mares de sang, sanglée dans son tablier de boucher, Romy Schneider a des regards qui en disent long sur le palier franchi dans la folie furieuse. Cette sidération, Girod l'atténue malheureusement ensuite, quand lors des allers-retours destinés à vider l'infâme baignoire de ses restes, il fait passer doucement le malaise par des pointes d'humour (les chutes dans l'escalier, les masques à gaz) et le désamorce.

    Après l'horreur, les magouilles continuent. Le trio jette son dévolu sur une orpheline malade, recueillie pour prendre l'identité de Catherine et mourir à sa place. Le film change à nouveau de ton et de rythme. Plus léchée, plus travaillée, cette partie est la moins captivante. La mise en scène du dénouement, de par la position des personnages et le décor, donne la clé : il s'agissait de finir comme sur une scène de théâtre.

    Les ruptures de tons et l'indécision du rythme font l'intérêt et la limite du Trio infernal, qui se trouve finalement déséquilibré par les deux ou trois longues et fortes scènes de la partie centrale du récit. Sans aller trop loin, le film bouscule tout de même assez les conventions pour se faire attachant.

  • Tumultes

    (Robert Siodmak / France - Allemagne / 1932)

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    tumultes.jpgRalph Schwartz est un bon gars un peu brute, un voyou qui en impose tout en sachant mettre tout le monde dans sa poche par sa gouaille naturelle. Grâce à sa bonne conduite, il sort plus tôt que prévu de taule, où il a passé deux ans comme en colonie de vacances. Il court retrouver sa donzelle Ania. Elle est surprise mais heureuse. Elle pense un peu trop à la bagatelle alors que Ralph doit ouvrir tout son courrier. Elle lui fout du rouge à lèvres sur la joue. Faut pas pousser : Ralph lui en colle une. Quelque chose nous dit qu'elle l'a bien méritée. Les potes qui s'ramènent, ça détend l'atmosphère. Alors qu'on n'attend pas pour mettre au jus Ralph du casse à venir, Ania parle en douce à Gustave, son amant, "photographe d'art" (pour qui elle a posé nue, la garce). Le manège éveille les soupçons de Willy, le jeune garçon (d'une bonne trentaine d'années), que Ralph a été sortir de maison de correction (dette d'honneur). Doit-il tout balancer à son protecteur ? Il ne tient pas longtemps et c'est le drame : Gustave finit éclaté dans la mare. Ralph en colle une autre à Ania, mais cède à nouveau devant ses appâts, avant de s'enfuir pour pas se faire choper par les flics. Mais elle le trahit encore, et doublement même : elle le donne à la police et met le grappin sur Willy. Retour en taule pour Ralph. Il faut qu'il se fasse la malle pour se venger. Le différend se règle à coups de couteau et de poings, entre vrais hommes. Les deux se relèvent tant bien que mal. Ralph laisse volontiers cette grue à Willy, en lui souhaitant bon courage pour les années à venir. Au bon commissaire, il dit qu'il préfère encore la taule à toutes ces saloperies.

    Tumultes (Sturme der Leidenschaftpour les Allemands, selon la pratique de l'époque des doubles versions) est un bien mauvais film de Robert Siodmak, cinéaste cosmopolite par la force des choses (le nazisme le poussa à quitter l'Allemagne pour la France, puis l'Amérique) et auteur inégal parfois capable du meilleur (Les hommes le dimanche, Les tueurs, Les SS frappent la nuit). Ce drame criminel accumule tous les défauts possibles des oeuvres du début du parlant : des personnages univoques, des bons mots popus à chaque phrase, du théâtre, une interprétation appuyée, une profonde misogynie. Le cabotinage est la règle. Charles Boyer, dans le rôle de Ralph, est mauvais comme un pou. Florelle (Ania) lui donne la réplique en jetant de temps en temps quelques rapides coups d'oeil à la caméra (?!?). Une scène de hold-up totalement invraisemblable fait penser à celle du Pigeonalors qu'elle se veut sérieuse. Dans cet océan de clichés sur le petit monde des voyous des faubourgs, on pourrait mettre à l'actif de Siodmak quelques beaux travellings, une bagarre nerveuse filmée de manière expressionniste, une brève tentative de caméra subjective (mais annulée par le plan suivant, des plus banals, nous révélant l'identité du personnage dont on a épousé tout à coup la vision), une fulgurance érotique à la Louise Brooks - GW Pabst (quand Ania offre sa gorge, tête renversée, à Ralph), mais tous ces éléments ne raccordent jamais et accusent le statisme du reste. L'ensemble est d'un ennui à peu près total.

  • La Chinoise

    (Jean-Luc Godard / France / 1967)

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    Si se promener de loin en loin dans la filmographie de JLG et découvrir ses films dans le désordre le plus total au fil du temps empêche d'avoir une nette vision de son évolution, cela a toutefois l'avantage certain de recevoir par moments de véritables uppercuts. La Chinoise date de 1967. Seulement huit années sont donc passées depuis A bout de souffleet Godard a déjà tout chamboulé, comme aucun cinéaste français avant lui et certainement aucun après lui, si l'on tient compte du resserrement du séisme sur quelques années (disons 1959/1968) et de l'amplitude de l'onde de choc, ressentie jusque chez les spectateurs de l'époque ne voyant aucun de ses films.

    "Il faut confronter des idées vagues avec des images claires". Dès le trois ou quatrième plan, Godard annonce son programme, écrit sur l'un des murs de l'appartement dans lequel se déroulera la quasi-totalité de La Chinoise. Si il y a bien une chose que l'on ne peut pas reprocher au cinéaste, c'est de ne pas jouer cartes sur table. Et rarement quelqu'un aura aussi parfaitement réussi à coller à son manifeste. Dans La Chinoise, tout se ramène à cet axiome. Cinq jeunes militants parisiens marxistes-léninistes ont investi pour l'été un appartement familial, pour y peaufiner leurs réflexions, mettre à l'épreuve leur foi révolutionnaire et trouver des moyens d'action. Pourfendant l'impérialisme des grandes nations occidentales autant que le socialisme soviétique abîmé dans le stalinisme, ils font reposer leur pensée politique sur la lutte des classes et la Révolution Culturelle chinoise de Mao. Dans ce lieu clos, se succèdent discussions enflammées, exposés sur des sujets précis, lectures de discours célèbres, tentatives de théâtre révolutionnaire. Parallèlement, chacun des personnages est interviewé par un journaliste (Godard lui-même, dont on entend faiblement la voix) et revient sur son parcours et sur le pourquoi de son engagement.

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    Le montage entrechoque tout cela avec des slogans, des photos, des chansons, des cartons. L'éclatement est à nouveau total, claps à l'image et répétitions comprises. Du point de vue narratif, l'objet est déjà inouï. Le miracle est que cette distanciation (réellement brechtienne, puisque la citation est faîte littéralement), ces procédés qui poussent les acteurs à jouer un documentaire, cette accumulation d'exposés théoriques produisent tout de même de la fiction. L'expérimentation cohabite avec l'évidence d'un récit cinématographique. D'admirables comédiens parviennent à rendre crédibles et vivants des personnages qui, au départ ne dégagent qu'une curiosité idéologique. Jean-Pierre Léaud, que l'on croit connaître par coeur, étonne toujours autant par sa capacité à inventer une figure mémorable. Véronique et Yvonne, les deux femmes du groupe, sont incarnées, transfigurées, par Anne Wiazemsky et Juliet Berto, touchantes, bouleversantes. Au cours d'une séquence magnifique, Waziemsky fait croire à Léaud qu'elle ne l'aime plus en lui prouvant qu'elle peut faire deux choses à la fois. Mais la vie surgit aussi et surtout des entretiens et d'une discussion dans un train, entre Véronique et Francis Jeanson, fameux intellectuel ayant soutenu le FLN quelques années auparavant et intervenant ici dans son propre rôle. Ces échanges, ces questions posées interrogent sans cesse les militants maoïstes, mettent à jour les contradictions et pointent les propos abusifs, obligent à préciser inlassablement. Véronique et les autres défendent becs et ongles leurs positions tout en laissant passer dans leur regards, leurs hésitations, parfois, le déséquilibre et donc l'émotion.

    Comme les personnages travaillent incessamment à forger leurs arguments, cherchant dans la pensée marxiste des fondements scientifiques et donc irréfutables, Godard s'attache à éclaircir par le cinéma ces idées vagues. Dans un va et vient interrogateur, tantôt il épouse et prolonge la virulence des protagonistes, tantôt il use d'un recul contradictoire ou humoristique. En donnant autant d'importance à la foi révolutionnaire de l'une qu'à la désillusion de l'autre, il peut donner l'impression de reprendre à son compte toutes les positions et s'abîmer dans la confusion (reproche qui lui a été fait régulièrement par ses détracteurs, désarçonnés à ce moment-là, dans la deuxième moitié des années 60, par son virage idéologique vers l'extrême-gauche). Parlons plutôt d'une image de la complexité du monde, certes à mille lieues de la démarche de cinéastes plus humanistes. La Chinoise est l'exposition d'un mouvement révolutionnaire, de la théorie à l'activisme (ici terroriste). Je n'aime guère parler de prédiction d'un événement historique, tournure qui la plupart du temps débouche sur une ré-écriture fausse de l'histoire, mais force est de constater que bien des éléments qui feront Mai 68 se retrouvent dans le film.

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    Étonnement sensible vu le sujet, le film est aussi plastiquement superbe. L'utilisation de la couleur pourrait, comme celle du travelling, passer pour une affaire de morale. Cadrages et mouvements d'appareils sont d'une fluidité et d'une précision incroyables (l'alternance des plans fixes dans la discussion déjà évoquée entre Véronique et Jeanson) jusqu'à un dernier plan (annoncé par le carton : "Dernier plan du film") magnifique. Tout cela n'est pas mal pour "un film en train de se faire" (sous-titre de La Chinoise).

    Peur de passer à côté de certaines choses, de me tromper... L'envie de revoir dès maintenant, deux jours après, La Chinoise me taraude. C'est sans doute moins beau que Le mépris, moins génial que Pierrot le Fou, mais c'est le film qui me travaille le plus et le choc esthétique le plus évident parmi ceux vus ces derniers mois.

  • Une femme est une femme

    (Jean-Luc Godard / France / 1961)

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    unefemmeestunefemme.jpgTroisième long de Godard, après A bout de souffle et Le petit soldat (ce dernier sorti plus tard, suite aux problèmes que l'on sait), Une femme est une femmeest une petite chose au milieu d'oeuvres bien plus consistantes. Abordant la couleur pour la première fois, JLG annonce une comédie, parfois musicale, sous les auspices de René Clair et de Ernst Lubitsch (convoqués dans l'un de ces génériques aussi percutants que succincts dont notre homme a le secret).

    Angela, strip-teaseuse de son état, vit avec Emile. Elle veut un enfant. Aujourd'hui. Lui n'en veut pas. Pourquoi ne le ferait-elle donc pas avec le premier venu ou avec l'ami du couple, Alfred ? Il n'y a guère plus à dire de l'histoire. On suit d'abord Angela (Anna Karina et son accent si particulier) dans la rue, à sa boite de strip, au travail d'Emile (Brialy) ou en conversation avec Alfred (Belmondo). C'est la meilleure partie du film. Car ensuite, le couple s'enferme dans son appartement et n'en sort plus guère. Godard aime les scènes de ménage en chambre. L'étirement de celles d'A bout de souffle et du Méprisprovoquaient génialement. Celle qui met aux prises Karina et Brialy paraît ici bien superficielle. L'affrontement relève de l'enfantillage et la mise en scène toute en ruptures de tons nous laisse à penser que tout cela n'est finalement pas bien grave. Les personnages ont bien du mal à exister et tout ne semble tourner qu'autour du problème général et peu original de la guerre des sexes.

    Le générique nous prévenait, Godard fait une comédie. Mais si surprenantes et inventives que soient ses trouvailles (calembours, coqs à l'ânes, superpositions sonores...), nous sommes bien en peine de relever un gag particulier, hormis les blagues de bureau (on croise Marie Dubois qui est en train de lire Tirez sur le pianisteet Jeanne Moreau à laquelle Belmondo demande comment ça se passe sur Jules et Jim, Belmondo qui, ailleurs, dit qu'il aimerait bien aller voir A bout de soufflequi passe à côté...). Non, Godard n'est pas le plus drôle des cinéastes et il a même la fâcheuse habitude d'abuser des grossièretés de langage.

    Bien évidemment, et heureusement, la provocation godardienne ne se limite pas aux "Eva-te faire foutre" et autres "enfoiré". La déconstruction du récit bluffe toujours autant : bande-son extrêmement complexe et montage déstabilisant. Les meilleures séquences se déroulent dans les bars. Celle où Karina et Belmondo écoutent intégralement Tu t'laisses allerd'Aznavour est l'une des plus belles et des plus étranges. Quelques plans admirables ponctuent ainsi la fantaisie, la plupart centrés bien sûr sur Anna Karina. Mon préféré voit la caméra se substituer à Brialy et empêcher sa femme de forcer le passage jusqu'à la serrer dans un coin de l'appartement.

    Cela dit, j'ouvre mon parapluie afin de ne pas prêter le flanc aux attaques du style : "Ah Bravo ! tu préfères un Lelouch à un Godard...". Adorateurs du Maître Franco-Suisse, inutile d'affûter vos couteaux, ma prochaine note prendra la forme d'un éloge de La Chinoise.

  • Un homme et une femme

    (Claude Lelouch / France / 1966)

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    unhommeunefemme.jpgJe n'avais jamais vu Un homme et une femme. L'ensemble de la filmographie de Claude Lelouch m'est d'ailleurs inconnu. Les seules exceptions sont Itinéraire d'un enfant gâté et Il y a des jours et des lunes, vus à l'époque de leurs sorties en salles. A 16 ans, facilement impressionnable, en général on trouve ça bien Lelouch. Et souvent on abandonne ensuite, en suivant, à tort ou à raison, les conseils de contournement des critiques.

    Devant Un homme et une femme, je vois bien ce qui, en 66, gênait certains et, aujourd'hui encore, doit continuer à agacer les détracteurs du cinéaste. Lelouch, qui, avant cet énorme succès, avait connu une série d'échecs avec ses six premiers longs-métrages, utilise l'esthétique, les procédés narratifs et les techniques de la Nouvelle Vague en les lissant pour les rendre le plus acceptables possibles pour le public. Oui, en un sens, Lelouch fait un roman-photo avec le nouveau cinéma. On peut éventuellement parler d'affadissement, s'irriter du côté catalogue de la modernité (voire, avec mauvaise foi, prendre chaque plan du film et en référer tantôt à Godard, tantôt à Resnais, élargir même à Fellini ou Antonioni). Il n'empêche que c'est bien une certaine joie de faire du cinéma qui se dégage de ces longs dialogues jamais filmés ou illustrés de la même façon, c'est bien la liberté de la narration qui marque. Il est bon de rappeler que si tout le monde s'était extasié à l'époque, et à juste titre, devant telle séquence de The unbelievable truth(Hal Hartley, 1990) où une leçon de mécanique improvisée faisait office de discours amoureux, Lelouch avait fait exactement la même chose en faisant longuement parler Trintignant du bruit de son moteur en course à Anouk Aimée.

    Le cinéaste est un technicien sans faille. Il faudrait être aveugle pour ne pas admettre que jamais en France n'avaient alors été aussi bien filmées des courses automobiles, comme pour la longue séquence d'entraînement de Trintignant, entièrement couverte par les bruits de moteurs. L'histoire quant à elle est simplissime et émouvante (le couple est magnifique). Cette simplicité scénaristique sert beaucoup le film, qui évite ainsi de nous bassiner avec les grands problèmes sociaux et la philosophie de la vie, choses qui sont ailleurs beaucoup reprochées à Lelouch. Ici, nous avons plutôt des petites notations humoristiques, des bribes de cinéma direct, des apartés, des citations, bien dans l'esprit, encore une fois, de la Nouvelle Vague. Courir sur la plage, poursuivre un train en voiture, c'est cucul mais ça marche. Parfois, la vie est cucul.

    La mémoire télévisuelle, qui ressasse indéfiniment les mêmes signes sans jamais revenir à leur source, a réduit telle une tête jivaro Un homme et une femme au thème musical de Francis Lai. Celui-ci n'est pourtant que l'une des nombreuses interventions musicales qui parcourt la bande-son, jusqu'à donner l'impression d'un vrai film musical. Lelouch intègre magistralement dans son récit deux chansons de Pierre Barouh, qui pourrait se voir indépendemment comme l'un des scopitones que le cinéaste aimait tourner en début de carrière. D'autres procédés se remarquent, notamment l'usage godardien d'une musique venant en contrepoint de l'image (musique symphonique et grave sur des images qui ne le sont a priori pas...). Poussés à leur limite dans le dernier quart d'heure où se succèdent trois larges plages mélodiques, ces usages, aussi beaux soient-ils, laissent penser que Lelouch a du mal à trouver un moyen autre que musical pour boucler son voyage émotionnel. Mais cette impression de séquences qui n'en finissent pas de ne pas finir n'est pas si désagréable. Oui, tout cela est joli. Le terme n'est, pour une fois, nullement dépréciatif.

  • Belfort

    (Gaëtan Chataigner / France / 2008)

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    belfort.jpgPour fêter les 20 ans des Eurockéennes de Belfort, commande a été passée à Gaëtan Chataigner pour qu'il réalise un documentaire-hommage au célèbre festival. Chataigner est le bassiste des Little Rabbits, meilleur groupe de rock français du monde au tournant des années 2000, splitté depuis, pour mieux renaître sous le nom de French Cowboy et, parallèlement, en orchestre de luxe pour les concerts de Philippe Katerine. Sachant que notre homme adore depuis toujours bidouiller des vidéos pour son groupe ou ses grands potes que sont Katerine et Dominique A., le projet promettait énormément sur le papier.

    Refusant de se contenter d'aligner des extraits des concerts ayant marqué deux décennies d'Eurockéennes, Chataigner a choisi de tourner une mini-fiction qui accueillerait sur la bande-son et en inserts ces grands moments musicaux. En partant de la Vendée, nous prenons donc la route aux côtés d'un couple de jeunes amoureux nantais, résolus à gagner Belfort en stop. Les kilomètres défilent ainsi dans la voiture d'un cadre trop bavard, dans le camion d'un fan de métal et enfin dans la Ford Mustang d'un doux allumé tout de cuir noir vêtu (Eric Pifeteau, que je préfère quand même sur scène, derrière sa batterie). Aucun dialogue ne s'entend. Seule une voix-off au ton détaché (celle de Federico Pellegrini, troisième Rabbits embarqué dans l'histoire) nous guide en jetant en arrière, vers ces années d'indépendance, un regard aussi tendre que désabusé.

    Gaëtan Chataigner a voulu faire tout autre chose qu'un catalogue commémoratif. Il y a cependant un peu trop de décalage dans son road movie. La fiction, si sympathique soit-elle, a du mal à s'incarner réellement dans ces personnages immatures et la série de saynètes qui en découle est très inégale. On a l'impression d'avoir une succession de scènes dont chacune doit proposer une idée visuelle originale et/ou décalée. L'intégration des musiques et des images live passe elle par des procédés très divers : illustration litérale des paroles (un homme inquiétant joue avec son fusil dans les bois sur le Stagger Leede Nick Cave; le jeune couple se déchaîne sur une piste de danse au son du I bet you look good on the dancefloordes Artic Monkeys), évocation d'une certaine ambiance (le son de Portishead sur des images, vues d'un train, de paysages défilant; tendresse et complicité amoureuse sur le Karma policede Radiohead), rimes visuelles (montage qui souligne la ressemblance entre l'héroïne de la fiction et Kim Gordon de Sonic Youth) et mise en parallèle d'univers proches (The Gossip sur des plans de quartiers chauds parisiens). Les nombreux mais trop brefs extraits sont constamment entrecoupés, le son est trituré en jouant sur les sources possibles (poste de radio, magnétophone, son direct du concert...) et tout cela se révèle assez frustrant. Difficile donc de dégager une performance ou un autre, tout au plus peut-on saisir des moments consacrés au gens qui nous touchent particulièrement, soit pour ma part Pixies, Sonic Youth, PJ Harvey ou LCD Soundsystem, parmi beaucoup d'autres. La petite déception ressentie devant Belfort tient surtout à ce constat : tous les artistes entr'aperçus sont si précieux et si rarement mis en avant ailleurs que les hommages les plus originaux et les plus déconstruits ne sont pas forcément les plus nourrissants.

    Le film, diffusé deux fois sur la TNT de façon indigne par Virgin 17 (dans la nuit et, la deuxième fois, avec 1 heure de retard sur l'horaire annoncé), est visible dans son intégralité sur Daily Motion, mis en ligne par les gens des Eurockéennes eux-mêmes.

  • Le papier ne peut pas envelopper la braise

    (Rityh Panh / France - Cambodge / 2007)

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    papier.jpgAprès Les artistes du théâtre brûlé(voir ma précédente note), Rityh Panh met un peu de côté le travail de mémoire pour se coltiner à l'un des fléaux qui ravagent son pays, à savoir celui de la prostitution. Est-il vraiment utile de dire que malgré son sujet, Le papier ne peut pas envelopper la braise nous emmène loin d'un numéro du Droit de savoir sur TF1 ?

    Nul racolage évidemment dans le geste de Rityh Panh. Le groupe de prostituées, dont se détachera petit à petit une figure principale, est filmé uniquement pendant les moments de pause, la journée, avant de partir travailler le soir. Le cadre est celui du "Building" de Phnom Penh, bâtiment dans lequel vivent quelques 300 filles. Dès le début, sont lâchés des propos terribles sur les violences quotidiennes que ces dernières subissent, réduites qu'elles sont à l'état, au mieux, d'objet sexuel ou, au pire, de punching-ball. Sans pathos, sans effet choc ni voyeurisme, Rityh Panh nous donne à voir discrètement mais précisément la réalité des ravages du sida et de la drogue. En deux ou trois scènes de comptage de billets et de calculs sur un cahier, il montre le fonctionnement du micro-système infernal, basé sur une hiérarchie inébranlable (de bas en haut : la prostituée, le rabatteur, la patronne). Les quelques gestes de tendresse entre filles ne trompent jamais : il n'y a pas de romantisation de l'image de la putain. Quelques unes peuvent éventuellement parler, sans y croire vraiment, d'arrêter, de partir ou de devenir riche, mais toutes, à un moment ou un autre, parlent de mourir.

    Les différentes expériences ne sont pas énoncées de la manière classique, au cours d'entretiens avec l'auteur du documentaire. Les témoignages sont mis en forme, certainement orientés, plus ou moins dirigés par Rityh Panh, qui a préféré passer par des dialogues et des questionnements entre les filles elles-mêmes. Le procédé pouvait s'avérer difficile à manier et faire naître une sensation de manipulation. Fort heureusement, il n'en est rien. L'espace de liberté laissé est assez large et le film y gagne aussi en homogénéité. Le choix du réalisateur est donc de demeurer à distance. Jamais on ne le voit, ni l'entend. Aucun commentaire, autre que musical, ne vient se poser sur les images. Entre les conversations, le film ménage des pauses, suspend le temps, embrassant l'horizon de Phnom Penh depuis le toit du Building ou scrutant les visages tournés vers l'extérieur depuis les fenêtres de l'étage.

    L'ombre du génocide ne vient cette fois-ci que par la bouche de la mère de l'une des prostituées et la dureté de ses propos en disent long sur les souffrances passées, sur l'immensité du fossé séparant deux générations (ceux qui ont connu le pire et ceux qui viennent après) et sur le désespoir infini étreignant toute une part de la société cambodgienne : "Tu te plains de ta vie, mais ce n'est rien à côté de ce que nous avons vécu". Ce récit de l'exploitation féminine n'a pas de fin. Au terme de notre parcours, les anciennes ont disparu mais les nouvelles sont arrivées. Pendant 90 minutes, leurs douleurs se sont déployées dans la douceur d'une mise en scène minutieuse et attentive. Vision optimiste : ce recueil de témoignage est un salutaire signal d'alarme. Vision pessimiste : ce beau documentaire est un cautère sur une jambe de bois. Souvent nous revenons dans l'un des couloirs du Building : une femme ou un enfant au premier plan est baigné par la lumière chaude du jour. Mais tout le fond reste dans le noir. Pas d'issue. Sauf la fenêtre ?

  • Les artistes du théâtre brûlé

    (Rityh Panh / France - Cambodge / 2005)

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    artistetheatre.jpgPrésenté un peu partout sous l'étiquette documentaire, Les artistes du théâtre brûléest pourtant loin de coller parfaitement à l'acception du terme. Les premières images nous montrent la reconstitution théâtrale d'un drame de la guerre, dans un décor en ruines. La représentation s'interrompt soudain sous les invectives d'un homme que l'on imagine metteur en scène. S'ensuit alors une altercation verbale entre ceux qui se révèlent bel et bien des acteurs (dans de beaux va-et-vients d'une extrémité à l'autre du "plateau", la caméra accompagne en plan d'ensemble les mouvements des personnes). La deuxième séquence fait office de présentation de deux des principaux protagonistes : Doeun fait part à son ami Hoeun de sa découverte d'une malle renfermant les accessoires nécessaires à l'endossement du rôle de Cyrano de Bergerac (chapeau, faux nez, épée). Le phrasé, les champs-contrechamps et les variations d'échelles de plans à l'intérieur du dialogue nous le font ressentir : si ce n'est de la fiction, c'est en tout cas de la re-création.

    Nous sommes au coeur de Phnom Penh, dans un théâtre dévasté par un incendie dix ans auparavant. L'esthétique et l'économie du film sont clairement celles du documentaire. L'image est numérique, les lumières naturelles, la longueur des plans et les cadrages attentifs au frémissement de la vie. Mais au sein de ce dispositif, Rityh Panh filme des individus jouant leur propre rôle et multiplie les niveaux de réalité : représentations (sans public) de pièces ou citations d'extraits célèbres, interprétations de situations déjà vécues, témoignages recueillis par une journaliste et captation de la vie dans les rues alentour. Le statut de chaque scène est rarement discernable au premier regard. Ainsi, il n'est pas rare de voir intervenir tout à coup une tierce personne qui révèle alors le caractère joué de ce que nous venons de voir à l'instant.

    Le générique avance bien : "Scénario de Rityh Panh". Cet écheveau, traduit dans l'esthétique particulière du cinéaste (elliptique, contemplative, assez proche de celle de Jia Zangke), donne vie à un récit flottant, sans véritable noeud dramatique. Nous suivons quelques uns des comédiens de ce théâtre fantôme (dans lequel ils ont élu domicile), une dame malade et une jeune journaliste calepin à la main. Ce film de Rityh Panh est, comme ses précédents, hanté par le génocide cambodgien perpétré par les khmers rouges. Quelques récits édifiants nous sont contés et l'auteur continue à s'interroger sur la façon de les transmettre. Ici, ils démarrent sous forme de conversation normale pour se poursuivre en off sur des images où leurs locuteurs sont muets et leur évocation peut se faire par la maquette d'un camp de travail. Mais Les artistes du théâtre brûléaborde bien d'autres soucis cambodgiens : difficile transmission de la culture, atomisation des structures familiales, désenchantement politique, déscolarisation et misère. On oscille entre la noirceur du constat et d'infimes lueurs d'espoir, entre de toujours marquantes images d'enfants fouillant une décharge et des balades en scooter (depuis quelques années, de Moretti à Hou Hsiao-hsien, quoi de plus cinématographique que de précéder longuement une moto ?).

    Entre ces séquences, les plus belles, celles où le récit s'évapore, et celles basées sur des dialogues, naît un certain déséquilibre. Le fait, dans ces dernières, de mettre ainsi à nu la fiction, dans la transparence de l'esthétique documentaire, accuse parfois l'artifice et l'inégalité du jeu d'acteurs. Rarement la frontière entre documentaire et fiction aura été aussi travaillée, et si tout n'est donc pas convaincant, cela ne m'empêche pas de souligner l'exigence de l'auteur de S-21, la machine de mort khmère rouge, qui, bien que creusant toujours le même sillon (les traces du génocide), utilise à chaque fois des outils différents. Ma prochaine note devrait vous entretenir du film suivant de Rityh Panh : Le papier ne peut pas envelopper la braise.

  • Un conte de Noël

    (Arnaud Desplechin / France / 2008)

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    contenoel.jpgPas facile de parler d'Un conte de Noël. Avec les cinq premiers films d'Arnaud Desplechin, de La vie des morts à Léo en jouant "Dans la compagnie des hommes", les choses étaient claires : je savais exactement ce que j'admirais dans chaque opus. Mais avec Rois et reine et aujourd'hui ce Conte de Noël, tout se complique. Comme si, en devenant a priori plus accessible, son cinéma devenait encore plus insaisissable.

    Une fête de famille et des retrouvailles plus ou moins souhaitées après un traumatisme : tous les ingrédients du film choral basique sont réunis. Rassurons-nous, nous ne sommes pas dans Ceux qui m'aiment prendront le train. La première partie déroute, comme souvent dans ce genre de récit où l'on nous présente en parallèle une multitude de personnages. Mais cette narration est si étrange... Nous sommes dans un flux; les scènes semblent déborder les unes sur les autres (surtout grâce à la musique). Pourtant les ruptures de tons abondent : des débordements comiques aux larmes. Une courte séquence nous montre l'un des fils, Ivan, passer derrière les platines lors d'une fête. Ses dons de DJ lui font destructurer les morceaux pour mieux les ré-inventer. Scratches, superpositions de couches sonores, indécision du rythme : éléments caractéristiques de ce passage électro, éléments caractéristiques de tout le film. Des événements, chargés dramatiquement, prennent forme mais rien ne semble se résoudre réellement. Jamais de façon classique en tout cas. Je défie quiconque de deviner au début de n'importe quelle séquence du film où celle-ci va mener. Peu de cinéastes en France réussissent ainsi à faire naître le mystère à partir de données aussi prosaïques.

    Une fois encore, on dira de Desplechin qu'il ne filme que des bourgeois et des gens très cultivés. Et le regard n'est pas critique. Ce n'est pas du social, ce n'est pas du politiquement correct-engagé. On sent très bien qu'il joue avec ça. Et lui au moins ne se pose pas la question de savoir si c'est pas un peu trop de filmer ces gens en train de fumer et picoler continuellement, de blaguer avec le judaïsme ou de faire dire des grossièretés aux enfants. Quand à cette histoire de culture, peut-être encombre-t-elle parfois, mais remarquons seulement qu'elle permet de faire passer de façon très fluide toutes les références mythologiques ou littéraires qui paraîtraient ailleurs pédantes ou plaquées. Et ce travail donne des dialogues ciselés, toujours étonnants même dans les situations les plus convenues sur le papier, tel l'échange bouleversant entre Simon, amoureux sacrifié, et Sylvia, dans la cuisine. La troupe de comédiens habituelle s'en délecte (il est inconvenant de ne détacher qu'une personne, mais Chiara Mastroianni est bien la fille de ses parents).

    Comme dans Rois et Reine, le personnage de Mathieu Amalric s'oppose totalement à celui d'une femme (ici celui d'Anne Consigny) et on sent, dans les deux films, un déséquilibre. Le burlesque, la folie dynamique de l'homme tranche avec la névrose et le repli sur soi de la femme. La surprise et la satisfaction du spectateur provient du premier plus que de la seconde.

    Je conclue cette note besogneuse en disant que si Un conte de Noëlm'a moins impressionné que les travaux précédents de son auteur (peut-être parce qu'il me fait cette fois-ci plus penser à Truffaut qu'à Resnais), Desplechin reste, au sein d'une génération de cinéastes qui donna tant de premiers films prometteurs au début des années 90 (Ferran, Kahn, Beauvois, Ferreira-Barbosa, Lvovsky, Masson...), de loin le plus important et le plus régulier.

  • Le petit lieutenant

    (Xavier Beauvois / France / 2005)

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    142940381.jpgAvec Le petit lieutenant, Xavier Beauvois tente de faire une photographie de la police au travail, comme Tavernier le fit en 1992 avec L.627. En suivant un jeune diplômé qui débarque dans une brigade criminelle à Paris et en filmant son quotidien, le cinéaste s'est voulu au plus près de la réalité. Or, première incongruité dans cette optique, il ne distribue dans les rôles de policiers que des visages connus. Cette équipe est donc composée de Nathalie Baye, Jalil Lespert, Roschdy Zem, Antoine Chapey et Beauvois lui-même. On peut ajouter Jaques Perrin en juge. Inutile de dire que, malgré le savoir-faire de chacun, l'effet de réel recherché en prend déjà un coup.

    Pour mieux faire passer la pilule du didactisme, le cinéaste nous fait partager le regard du nouvel arrivant sur ce petit monde. Le problème, c'est qu'il veut absolument tout traiter, tout dire. Nous avons donc un catalogue de personnages (Beauvois, fidèle à son image de rebelle du cinéma français s'est réservé le rôle le plus réac et le plus violent) et de situations reflétant toutes les contradictions qui tiraillent la profession. Donc : Les flics boivent, mais pas toujours; il y a des cons, mais d'autres respectent les lois de la République; c'est pas facile d'entrer dans la police quand on est d'origine maghrébine, quoique ça dépend dans quelle brigade tu te retrouves. Bref, comme le dit l'autre dans sa chanson : "Y'en a des bien". C'est sans doute cette volonté d'exhaustivité qui fit écrire à certains que Beauvois avait réalisé là un grand film humaniste.

    L'autre terme retrouvé dans bien des critiques était "regard documentaire". Il est vrai que l'accent est mis sur la routine et que le fil conducteur est une enquète plutôt banale (le point de départ en est le meurtre d'un SDF). L'intention est louable mais la mise en scène a vraiment du mal à suivre. Neutralité de l'image, cadrages passe-partout, dialogues parsemés de répliques qui font mouche ("On nous a filé le fils de Colombo !") bien surlignées par le découpage hyper-classique : la différence avec un téléfilm ne saute pas vraiment aux yeux. On est loin d'une interrogation du réel. Autre aspect désagréable : les blagues de bureau. Chacun, quelque soit son activité, doit connaître ça, pas toujours fier de ses rires. Alors les voir sur un écran... La scène du pétard fumé dans la rue par Baye et Lespert, qui se termine de façon très prévisible par la sympathique mise en garde du jeune homme ayant tiré une taffe avec eux, m'évoque exactement ça : ces moments professionnels et comiques que l'on se remémore entre collègues jusqu'à l'overdose. De plus, quand Beauvois sort du documentaire, c'est pour faire de la bonne vieille psychologie. Car la patronne, alcoolique repentie, retrouve dans le petit lieutenant son fils disparu très tôt.

    La barque est donc sacrément chargée. Qu'est-ce qui l'empêche, selon moi, de couler complètement ? Tout d'abord mon attachement à Jalil Lespert, acteur que j'ai toujours trouvé très intéressant, arrivant dans chacun de ses rôles (chez Cantet, Guédiguian, Resnais) à dépasser son apparente lourdeur. Ensuite, ce changement de point de vue inattendu, au milieu du récit. Procédé toujours intriguant, même si il n'est pas ici totalement assumé. Et enfin trois instants de violence éclatants sans prévenir : deux actes sanglants brutaux et anti-spectaculaires, à l'arme blanche, puis par balles, et un coup de fil annonciateur du pire (un plan qui dure un peu plus que les autres, le temps de nous laisser nous demander pourquoi, avant de laisser tomber le couperet).

    PS : Le Dr Orlof a été plus rapide que moi à dégainer. Allez donc lire son avis (pas plus enthousiaste).