Puisque mes notes vont s'écrire en pointillés pendant les fêtes, je vous propose d'établir la liste récapitulative des meilleurs films de l'année... 1983 (en attendant celle de 2008, que vous attendez sans doute tous très fébrilement). L'année 83 donc, bien sûr, celle dont nous avons parlé ici-même chaque mois depuis septembre (dernière évocation : ici). Pour ce faire, je reprends sans vergogne le modèle déposé par le bon Dr Orlof, qui, en début d'année, nous avait invité à dresser nos listes des années 93 à 2001.
Voici donc mes préférences, aujourd'hui (car est-il utile de préciser que cette liste ne reflète en rien les films que j'ai pu aller voir en salles à l'époque, à l'âge de 12 ans ?) :

1- Fanny et Alexandre (Ingmar Bergman)
2- L'argent (Robert Bresson)
3- A nos amours (Maurice Pialat)
4- Pauline à la plage (Eric Rohmer)
5- Furyo (Nagisa Oshima)
6- A la poursuite de l'étoile (Ermanno Olmi)
7- Honkytonk man (Clint Eastwood)
8- Faits divers (Raymond Depardon)
9- La valse des pantins (Martin Scorsese)
10- Mortelle randonnée (Claude Miller)
Si le coeur vous en dit, n'hésitez pas à y aller de votre liste personnelle. En plus de mes dix premiers titres, pour vous rafraîchir la mémoire, je récapitule ci-dessous, de manière évidemment non-exhaustive mais, je l'espère, sans trop d'oublis, les principales sorties françaises de l'année 1983 (Sources : CNC et IMDb).

Pas loin des 10 premiers : Sans soleil (Marker), Le sens de la vie (Jones & Gilliam), Vivement dimanche ! (Truffaut), Chaleur et poussière (Ivory), La ballade de Narayama (Imamura).
Le verre à moitié plein : Danton (Wajda), Tootsie (Pollack), Atomic Cafe (Loader & Rafferty), Zombie (Romero), Outsiders (Coppola), Rue Cases Nègres (Palcy), Zelig (Allen), Papy fait de la résistance (Poiré), Garçon ! (Sautet), Boat people (Hui).
Le verre à moitié vide : A la recherche de la Panthère rose (Edwards), Erendira (Guerra), La vie est un roman (Resnais), L'homme blessé (Chéreau), Evil dead (Raimi), La femme de mon pote (Blier), Le retour du jedi (Marquand), Les compères (Veber).
Vus et oubliés (volontairement ou pas) : Le prix du danger (Boisset), Rocky 3 (Stallone), Le verdict (Lumet), Sans retour (Hill), Y'a-t-il enfin un pilote dans l'avion ? (Finkleman), Le dernier combat (Besson), Rambo (Kotcheff), Banzaï (Zidi), Gandhi (Attenborough), Circulez y'a rien à voir (Leconte), L'été meurtrier (Becker), Les prédateurs (Scott), 48 heures (Hill), Tonnerre de feu (Badham), Superman 3 (Lester), Flashdance (Lyne), Octopussy (Glen), Le Marginal (Deray), Jamais plus jamais (Kershner), Un fauteuil pour deux (Landis), Wargames (Badham), Le bal (Scola), Tchao Pantin (Berri).
Et tous les autres, dont je n'ai encore jamais croisé la route : Travail au noir (Skolimowski), Officier et gentleman (Hackford), Antonieta (Saura), La belle captive (Robbe-Grillet), J'ai épousé une ombre (Davis), Le jour des idiots (Schroeter), L'imposteur (Comencini), L'emprise (Furie), La Traviata (Zeffirelli), L'Africain (De Broca), My dinner with André (Malle), L'écran magique (Mingozzi), La petite bande (Deville), Dark crystal (Henson & Oz), Le démon dans l'île (Leroy), Le choix de Sophie (Pakula), Coup de foudre (Kurys), Merry-go-round (Rivette), Cinq jours ce printemps-là (Zinnemann), T'es fou Jerry (Lewis), Le monde selon Garp (Roy Hill), Edith et Marcel (Lelouch), Dans la ville blanche (Tanner), Ténèbres (Argento), Le mur (Güney), Les trois couronnes du matelot (Ruiz), La lune dans le caniveau (Beineix), Histoire de Pierra (Ferreri), La mort de Mario Ricci (Goretta), L'année de tous les dangers (Weir), Jeu de famille (Morita), La palombière (Denis), A bout de souffle made in USA (McBride), Creepshow (Romero), Le justicier de minuit (Thompson), Mon curé chez les Thaïlandaises (Thomas), Equateur (Gainsbourg), Frances (Clifford), Un jeu brutal (Brisseau), Liberty Belle (Kané), Benvenuta (Delvaux), L'ami de Vincent (Granier Deferre), Hanna K. (Costa-Gravas), Vive la sociale ! (Mordillat), Poussière d'empire (Lam Le), En haut des marches (Vecchiali), Un amour en Allemagne (Wajda), La tragédie de Carmen (Brook), Surexposé (Toback), Les Princes (Gatlif), Les cœurs captifs (Radford), Faux fuyants (Bergala & Limosin), La trace (Favre), Vassa (Panfilov).
Les habitués se sont peut-être fait la remarque : le Dr Orlof cité plus haut donnait, lui, deux listes à chaque fois, l'une correspondant à ses goûts actuels, l'autre à ceux de l'époque. Je n'ai pour ma part aucun cahier pour m'aider à m'y retrouver mais je veux bien m'exposer et tenter d'établir un classement qui pourrait ressembler à celui que j'aurai pu faire il y a 25 ans. Accrochez-vous, car comme disent les présentatrices de clips R'n'B sur les chaînes musicales : c'est du lourd.

1. Outsiders / 2. Le retour du jedi / 3. Rocky 3 / 4. Octopussy / 5. Wargames / 6. Le Marginal / 7. Tonnerre de feu / 8. Les compères / 9. Flashdance / 10. Papy fait de la résistance
Je vous avais prévenu.
A vous de jouer...
A propos de Two lovers, les admirateurs de James Gray n'ont pas manqué de relever la constance des thèmes (la famille, le choix qui engage toute une vie) et de l'ambiance (nocturne, épaisse). Je me suis réjouis pour ma part de voir le cinéaste cette fois-ci s'éloigner de son genre de prédilection, à savoir le film noir, qui, s'il lui avait permis d'effectuer de fracassants débuts (Little Odessa), l'avait ensuite vu quelque peu encombré (The yards,


















Dès le début de Hunger, quelque chose ne va pas. Cette façon de suivre ce gardien de prison, ces contre-plongées dans le couloir, ces gestes quotidiens qui en disent long...
C'est certain, un Garrel, ça ne se donne pas comme ça. Tellement Auteur, tellement centré (sur une certaine ville, sur un certain milieu social). Le long des 175 minutes que dure Les amants réguliers, il faut passer par quelques moments de flottement pour récolter ici ou là de réelles beautés et pour profiter d'une dernière heure magique.
Crainquebille est un vieux maraîcher des Halles, tirant chaque matin sa charrette dans les petites rues parisiennes. A la suite d'un quiproquo, il est arrêté par un agent de police pour outrage, celui-ci ayant mal compris une parole du vieil homme. Crainquebille passe trois jours en prison avant d'être traduit en justice, au cours d'un procès qui le dépasse totalement. Après avoir purgé une peine de réclusion complémentaire, il reprend son activité mais voit ses clients habituels se détourner de lui. Il tombe dans la déchéance.
J'ai trouvé la première partie de L'échange (Changeling) remarquable. J'ai cru à ce Los Angeles de la fin des années 20 recréé par Eastwood. Certains ont rechigné devant une "reconstitution trop soignée". Rappelons-leur qu'une reconstitution soignée hollywoodienne vaudra toujours cent fois mieux qu'une reconstitution soignée à la Française, sentant bon la brocante et les messages radiophoniques d'époque (voir l'effroyable Un secret de l'an dernier). Dans L'échange, les hommes et les femmes que l'on croise s'intègrent parfaitement à leur environnement et évoluent dans des décors photographiés magistralement par Tom Stern.
The grandmotherest le premier ouvrage conséquent de David Lynch, un film de 34 minutes réalisé en 1970, après deux très courts métrages (Six figures, 1967, 1', animation et The alphabet, 1968, 4', animation et prises de vues réelles) et avant l'entrée dans l'aventure du tournage de Eraserhead.
Bien que le dernier long-métrage de Jacques Tati ait été distribué dans les salles françaises à la fin de l'année 1974, Parade n'est pas un film de cinéma. Il s'agit d'une commande passée par la télévision publique suédoise, consistant à capter en vidéo un spectacle de cirque.
Plus intéressant est le documentaire tourné en 1978, à la demande de Gilbert Trigano. Celui-ci proposa à Tati d'immortaliser la journée du 26 avril où Bastia affrontait les Hollandais du PSV Eindhoven, en match aller de la finale de coupe de l'UEFA. Oubliées dans une cave pendant des années, les bobines du film furent restaurées et montées par Sophie Tatischeff, fille du réalisateur, en 2000, pour aboutir à ce Forza Bastia de 26 minutes.
Bien que je sois incapable d'émettre un jugement sur Le bald'Ettore Scola, compte tenu de l'éloignement, ce film m'est cher pour deux raisons. Tout d'abord, lorsque je vois cette affiche, je la vois au mur du cinéma que je fréquentais alors, celui de Nontron (24300, sous-préfecture de la Dordogne, 3400 habitants). C'est dans cette salle, la plus près de mon chez moi d'adolescent, dans la campagne périgourdine, que j'ai réellement découvert le cinéma. L'année de mes 12 ans, Le baly avait été programmé (peut-être même deux fois, la seconde, début 1984, à l'occasion d'une sortie post-Césars d'où Scola était reparti avec les prix du Meilleur réalisateur et du Meilleur film, ex-aequo avec A nos amours) et je revois très bien ce film annoncé dans le dépliant-programme. La deuxième raison est qu'il s'agit de l'un des films préférés de mon père qui, bien que n'étant pas cinéphile, pouvait s'enticher à l'époque de quelques oeuvres à la fois populaires et suffisamment originales, comme Apocalypse now ou Il était une fois en Amérique (rappelons que Scola balayait ici cinquante ans d'histoire sans sortir d'une salle de bal et sans laisser prononcer un seul mot pas ses personnages).
Combat de poids lourds au rayon érotisme : Walerian Borowczyk, lâché film après film par ses défenseurs, proposait un Art d'aimerqui ne semblât pas regarnir ses troupes et Russ Meyer qui, lui, connaissait plutôt une apothéose critique et publique avant de décliner par la suite (l'évolution de sa carrière dessinant ainsi une courbe logiquement mammaire), nous mettait sous le nez ses Megavixens.
Mieux vaut finir ce panorama avec quelques oublis des mois précédents. En Octobre était sorti l'un des films les plus réputés du grand Raoul Ruiz (voir plus bas), Les trois couronnes du matelot. En novembre, la guerre des Bond battait son plein : quelques semaines après Roger Moore dans Octopussy, Sean Connery retrouvait le costume de 007 dans Jamais plus jamais(pratiquement pas de souvenir de cet épisode-là, mais le nom de son réalisateur, Irvin Kershner, auteur de quelques films personnels et solide artisan au service de la grosse machine hollywoodienne comme avec le deuxième et le meilleur Star wars, est généralement gage de qualité). J'ai également oublié de mentionner le mois dernier les sorties de Erendira(fable sud-américaine qui m'a passablement ennuyé il y a quelques années, pourtant signée Ruy Guerra), de Vassa(de Gleb Panfilov, cinéaste russe, auteur notamment du très beau Thème) et de Quand faut y aller, faut y aller, énième ânerie troussée pour Terence Hill et Bud Spencer, que j'avais adoré à l'époque.
Lorsque le mois arrivant n'annonce rien de très palpitant, les revues de cinéma ont le choix entre trois solutions (seule Cinéma 83(300) met en vedette Jean-Claude Brialy). Possibilité n°1 : se plonger dans un passé méconnu. Ainsi, pour les Cahiers du Cinéma (354), le meilleur film du mois est Les anges du boulevard, classique du cinéma chinois des années 30, réalisé par Yuan Muzhi et resté inédit en France jusqu'alors. Possibilité n°2 : revenir sur des films déjà à l'affiche. La Revue du cinéma(389) parle de Pialat et de Sautet, en mettant Garçon ! en couverture. Starfix(10) fête le retour de Sean Connery. Possibilité n°3 : se projeter vers l'avenir. Cinématographe(95) titre joliment "En attendant Godard" (puisque Dieu allait redescendre parmi nous en janvier 84 et nous offrir Prénom Carmen). Dans un autre registre, Premiere (81) va voir les stars en plein désert, sur le tournage de Fort Saganne. Comme Depardieu vient de faire leur dernière une (avec Les compères), c'est Sophie Marceau qui s'y colle. Il y a en fait une autre possibilité : choisir un cinéaste qui fait toujours l'actualité, un cinéaste avec qui l'on s'entretient en ayant à chaque fois deux films de retard sur lui. Par exemple, Raoul Ruiz. Profitant de la sortie récente des Trois couronnes du matelot, de celle imminente de La ville des pirates et de bien d'autres projets en cours, Positif (274) propose un entretien fleuve avec le réalisateur chilien exilé en France, agrémenté de plusieurs études, six mois à peine après un numéro spécial des Cahiers du Cinéma déja imposant.