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Nightswimming - Page 118

  • Simon du désert

    (Luis Bunuel / Mexique / 1965)

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    simon.jpgSimon du désert (Simon del desierto) dure moins de 45 minutes et Bunuel n'y va pas par quatre chemins.

    Simon est un stylite, soit l'un de ces chrétiens des premiers siècles ayant choisi de faire pénitence au sommet d'une colonne pendant des jours, des mois, des années... Nous faisons sa connaissance alors que dans la foule des pèlerins, un riche notable lui propose un nouvel édifice, plus haut, plus beau, plus sûr. Simon est un jusqu'au-boutiste de la foi, un super-champion de l'ascèse. Seulement, plus il s'approche du ciel et plus il s'éloigne de l'homme. Le Saint devient méprisant et insensible.

    Les dévots qui l'entourent ne sont pas décrits de façon plus tendre. Les armées de prêtres sont en effet vues par Bunuel avec la même ironie dévastatrice que celle, plus tardive, des Monty Python. On pense en effet plusieurs fois au final de La vie de Brian, où les imbéciles se succédaient aux pieds des crucifiés et, de manière très précise, on découvre même un gag bunuélien dont on retrouvera l'idée dans le film anglais de 78 : la querelle entre différentes factions de chrétiens ("- A bas le Christ ! - Vive le Christ ! - A bas la Sainte Trinité ! - A bas... euh... Vive la Sainte-Trinité !").

    Aux côtés des officiels, le petit peuple est à peine mieux représenté : une mère qui ne comprend pas son fils, un nain zoophile, un paysan qui, une fois ses mains miraculeusement retrouvées, s'empresse de repartir travailler, giflant son gosse au passage... Autour de la colonne de Simon, on vient voir les miracles comme on va au marché. Et comme celui-ci le dit lui-même, "bénir fait passer le temps et cela ne fait de mal à personne".

    Simon a tout de même un problème : le Diable ne cesse de le tenter. Et comment pourrait-il résister alors que Satan a choisi le corps de Silvia Pinal pour s'exprimer ? L'érotisme est ici aussi direct que le message anticlérical.

    Pourtant, si Bunuel a fait grincer bien des dents, si certains de ses films, comme celui-ci, ont poussé très loin le bouchon, il s'est toujours trouvé des défenseurs des deux côtés, par exemple chez les bouffeurs de curés de Positif autant que chez les cathos des Cahiers du Cinéma. Chez les premiers, l'énervement était grand de voir leur auteur favori récupéré, après, certes, de nombreuses contorsions, par ceux qu'il aurait dû a priori choquer. C'est que si l'on peut voir dans Simon du désert (et les autres) l'expression d'un athéisme absolu et surréaliste (comme le voyait par exemple le flamboyant Ado Kyrou), on peut aussi y déceler une critique de l'intérieur et une critique, non du christianisme, mais de ses déviances. Devant l'insistance de Bunuel sur le sujet (quasiment du début à la fin de sa carrière), il faut bien se rendre à l'évidence que tout cela a pour origine autre chose qu'un simple rejet de principe. Cette petite ambiguïté toujours présente, malgré la vigueur de certaines flèches, rend finalement l'ensemble de l'oeuvre du maître d'autant plus passionnante.

    Deux remarques pour finir. D'une part, Simon du désert, si clair pendant quarante minutes offre au spectateur un dénouement sous forme de pirouette totalement inattendue et désarmante. Dans la folie d'une boîte de nuit new-yorkaise, Bunuel nous laisse pantois, au son d'un ultime cri diabolique de la Pinal. D'autre part, le cinéaste se plaignait parfois, semble-t-il, à propos de ce film-là, du manque de moyens et de temps. C'est pourtant l'une de ses plus belles réussites plastiques. Un Bunuel aux allures de pochade, même de trois quarts d'heure, même de transition, ne saurait que nous combler.

  • Jour de fête

    (Jacques Tati / France / 1949)

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    Avec le fiston, Jour de fête marche donc mieux que Mon oncle. Plusieurs raisons à cela, assez évidentes finalement : durée plus courte, rythme plus vif et registre plus franchement burlesque.

    Quand Mon oncle fait sourire, Jour de fête fait rire. Serait-ce à dire que les films les plus drôles sont les plus simplement réalisés ? Il est vrai qu'une mise en scène affichant sa virtuosité et ses atouts plastiques tend parfois à faire écran. Trop de signifiant, trop de réflexion nuit à la spontanéité de l'éclat de rire. Dans le comique, tout est donc affaire d'équilibre pour ne pas tomber dans l'excès inverse, celui de la platitude et de la facilité. On parlera alors ici de subtilité, là d'élégance ou encore ailleurs de vivacité.

     

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    La simplicité de Jour de fête n'est bien sûr qu'apparente. Elle masque une ambition technique (le film fut conçu, rappelons-le, pour être le premier long-métrage français en couleurs) et narrative hors du commun et surtout d'une incroyable originalité dans le paysage cinématographique de l'époque. Les trouvailles sonores sont toujours aussi merveilleuses (le moment de drague entre le forain et la villageoise, au son du western projeté à côté; les mimiques de François devant sa glace, l'oeil entouré de noir, pendant qu'une poule caquette on ne sait où...). Entre les longues plages sans dialogues (l'animation progressive de la place, la nuit d'ivresse de François dans les champs) et les échanges fleuris (grâce aux accents et aux jeux de mots), c'est un paysage sonore inédit qui se faufile entre nos oreilles. Plus référentiel, le recours au burlesque offre un régal de chutes en tous genres.

    Dès son premier long, Tati se dirige déjà vers le "spectacle total" qu'il appelait de ses voeux. Et au spectacle, tous les protagonistes de son film y sont. Chacun observe les autres. S'impose ici une leçon que les oeuvres suivantes ne cesseront d'asséner : la nécessité qu'il y a à s'arrêter un instant, le temps de regarder autour de soi avec étonnement, bienveillance ou humour, comme le fait le paysan en haut de son champ, observant l'étrange "danse de l'abeille" du facteur en contrebas.

    Le monde de Tati passe souvent pour gentillet. Sans vouloir tirer le film vers ce qu'il n'est pas, il convient de noter toutefois que l'on trouve dans Jour de fête quantité de sales garnements, un couple constamment en train de s'engueuler et des gens qui ne cessent de se moquer plus (les villageois) ou moins (les forains) gentiment de notre brave François. Signalons également que Tati peut aussi oser un gag grinçant comme celui, aussi court qu'irrésistible de l'homme mettant son bel habit, auquel le facteur lance un entraînant "alors, on se prépare pour la fête ?", sans voir le mort alité dans le coin de la pièce.

     

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    Dans cette chronique d'un petit village (toutes les petites touches humoristiques en disent aussi beaucoup sur le monde rural), se pose enfin la question d'une vision traditionaliste. La course en avant du progrès, Mon oncle en fera son sujet entier. Le plus grand plaisir que l'on prend, selon moi, à ce Jour de fête est en partie dû au fait que cette problématique est concentrée sur un seul élément : la révélation soudaine, par l'intermédiaire du cinéma, des exploits des postiers américains et de leurs machines. Nous spectateurs, nous n'avons alors qu'à savourer les gags qui en découlent, sans aller plus loin.

    La fin elle-même délivre avec finesse la morale et glisse de manière admirable. Une fois sorti trempé de sa chute (d'anthologie) dans la rivière, François se laisse conduire par la vieille femme à la chèvre, à bord de sa charrette. Il se pose enfin après sa folle course "à l'américaine" et peut s'arrêter au niveau des paysans dans leur champ. L'un d'eux lui demande de leur donner un coup de main, son gamin s'occupera bien de livrer le courrier restant à distribuer. On quitte donc François la fourche à la main et le garçon, casquette de facteur sur la tête cette fois, bouclera le film comme il l'avait ouvert : en suivant la caravane des forains. De la mémé à François puis au petit, comme un passage de témoin et la vie qui continue...

     

    Photos : Cinémathèque de Belgique et dvdbeaver.

  • Lucky Luciano

    (Francesco Rosi / Italie / 1973)

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    Lucky Luciano 09.jpgLucky Luciano en est un parfait exemple : les titres patronymiques des films-enquêtes de Francesco Rosi annoncent plutôt des portraits en creux que des biographies classiques de bandits, politiques ou mafiosi célèbres. Si l'approche du protagoniste principal est ici moins allusive que celle à l'oeuvre dans Salvatore Giuliano, l'oeuvre fondatrice du cinéma de Rosi, où du héros nous ne voyions guère que le cadavre, la distance mise entre le cinéaste et son sujet reste importante. Ainsi, nous en apprenons plus sur Lucky Luciano en étant à l'écoute de conversations entre tiers qu'en entrant dans son intimité, nous en savons plus sur lui quand il est absent que quand il est présent à l'écran, sous les traits impénétrables de Gian Maria Volonte. Adepte du réalisme historique, Rosi, en avançant par cercles concentriques, semble se refuser à aller au-delà des faits connus et prouvés. Le mystère Luciano reste entier : comme l'homme, drapé dans sa respectabilité, ne se laisse jamais compromettre aux yeux des enquêteurs, le personnage ne se laisse jamais percé par le regard de la caméra.

    La psychologie du boss sicilien intéresse de tout façon beaucoup moins Rosi que le système dont il est l'un des plus efficaces rouages, un sytème éclairé par tous les côtés possibles : économiques, politiques, historiques, sociaux. Dans une chronologie bousculée, le récit s'arrête sur une dizaine de dates, entre 1931 et 1961. Le film demande beaucoup d'attention au spectateur, par le va-et-vient temporel imposé et la quantité de noms et de références évoqués. Le risque d'égarement n'est jamais très loin.

    Parmi toutes les informations accumulées, les liens historiques tissés entre les Etats-Unis et l'Italie deviennent le véritable fil conducteur du film. Rosi décrit très précisément les mécanismes à l'origine de la terrifiante expansion mafieuse des années d'après-guerre : renvoi des gangsters devenus indésirables en Amérique vers leur Sicile natale dans le sillage des forces alliées débarquant à partir de 1943, installation au pouvoir, dans les localités libérées, de mafiosi du cru, avec l'assentiment des Américains, et plus tard, internationalisation des trafics depuis l'Italie. Avec pertinence, Francesco Rosi double son analyse historique d'une réflexion d'ordre culturel et artistique. Pour résumer dans son introduction le parcours criminel fulgurant de Luciano dans le New York des années 30, le cinéaste monte une longue séquence où se succèdent les exécutions sanglantes, filmées de manière graphique et enrobées de ralentis, effets de lumière et chanson traditionnelle. Une violence toute hollywoodienne donc. Le reste du récit, situé en grande partie en Italie, se distinguera au contraire par son refus du spectaculaire. Une seule exception à cela, une seule fusillade qui retrouve alors les codes cinématographiques américains : celle de l'assassinat de Giannini, tué bien sûr... dans une rue de New York.

    Lucky Luciano avait commencé son ascension en commanditant le meurtre de son propre boss, Masseria. On voit celui-ci se faire cribler de balles alors que le premier se lave consciencieusement les mains aux toilettes. Pendant des années, Luciano assurera ainsi sa position au sommet de la pyramide mafieuse grâce à sa discrétion, sa façade d'homme tranquille, son obsession de ne pas faire de vagues. Sa chute n'adviendra que tardivement et elle sera essentiellement due aux imprudences de ses associés. Le film s'ouvre sur un bateau amarré à New York et se termine dans un hall d'aéroport. Le récit est borné par ces lieux de transit, façon de rappeler que derrière le masque du calme entrepreneur rétif aux voyages se cache bien le principal responsable d'une tentaculaire organisation internationale.

    Oeuvre engagée et documentée Lucky Luciano a les défauts de ses qualités. Les multiples informations passent essentiellement par de longs dialogues, filmés dans des cadres institutionnels, des bureaux, des restaurants... Si le travail sur la photographie et les décors est remarquable (les personnages sont souvent filmés dans de grands volumes, signes d'une société déshumanisante), il ne compense pas toujours le manque de dramaturgie. On ne trouve ici ni le lyrisme de Salvatore Giuliano, ni l'inquiétude kafkaïenne de Cadavres exquis. Lucky Luciano reste tout de même un solide film-dossier. Et si cette appellation est souvent utilisée de manière péjorative en sous-entendant l'abandon de l'esthétique au profit unique du message, les oeuvres de Francesco Rosi n'ont, quant à elles, jamais manqué d'ambition, qu'elle soit esthétique ou narrative.

    (Chronique dvd pour Kinok)

  • Ouverture d'un second front

     

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    Répondant à une aimable invitation reçue ces jours-ci, j'ai accepté d'écrire quelques chroniques dvd pour le site Kinok. Il me semble opportun de les publier parallèlement ici pour au moins deux raisons. D'une part, je ne voudrais pas que le renouvellement des pages de ce blog s'en trouve trop ralenti et d'autre part, cela rendra possible vos commentaires sur les films abordés. Pour ces notes particulières, je préciserai à chaque fois qu'elles sont écrites initialement pour Kinok. Mais vous vous en rendrez vite compte, le ton adopté variant légèrement par rapport à mes écrits pour Nightswimming, sans, je l'espère, que cela empêche les échanges en commentaires.

    N'hésitez-pas à baguenauder dans tout Kinok, vous y trouverez moult articles intéressants et vous y reconnaîtrez peut-être quelques fines plumes issues de nos blogs cinéphiles favoris.

    (Photo : Brazil de Terry Gilliam)

  • Le Bon Roi Dagobert

    (Dino Risi / France - Italie / 1984)

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    dagobert.jpgDino Risi à la mise en scène, Gérard Brach et Age au scénario, Coluche, Serrault, Tognazzi et Carole Bouquet devant la caméra... Tout ce beau monde fut réuni en 1984 pour accoucher de cette catastrophe qu'est le Bon Roi Dagobert.

    Pendant quelques minutes, devant ce style visuel aussi rude que la campagne hivernale dans laquelle se déroule l'introduction, devant cette succession de dialogues grossiers, devant cet acharnement scatologique, on se dit, bienveillant et au fond désireux de nager à contre-courant de la mauvaise réputation du film, que l'irrespect peut être gage d'authenticité et de vigueur. Il faut malheureusement se rendre très vite à l'évidence. Risi a commis l'erreur de ne pas créer un véritable personnage mais de laisser Coluche faire ses sketchs habituels en habits médiévaux. Ses réflexions et ses onomatopées ponctuant chacune de ses interventions nourrissent un humour anachronique particulièrement pénible. Les deux hommes redresseront semble-t-il la barre, un an plus tard, avec un Fou de guerre apparemment bien plus profond (ce qui n'est pas difficile). Ici, le célèbre comique n'est certes pas le seul à jouer n'importe comment : les grimaces de Michel Serrault ne nous arrache qu'à grand peine quelques sourires et Ugo Tognazzi ne nous offre que le minimum syndical dans un double rôle.

    Arrivé au bout de ces 115 longues minutes d'un récit à l'intérêt très contestable, aboutissant à un paresseuse histoire de sosie du pape, je n'en retiens qu'une poignée de plans bien composés, un festival de poitrines généreusement offertes et deux plans de Carole Bouquet, l'un accompagnant sa sortie de bain (au lait) et l'autre, très bref, la montrant, épaule découverte et visage rayonnant, en train de jouer avec un serpent lors d'une orgie. C'est peu...

     

  • L'ange exterminateur

    (Luis Bunuel / Mexique / 1962)

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    Après l'opéra, les Nobile reçoivent chez eux vingt personnes du beau monde. Etrangement, tous leurs domestiques s'empressent dans le même temps de quitter la maison. A l'issue du dîner, les invités, pourtant fatigués, trouvent des excuses pour ne pas partir et se voient finalement dans l'impossibilité de sortir du salon. Ils restent ainsi cloîtrés plusieurs jours, les gens de l'extérieur ne passant pas, quant à eux, le portail de la demeure. Tel un petit groupe de rescapés livrés à eux-mêmes, ils doivent s'organiser malgré les tensions qui ne manquent pas d'éclater. Ils trouveront tardivement un moyen de sortir de cette situation absurde, mais la délivrance ne sera qu'illusoire.

    L'ange exterminateur (El angel exterminador) peut se laisser voir trois fois, quatre fois, indéfiniment, son mystère n'est jamais totalement percé. Luis Bunuel l'a voulu ainsi : insaisissable, irréductible à toute interprétation univoque, irrécupérable. Contrairement à L'âge d'or ou au Charme discret de la bourgeoisie, dont la force subversive découle en grande partie de constructions narratives déconcertantes, L'ange exterminateur apparaît paradoxalement comme l'un des films les plus réalistes de Bunuel. Le récit est ici linéaire. Les quelques rêves et hallucinations sont clairement circonscrits (et marquants : le très étrange songe collectif ou le cauchemar de la main coupée). La description des lieux et des personnages est des plus rigoureuse.

     

    ange1.jpg

    A chaque nouvelle vision, on reste stupéfait par la maîtrise du cinéaste dans le glissement vers l'irrationnel, tout en petites touches. Dès le début, au milieu d'amabilités convenues, des paroles semblent à double sens (souvent sexuel) quand d'autres ne semblent pas en avoir du tout. Mais avant même d'entendre ces conversations, et déjà étonnés du comportement des domestiques, nous  avons été troublés par un drôle de manège : nous avons vu les invités entrer deux fois dans le hall et leur hôte s'inquiéter de la même façon, doublement, de l'absence de son serviteur Lucas. Ceci n'est en fait que la première manifestation de la figure la plus notable du film : la répétition. Ainsi Nobile portera deux fois le même toast, deux invités se présenteront l'un à l'autre à plusieurs reprises dans la soirée, deux mains surgiront de l'armoire, le troupeau d'agneaux reviendra dans l'épilogue etc...

    angeb.jpgangea.jpgMais toutes ces répétitions, et c'est là tout le génie de Bunuel, ne se font pas de manière mécanique ni identique. Ainsi, l'arrivée des convives est filmée la seconde fois dans un rythme imperceptiblement différent et dans un cadrage légèrement rehaussé. Ce très léger décalage provoque un sentiment étrange, le spectateur percevant une image à la fois identique et à la fois différente. Bunuel joue en virtuose autour de cet entre-deux, faisant preuve d'une subtilité et d'une élégance confondante dans la description d'une situation si anormale. Une nouvelle preuve parmi d'autres : au début du repas, la chute du domestique avec son plateau est-elle vraiment un gag inventé par la maîtresse de maison, comme semblent le croire les invités ? Rien, bien évidemment ne nous en assure.

    On pourrait craindre que cette insolite claustration soit alimentée, à force, par des procédés d'écriture arbitraires. Il n'en est rien car là aussi, Bunuel fait preuve d'une intelligence incroyable. Chaque tentative de départ avortée d'un invité prend une forme différente. Le renoncement soudain sur le seuil peut être provoqué par un élément réaliste et crédible (l'arrivée du petit déjeuner qui redonnera des forces avant de partir), par un effondrement nerveux qui rameutera les autres convives, relancera le récit et recentrera l'action au milieu de la pièce, ou par une hésitation plus elliptique mais commentée en retrait par un petit groupe inquiet ("Regardez, ils vont s'arrêter... N'est-ce pas étrange ?"). Cette situation ne peut donc qu'être acceptée et alors, tout peut se détraquer petit à petit, le premier repère à se brouiller étant la notion du temps (personne ne réussissant précisément à savoir depuis combien de jours dure cette comédie).

     

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    Pendant 1h15, vingt protagonistes se croisent dans un décor unique (seules quelques échappées vers la rue sont accordées au spectateur). Par de délicats mouvements de caméra, on passe d'un petit groupe à un autre, au gré des conversations et des mouvements. Dans ce salon, Bunuel ne semble jamais choisir un cadrage ou un angle de prise de vue déjà utilisé auparavant. Comme s'il s'agissait d'épuiser toutes les possibilités avant de retomber au point de départ. C'est une fois que tous les recoins ont été scrutés, toutes les combinaisons ont été essayées, que le film peut s'arrêter, et par conséquent, le sortilège peut être levé. Les invités prennent conscience qu'après tant de jours passés dans cet enfer, ils ont retrouvé la place exacte qui était la leur au premier soir. Il leur suffit donc de rejouer le moment du départ pour, cette fois-ci, passer enfin le seuil. Dans le récit de L'ange exterminateur, il n'y a pas d'autre logique qu'une logique esthétique.

    Bunuel s'est toujours refusé à donner la moindre clé concernant son oeuvre, se bornant à répéter son avertissement initial : "La meilleure explication c'est que, raisonnablement, il n'y en a aucune." Inutile de convoquer le surnaturel. D'ailleurs, l'inefficacité des rituels superstitieux ou maçonniques est raillée, abaissant ceux-ci au même niveau que les ridicules croyances de la religion officielle. L'un des murs du salon se présente sous la forme de trois grands placards ornés d'images pieuses. Sous la protection des grands saints et à l'abri des regards, dans le premier, on se soulage dans des vases antiques, dans le deuxième, on cache les morts et dans le troisième, on consomme avant le mariage. La belle Silvia Pinal, après Viridiana, joue Leticia, qui sacrifiera sa virginité, se donnant derrière un rideau à Nobile dans un abandon qui déclenchera la sortie de la crise. L'athéisme (parfois ambigu) de Bunuel a toujours été réjouissant.

     

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    Parmi toutes les pistes broussailleuses qu'emprunte le film, il en est une qui paraît tout de même plus dégagée que les autres, celle d'une certaine vision politique et sociale. Tout d'abord, ce sont les domestiques qui sentent mieux que les autres que quelque chose va advenir. Seul le maître d'hôtel reste au service de ses patrons. Restant la première nuit dans la pièce adjacente au salon maudit, il finit par rejoindre les prisonniers. L'absence totale d'explication rationnelle à cette claustration laisse penser que celle-ci est finalement inconsciemment volontaire. Les us et les coutumes de la haute bourgeoisie ainsi poussés à l'extrême provoqueraient cet enfermement. La politesse empêche de partir. La volonté d'éviter à ses condisciples la honte pousse chacun à adopter les mêmes comportements, y compris les plus inconvenants. Le respect de l'étiquette ne peut mener qu'au conformisme et à la mort. Car la situation devient vite intenable. Tout ce que ces gens repoussent habituellement (vulgarité, crasse, laisser-aller...) s'infiltre irrémédiablement dans leur petit cercle. Mais c'est bien de l'intérieur que cette classe pourrit, contrairement à ce qu'elle croit (quand Leticia lance un cendrier à travers la vitre de la salle à manger, un convive, en pleine discussion dans la pièce d'à côté, pense que ce fracas est dû à "un juif qui passait").

    L'avertissement que constitue une telle mésaventure ne suffira pourtant pas. L'épilogue en donnera la preuve et cette fois la rue grondera de mouvements révolutionnaires. Cependant, Bunuel est bien trop malin pour brandir aussi simplement un drapeau. Il ne montre, brièvement, que des prémisses, une agitation, une répression militaire et termine sur un fameux plan de moutons s'engouffrant dans l'église où se rejoue le drame. Même la clé politique n'est donc pas dépourvue d'ambiguïtés et c'est bien cette position de méfiance devant toutes les idées reçues, doublée d'un rire salvateur, qui garantit la permanence de la place du cinéaste parmi les plus grands. Quand à cet Ange, précisément, on peut lui accoler facilement une bonne demie-douzaine de chefs-d'oeuvres bunueliens, s'étalant sur plus de quarante ans, mais il reste, je crois, le plus cher à mon coeur.

    Photos : dvd Calysta

  • Heat

    (Paul Morrissey / Etats-Unis / 1972)

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    heat.jpgAu sein de la production underground new yorkaise des années 60/70 chapeautée par Andy Warhol, les films réalisés par Paul Morrissey sont réputés comme étant les plus accessibles, intégrant quelques règles établies de narration et de technique que refusait d'utiliser le maître de la Factory dans ses propres oeuvres. Heat a l'aspect chaotique d'un documentaire avec l'enregistrement du son en direct (on entend régulièrement la circulation aux alentours du motel) et une lumière naturelle. Le découpage des séquences se fait plus volontiers à l'intérieur des plans, à coups de zooms et de recadrages, que par un montage classique. Les images ainsi captées à la volée peuvent laisser l'impression d'un style approximatif, bien que l'on remarque de ci de là d'évidentes compositions plastiques.

    Dans Heat, Paul Morrissey se penche sur Hollywood, côté cour. Il s'attache à des paumés, des marginaux, des has been, qui gravitent autour de la piscine d'un motel de Los Angeles, tenu par une grosse patronne aussi perverse que ses clients. Parmi ces artistes, apprentis-stars qui ne font plus la différence entre cinéma, télévision et shows érotiques, débarque Joey, un ex-enfant vedette, de retour de l'armée et d'autres galères. Arriviste mais sans trop faire d'efforts, il séduit la mère de sa voisine, actrice sur le déclin, riche et encore désirable.

    Le film ne cesse de se référencer au temps du glorieux Hollywood. Pendant le générique, on voit Joey se promener au milieu des décombres d'un vieux studio en démolition. L'ombre des stars du muet et des grands producteurs plane sur des villas devenues trop grandes. Les excès sentimentaux des protagonistes évoquent le mélodrame de la grande époque. Mais Morrissey insiste bien sur l'envers du décor, se focalisant sur son petit peuple de loosers, montrant en particulier ce qui était peu ou pas dévoilé alors : appât du gain, folie et, surtout, frasques sexuelles. De ce point de vue, Heat n'est pas un film piqué des hannetons et comme dirait l'Office Catholique, des images peuvent heurter. Le cinéaste joue autant avec les codes des genres cinématographiques qu'avec la censure, la limite avec le hard ne tenant guère qu'à la mince épaisseur d'un tissu qui ne cache pas grand chose de la forme se trouvant dessous. Ces scènes-là sont d'autant plus surprenantes qu'elles sont traitées avec le même naturel que le reste, allant parfois jusqu'à des plaisanteries hardies.

    C'est que, autre sujet d'étonnement, l'humour est constant. Certains dialogues sont franchement hilarants. On n'oubliera pas la réflexion de la mère à sa fille, fâchée que cette dernière vive avec une femme : "Tu n'es pas lesbienne, c'est provisoire" (et de fait, cela se révélera vrai); ni l'échange avec l'ex-mari, vivant lui avec un homo : "- Je ne veux plus que tu donnes tout mon argent à ce Jockey. - Il s'appelle Joey." Si l'esthétique à l'oeuvre, peu gratifiante, lasse parfois, elle porte cependant ses fruits lors des nombreuses scènes de ménage, assurément les meilleurs moments du film.

    Monstrueux ou touchants, les personnages semblent se confondre avec les acteurs hors-normes qui les incarnent. On sent une inégalité de jeu entre eux et à l'intérieur des registres de chacun, mais tous assument leur caractère tête brûlée. Joey c'est Joe Dallesandro, qui traverse le film en faisant converger tout les regards sans faire grand chose, magnifié en maillot de bain par une mise en scène qui doit beaucoup à l'imagerie gay. Sous sa longue chevelure, il est assez magnétique.

  • Êtes-vous Rohmerien(ne) ?

    manda.jpgLe résultat n'était pas forcément attendu : le réalisateur le plus cité au terme de la récente consultation lancée par Ludovic Maubreuil sur son blog Cinématique, en rapport avec ce qu'il reste du cinéma français de ces vingt dernières années, est Eric Rohmer.

    Rohmerien, je le suis assez, pour ma part, même si il a fallu un peu de temps pour que je le devienne. Si l'on n'a pas fréquenté son cinéma depuis un moment, entrer dès le début dans un film de Rohmer est rarement chose aisée. Le plus souvent, il faut compter quelques minutes d'acclimatation face à ces parlés très travaillés et cette mise en scène transparente (ce qui ne veut bien sûr pas dire inexistante, loin de là).

    A l'échelle de l'oeuvre entière, le sentiment est similaire. Je crois me souvenir avoir découvert le cinéaste à la fin des années 80, avec La collectionneuse et n'avoir guère apprécié ce style dandy et bavard. Le plaisir fut à peine plus vif avec Le genou de Claire ou L'ami de mon amie mais, au fil des films abordés dans le plus complet désordre, l'homme finit par m'intéresser. Quatre étapes importantes pour expliquer cela : La Marquise d'O... est le premier Rohmer à m'avoir vraiment marqué, bien que le film soit plutôt atypique par rapport aux autres (ou plutôt, compte tenu de mon regard d'alors, grâce à ses différences). Quatre aventures de Reinette et Mirabelle m'étonna ensuite agréablement par sa légèreté et sa liberté. Puis, devant Ma nuit chez Maud, vu à l'occasion d'une reprise en salles, l'évidence s'imposait. Enfin, lorsque je vis en rediffusion à la télévision le formidable documentaire de la série Cinéastes de notre temps (ou Cinéma..., je ne sais plus) consacré à Rohmer, j'y découvris un cinéaste s'exprimer sur son travail de façon incroyablement précise, comme jamais je n'avais entendu quelqu'un le faire à ce point.

    Parmi les titres remarquables de ces dernières années, j'aime moins que certains l'expérience osée de L'Anglaise et le Duc mais je place toujours au plus haut le Conte d'été, frémissant encore en pensant à ces retrouvailles avec la délicieuse Amanda Langlet, 13 ans après Pauline à la plage.

    **** : Ma nuit chez Maud (1969), Conte d'été (1996)

    *** : La Marquise d'O... (1976), Pauline à la plage (1983), Les nuits de la pleine lune (1984), Quatre aventures de Reinette et Mirabelle (1987), Conte d'hiver (1992), Conte d'automne (1998), L'arbre, le maire et la médiathèque (1993), Triple agent (2004)

    ** : Le genou de Claire (1970), Le beau mariage (1983), L'ami de mon amie (1987), Conte de printemps (1990), Les rendez-vous de Paris (1995), L'Anglaise et le Duc (2001)

    * : La collectionneuse (1967)

    o : -

    Pas vus : Le signe du lion (1959), La boulangère de Monceau (1962), La carrière de Suzanne (1963), L'amour l'après-midi (1972), Perceval le Gallois (1978), La femme de l'aviateur (1981), Le rayon vert (1986), Les amours d'Astrée et de Céladon (2007)

    A vos commentaires...

  • 1984

    (Michael Radford / Grande-Bretagne / 1984)

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    1984.jpgSi vous êtes un(e) visiteur(se) régulier(e) de ce blog, vous devez commencer à vous rendre compte de mon inculture littéraire. Je n'étonnerai donc personne en confessant ne connaître du mythique roman de George Orwell que quelques mots (Big Brother, guerre, totalitarisme, écrans...). Le film de Michael Radford ne sera donc pas jugé ici par rapport au livre (vos éventuels commentaires, positifs ou négatifs, sur l'adaptation elle-même sont bien sûr les bienvenus).

    Vu sans son référent, 1984se tient très bien tout seul et dégage une puissance et une cohérence peu commune. La première séquence est dédiée à l'un de ces meetings où des travailleurs sont abreuvés de discours belliqueux, par l'intermédiaire d'un écran géant. Tout en montrant, avec sa caméra balayant la foule, l'instrumentalisation des émotions, le lavage de cerveau et la véhémence de réactions dirigées, le cinéaste laisse deviner quelques espaces libres. Tous, dans la foule, ne font pas exactement les mêmes gestes et pas au même moment, certains regards fuient l'écran, une tête se retourne... Si le mécanisme abrutissant est bien à l'oeuvre, il reste (il restera toujours) du jeu dans la machine, il reste l'irréductible "esprit humain", comme le nommera plus tard Winston Smith.

    Celui-ci cultive en lui l'une des graines de résistance à un pouvoir autoritaire et tentaculaire qui, sous le prétexte de la guerre, maintient le peuple dans l'ignorance et la pauvreté, ré-écrit l'histoire et s'acharne à annhiler tout libre arbitre. Smith résiste tout d'abord en passant par l'écriture. Sur un cahier, à l'abri du regard de Big Brother, il ré-apprend à utiliser une langue que les dirigeants s'escriment à simplifier, à contrôler, à expurger, avec la même énergie qu'ils mettent à broyer les consciences individuelles. Il s'agit pour lui d'exercer par là une subjectivité qui lui est refusée (exercer car cela demande un réel effort).

    Parallèlement, Winston Smith s'engage sur une autre voie, tout aussi déviante au regard des autorités : celle de la passion amoureuse. Dans un monde où la voix du Maître se félicite de la chute du nombre de mariages, où l'on fait voeu de célibat et où l'on combat la recherche de l'orgasme, un nouveau couple se forme, décidé à assumer ses pulsions. "I want you" ne cessent de se dire Winston et Julia. L'appauvrissement imposé du langage redouble l'impact et la crudité de ces situations. La révélation soudaine des corps dans leur nudité crée le même choc. Ceux-ci se détachent des murs gris de la chambre et s'opposent aux uniformes qui sont partout. Rarement mise à nu d'une femme à l'écran (et d'un homme, mais, comme d'habitude, un peu moins) n'aura été autant justifiée scénaristiquement, esthétiquement et moralement.

    Dans le rôle de Julia, Suzanna Hamilton est une découverte, et pas seulement plastique, tant elle fait preuve de sensibilité. L'actrice n'est pas la seule à être digne de louanges. John Hurt traverse le film avec son corps souffrant et sa force intérieure. Devant lui se dresse un prodigieux et massif Richard Burton (dans son dernier rôle), qui incarne la toute puissance dictatoriale avec le minimum d'effets. Leur face à face final est d'anthologie.

    Michael Radford a su créer l'atmosphère pesante adéquate avec sobriété, lestant tous les décors d'une réelle présence. Il obtient un équilibre parfait entre flash-backs, divagations et réalité jusqu'à égarer doucement son spectateur. Dans la chambre, de très simples mouvements d'appareil partent de l'écran mural pour cadrer dans un recoin Winston Smith écrivant sur son journal. De beaux fondus enchaînés parsèment l'oeuvre, le plus marquant et le plus étrange nous amène vers un plan où Richard Burton tient dans ses bras John Hurt, qu'il vient de torturer. Le retour d'images identiques n'ennuie pas, la répétition étant l'un des fondements de la société décrite. L'utilisation de la musique participe pleinement à l'ambiance. Elle est signée par Dominic Muldowney et le fameux groupe électro-pop Eurythmics (sur la bande-son, pas de tube comme Sex crime, la voix d'Annie Lennox ne s'entendant que sur le générique de fin, mais des boucles synthétiques tout à fait pertinentes).

  • Collateral

    (Michael Mann / Etats-Unis / 2004)

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    collateral2.jpgCollateralest énervant et ce d'autant plus que le film de genre s'y drape d'esthétisme forcené. Michael Mann a eu ce qu'il a voulu : il passe maintenant pour un grand styliste...

    Nous n'avons pas tant là une oeuvre formaliste qu'un objet chichiteux, dans lequel le cinéaste ne se résout jamais à laisser passer un seul plan, même le plus bref, qui n'en mette plein la vue par le choix du cadrage, de la lumière ou de la composition interne. Ces effets à répétition donnent une esthétique chic et lisse qui sombre vite dans la vacuité clipesque. La bande son subit le même traitement hyper-chiadé (c'est la première fois que je me trouve devant une séquence de discothèque où l'on entend à peine la musique, et cela sans aucune raison). La bande originale, elle, se résume à une soupe rock-FM imbuvable.

    Tout ceci n'est encore rien à côté du scénario, dont nous devrions accepter la nullité sous prétexte de mise en scène "souveraine" et de récit à rebondissements. L'invraisemblable est partout : aucune péripétie n'y échappe. La moindre séquence de Collateral pourrait être contestée sur ce point, la plus ahurissante étant celle qui voit le brave chauffeur de taxi se substituer au tueur lors du rendez-vous avec les commanditaires.

    La relation qui se tisse entre les deux personnages principaux, que jouent mal Tom Cruise et Jamie Foxx, repose elle aussi sur du vide. La peur et la fascination mêlée, la tentation d'une autre vie, le flirt avec la limite : aucune piste n'aboutit, plombées qu'elles sont de toute façon par des touches d'humour pathétiques (la visite rendue à la mère hospitalisée) et par une philosophie de bazar. Car bien entendu, le tueur est la personnification du Mal et de ce fait, philosophe beaucoup. Une incarnation similaire mais ô combien plus inquiétante sera proposée par Javier Bardem, plus tard, chez les frères Coen (No country for old man). L'acteur espagnol tient un rôle secondaire ici, placé au centre d'une scène symptomatique de l'échec total du film. Dans la peau de celui qui tire les ficelles, il use de périphrases, prenant un détour idiot le menant vers une fable mexicaine sur Santa Claus au lieu d'avoir une discussion simple et claire. Mais Michael Mann n'est pas à un tic auteuriste près.

    Non content de nous faire subir d'incessants retournements de situations (le dernier, qui nous révèle l'identité de la dernière victime sur la liste, est affligeant), il se montre parfois d'une grande complaisance, comme dans cette scène où Tom Cruise dégomme deux petites frappes qui en voulaient à sa mallette. Tarantino a été lynché pour trois fois moins que ça. Que l'on ne s'inquiète pas, le héros noir, que toutes les polices prennent pour le tueur, ne sera pas abattu par erreur par les flics. Nous ne sommes pas chez Romero. Nous sommes plutôt à l'opposé du spectre : dans le douteux, le clinquant, la frime...