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Nightswimming - Page 81

  • The killer inside me

    (Michael Winterbottom / Etats-Unis / 2010)

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    killerinside.jpgLe Britannique Michael Winterbottom est un réalisateur moyen, dont les résultats oscillent entre le pas terrible et le pas mal, du moins pour ce que j'en sais, celui-ci tenant en effet une cadence de production impressionnante et difficile à suivre (une vingtaine de titres accumulés depuis le début des années 90). Précédé d'une légère odeur de souffre, essentiellement due à la sauvagerie de quelques meurtres (notre homme aimant se faire parfois provocateur comme lorsqu'il réalisa ce 9 songs alternant scènes de sexe et captations de performances rock, expérience au final plus ennuyeuse qu'autre chose, si l'on en croit la très grande majorité des spectateurs y ayant goûté), The killer inside me ne change en rien la position du cinéaste, ce dernier opus en date, bien que s'assurant l'une des meilleures places au sein de la filmographie, drainant en quantités égales qualités et défauts, habiletés et maladresses.

    Le scénario est une adaptation de Jim Thompson, auteur inspirant généralement les cinéastes (Peckinpah et Guet-apens, Corneau et Série noire, Tavernier et Coup de torchon, Frears et Les arnaqueurs). De fait, on retrouve avec un certain plaisir cette ambiance noire et poisseuse dans laquelle se trouve confiné le petit monde de Thompson, Winterbottom arrivant assez bien à la restituer. Le personnage principal est un salaud de première, psychopathe cogneur (surtout envers les femmes) se cachant derrière les traits d'un jeune shérif à la voix d'adolescent, toujours prêt, à la ville, à aider son prochain et s'adressant avec politesse et retenue aux dames. N'en rajoutant pas trop dans les regards par en dessous à l'attention du spectateur lorsque ses victimes ont le dos tourné, Casey Affleck est plutôt bon. Le parcours criminel de son Lou Ford nous révulse sans aller toutefois jusqu'à nous en détourner, son entêtement à creuser sa propre tombe en y entraînant le maximum de gens de son entourage nous paraissant d'une certaine façon assez fascinant. Du bon côté de la balance, grâce notamment aux acteurs (les filles comprises), nous mettrons également la gestion des temps faibles de l'enquête, rendant compte de la mentalité régnant dans le coin à l'aide de dialogues à l'allure si typique qu'ils en deviennent parfois (brièvement) obscurs.

    Ce récit, qui accroche suffisamment sur les presque deux heures de sa durée, n'est toutefois pas mis en scène avec une égale maîtrise. L'usage de la voix-off est un procédé classique du film noir, dont il n'y a ici, ni à se plaindre, ni à s'extasier. Les flash-backs sont quant à eux bien patauds, qu'ils prennent pour sujet un épisode traumatique de l'adolescence ou la friabilité des instants de bonheur passés dans les bras d'une belle femme. Plus appréciable est l'insertion de la séquence de la lettre, une scène que l'on voit telle qu'elle ne s'est pas passée. Mais Winterbottom n'est pas un cinéaste à l'aise avec les expérimentations narratives (cinq ans après, je cherche encore l'utilité de son Tournage dans un jardin anglais). Après 9 songs, la nouvelle alternance qu'il nous impose entre scènes d'amour (soft, cette fois-ci) et scènes de violence, ne produit pas vraiment de vertige. Ces dernières, sur lesquelles s'est bâtie la réputation du film, ont une force réelle. Certains les trouveront complaisantes. Nous n'irons pas forcément les contredire...

  • Le bruit des glaçons

    (Bertrand Blier / France / 2010)

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    bruitglacons.jpgLe grand retour de Blier ? Mon cul, oui !

    Il est cramé le mec... Le ressort est pété, rouillé, émietté. Depuis longtemps d'ailleurs. Depuis Un, Deux, Trois, Soleil, minimum. Ça fait près de 20 ans ! C'est foutu maintenant... Le moteur tourne à vide, il ne produit plus rien : là l'intro qui fait mouche pour faciliter le travail des journalistes ciné ("Je suis votre cancer" repris partout), là la mort qui rôde, là le flash-back poreux, là la scène-d'amour-qui-dérange-mais-qui-en-fait-est-très-pure, là, là, là, là et là aussi, les apostrophes lancées à la caméra. Cinéma de photocopieuse (et une photocopie de photocopie cela dégrade fortement la qualité), celle qui est à côté de la machine à café, là où l'on entend les meilleures vannes des collègues ("Ça colle au cul un cancer !"). On avait la petite musique stridante de Blier, il ne nous reste plus que son bon gros théâtre de l'absurde. Quatre acteurs (ou un peu plus à l'occasion) entre quatre clôtures d'une belle villa pour une histoire qui avance si peu. Une histoire qui avance si mal. A coups de coups de théâtre et d'idées purement littéraires. Attends, mais c'est quoi ce dénouement à la con ? Une trouvaille de scénariste tombant du ciel et que rien ne peut justifier dans tout ce qui précède (elle est passée où, tout à coup, l'omniscience du Cancer ?). Ou alors on n'a qu'à dire que le fameux style Blier, son fantôme plutôt, impose par sa distanciation qu'on lui passe tout : l'anonymat esthétique, la grossièreté des blagues, l'aléatoire des apparitions (Dupontel : Vous me voyez, Vous ne me voyez pas, Vous me voyez, Vous ne me voyez pas...). Et puis franchement, passer 90 minutes avec un poivraud... Rien de plus soûlant qu'un alcoolo. Un alcoolo ça finit toujours par plomber l'ambiance. Un alcoolo ça se casse la gueule dans l'escalier mais ça ne fait pas rire, ça se fait juste mal à la jambe. Toute façon, Dujardin n'a pas la carrure. Et Dupontel l'a trop. Lui je ne l'aime pas. Putain Bertrand... Dupontel et Dujardin... L'acteur de Jean Becker et celui de James Huth ! Kervern et Delépine ont pas voulu te rendre Depardieu ou quoi ?

  • Tant qu'il y aura des hommes

    (Fred Zinnemann / Etats-Unis / 1953)

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    tantquilyauradeshommes.jpgLa cause semble entendue. Le message étant martelé depuis des décennies, le moindre cinéphile le sait, parfois même sans l'avoir vu : Tant qu'il y aura des hommes (From here to eternity) (et par extension l'œuvre entière de Zinnemann...) est un film de prestige académique au vieillissement prématuré, rempli de fausses audaces, à peine sauvé par quelques éclairs et des numéros d'acteurs.

    Personnellement, je le trouve assez beau.

    La forme est classique, tantôt discrète, tantôt appuyée. Ce balancement a très vite été convoqué pour établir la preuve d'un manque de style propre. Or, on peut tout aussi bien le juger nécessaire à un film construit sur une série de tensions-explosions. De la fameuse scène de baignade amoureuse entre Deborah Kerr et Burt Lancaster, nous apprécions moins les fougueux baisers que la hâte fiévreuse avec laquelle les deux futurs amants ôtent leurs vêtements pour se tenir face-à-face en tenue de bain (Lancaster étant même, à ce moment-là, cadré au niveau du torse seulement), gestes brusques et libérateurs, que les plans de vagues déchaînées surlignent un peu inutilement. Plus loin, la première des trois explosions de violence jalonnant le récit saisit par sa sècheresse et vient rappeler que Zinnemann signa cinq ans auparavant l'un des meilleurs films noirs de l'après-guerre, Acte de violence. L'affrontement dans ce bar, qui reste finalement au stade de la menace de mort, donne à voir une vivacité de réaction des corps impressionnante. Lancaster notamment semble alors être traversé par une tension phénoménale. Dans ce registre de la force intérieure difficilement canalisée, son partenaire Montgomery Clift n'a bien sûr rien à lui envier. Tous les acteurs du film jouent d'ailleurs magnifiquement, y compris Frank Sinatra dans un rôle pourtant basé en partie sur le pittoresque (celui du "Rital"). Zinnemann les dirige avec précision et la qualité du scénario et des dialogues font le reste.

    En effet, l'écriture y est remarquable, donnant  l'impression d'un film choral tout en donnant une importance graduée aux différents protagonistes, le principal étant le soldat Prewitt interprété par Clift, dont la destinée éclaire indirectement celle des autres. Cette excellence de l’écriture est perceptible dès le début, les rapports, parfois complexes, s’établissant entre les personnages nous intéressant aussitôt. Cet épisode de la vie d’une caserne américaine du Pacifique, clairement situé dans le temps à la toute fin du récit (juste avant, un panneau de signalisation brièvement aperçu à l’arrière-plan fit office, pour moi, de révélation soudaine), est habilement conté en établissant des parallèles assez souple entre deux couples et entre quelques individualités. L’audace que l’on prêtait à Tant qu’il y aura des hommes à l’époque de sa sortie n’est certes guère décelable aujourd’hui. Tout juste distingue-t-on un possible sous-texte homosexuel, passant à travers les regards et les gestes d’affection de Lancaster à l’attention de Clift. Ce qui intéresse le plus n’est de toute façon pas là. Si audace il y a, elle est plutôt dans la volonté qu’a Zinnemann de proposer au public une histoire ambitieuse, intelligente, complexe. Ainsi, la vision de l’armée évite le manichéisme. Le film n’est pas une charge contre l’institution mais une observation critique de l’intérieur. Le soldat Prewitt, son sergent ou son copain envoyé en camp de redressement, ne sont pas des "hommes contre" (en trouve-t-on beaucoup dans l’armée de métier ?), ce sont juste des individualités assez singulière pour que le spectateur s’y attache et des personnes qui, en cherchant à préserver leur dignité, se retrouvent littéralement coincés dans ce carcan militaire qu'ils ne remettent pas fondamentalement en cause. L’ambiguïté de l’approche peut gêner notre bonne conscience, elle n’en est pas moins crédible et juste. A défaut de génie, Zinnemann fait preuve tout au long de son film d’une réelle sensibilité.

  • Tamara Drewe

    (Stephen Frears / Grande-Bretagne / 2010)

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    tamaradrewe.jpgLa Tamara de Stephen Frears étant plus charmante et moins horripilante que la Poppy de Mike Leigh, Tamara Drewe est plus supportable que Be Happy. Cependant, il n'est qu'à peine meilleur. En effet, Frears, partant d'une célèbre BD, signe là une comédie anglaise banale carburant à l'ironie contemporaine mais restant étonnamment vieillotte dans sa forme. Les caractères, détaillés sans nuances, y sont aussi convenus que les intentions du cinéaste paraissent vagues (jamais nous ne voyons vraiment à quoi il veut en venir avec ce récit choral). Son vaudeville campagnard est mou du genou, rarement drôle. L'impression est tenace d'avoir là un film de vieux, dans lequel seuls les personnages les plus jeunes, bien que n'étant pas moins superficiels que les autres, apportent quelques éclairs de vie. On retiendra ainsi, hormis la façon qu'a Gemma Arterton de porter - trop brièvement - short moulant et débardeur, la description d'un rapport maladif entre une jeune fan coincée dans son bled paumé et la célébrité qu'elle vénère (sujet pas toujours bien traité selon les scènes mais rendant le mélange de cruauté et d'empathie plus intéressant ici que lorsqu'il sert à colorer les thèmes de la rivalité artistique ou des déboires amoureux). Split screen, incrustations, brèves visualisations de fantasmes, intertitres saisonniers, utilisation des clichés attachés aux types sociaux dépeints : Frears déroule sans vigueur, sans invention particulière. Son Tamara Drewe, loin de lui faire retrouver la forme, fait surtout penser, avec nostalgie, aux récents films européens de Woody Allen, assez semblables dans leurs données de départ et leurs thématiques mais cent coudées au-dessus en termes de mise en scène.

  • Cahiers du Cinéma vs Positif (1987)

     Suite du flashback.

     

    cdc400.jpgPOS316.JPG1987 : Les Cahiers élargissent officiellement leur comité de rédaction (Antoine de Baecque, Joël Magny...), rendent hommage à Andreï Tarkovski, se retournent vers plusieurs classiques (Murnau, Sirk, Keaton, Mizoguchi, Marilyn Monroe, Stroheim, Michel Simon), défendent Le maître de guerre de Clint Eastwood, Un adieu portugais de Joao Botelho, Hotêl de France de Patrice Chéreau, Soigne ta droite de Jean-Luc Godard, Poussière d'ange, Les ailes du désir, Full metal jacket, Intervista, Yeelen. Ici comme en face, le nombre d'entretiens publiés est élevé : Nanni Moretti, Eric Rohmer, David Cronenberg (La mouche), Oliver Stone, Maurice Pialat, Jean-Pierre Mocky (Le miraculé et Agent trouble), Barbet Schroeder (Barfly), Jacques Doillon (Comédie !), Louis Malle (Au revoir les enfants), Alain Tanner (La vallée fantôme), Bernardo Bertolucci, Michael Cimino (Le Sicilien), Shohei Imamura (Zegen), Jeanne Moreau, Marcello Mastroianni.
    Positif n'est pas en reste, rencontrant également Moretti, Stone, Niermans, Malle, Imamura et Mastroianni mais aussi Serge Gainsbourg (Charlotte for ever), Denys Arcand, Kuji Yoshida (Promesse), Martin Scorsese, Peter Weir (Mosquito Coast), Luigi Comencini (La storia), Théo Angelopoulos (L'apiculteur), Gleb Panfilov (Le thème), Bob Rafelson (La veuve noire), Bill Bennett (Backlash), Paolo et Vittorio Taviani, Ethan et Joel Coen (Arizona Junior), Wim Wenders, John Huston (Gens de Dublin), Nico Papatakis (La photo), Peter Greenaway, Stephen Frears (Prick up your ears), John Boorman, Souleymane Cissé.  De nombreuses pages sont noircies à propos de Coppola, Kubrick, Rosi et Nikita Mikhalkov (Les yeux noirs). Le point est fait sur le nouveau cinéma chinois et taïwanais et la revue s'intéresse au Japon, au Brésil, à l'affiche de cinéma, au muet, à l'animation (entretien avec Paul Driessen). On notera enfin la presence de dossiers sur Frank Capra et Mitchell Leisen et un hommage à Georges Franju.

     

    Janvier : La messe est finie (Nanni Moretti, Cahiers du Cinéma n°391) /vs/ Peggy Sue s'est mariée (Francis Ford Coppola, Positif n°311)

    Février : Quatre aventures de Reinette et Mirabelle (Eric Rohmer, C392) /vs/ Le déclin de l'empire américain (Denys Arcand, P312)

    Mars : La couleur de l'argent (Martin Scorsese, C393) /vs/ La couleur de l'argent (Martin Scorsese, P313)

    Avril : Poussière d'ange (Edouard Niermans, C394) /vs/ Platoon (Oliver Stone, P314)

    Mai : Intervista (Federico Fellini, C395-396) /vs/ Chronique d'une mort annoncée (Francesco Rosi, P315)

    Juin : Intervista (Federico Fellini), Sous le soleil de Satan (Maurice Pialat), Les ailes du désir(Wim Wenders) et Yeelen (Souleymane Cissé) (C397) /vs/ Good morning Babilonia (Paolo et Vittorio Taviani, P316)

    Eté : Marilyn Monroe (C398) /vs/ Ladies of leisure (Frank Capra, P317-318)

    Septembre : Sous le soleil de Satan (Maurice Pialat, C399) /vs/ Les ailes du désir (Wim Wenders, P319)

    Octobre : Full metal jacket (Stanley Kubrick, C400) /vs/ Le ventre de l'architecte (Peter Greenaway, P320)

    Novembre : Le dernier empereur (Bernardo Bertolucci, C401) /vs/ Hope and glory (John Boorman, P321)

    Décembre : Yeelen (Souleymane Cissé, C402) /vs/ Intervista (Federico Fellini, P322)

     

    cdc402.jpgPOS321.JPGQuitte à choisir : Seuls le Capra et les deux films de janvier m'ont jusque là échappé. Beaucoup de grands noms à l'affiche pour une année... plutôt moyenne, car je ferai personnellement la fine bouche à propos de La couleur de l'argent, d'Intervista, de Sous le soleil de Satan, du Ventre de l'architecte, du Dernier empereur. Les Arcand, Niermans, Stone, Rosi sont à mon avis des films estimables mais pas bouleversants. Au-delà de l'évidence Wenders et Kubrick (Full metal jacket restant toutefois le seul des six derniers films du cinéaste à ne pas avoir été mis en couverture de Positif), je suis attaché à Reinette et Mirabelle, à Good morning Babilonia, à Yeelen et à Hope and glory. Allez, pour 1987 : Avantage Cahiers.

     

    A suivre...

    Sources : Calindex & Cahiers du Cinéma